Hommes «hyper-virils», femmes «séductrices» : la plupart des vidéos à succès sur YouTube véhiculent des stéréotypes de genre, et près d'un quart montrent des violences ou insultes sexistes ou sexuelles, s'est alarmée la Fondation des femmes le 26 août. Selon une étude qu'elle a réalisé en collaboration avec Sciences Po Paris, 68% des 200 vidéos les plus regardées en France ces deux dernières années sur la plateforme (100 en 2019 et 100 en 2020) contenaient de tels stéréotypes.
Le plus souvent, ces séquences problématiques ont été repérées dans des clips musicaux, qui représentent près des trois quarts des 200 vidéos les plus vues. Nombre de clips à succès contiennent des insultes sexistes ou des propos misogynes, dénoncent les autrices de l'étude. Dans l'un des clips visionnés, le chanteur «évoque le fait d'alcooliser une femme pour avoir des relations sexuelles avec elle», ce qui relève d'une «culture du viol», selon elles.
Au total, plus de 20% des vidéos mettent en scène des femmes «sexualisées», notamment dans des «mouvements érotiques» ou des «poses lascives», et environ 35% présentent une «image dégradante des femmes». Elles y sont cantonnées à un rôle «esthétique et inactif», subissent du harcèlement de rue, ou sont filmées avec un cadrage insistant sur leur poitrine ou leurs hanches.
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«Ces violences et ces préjugés vont au delà de ce qui est tolérable», a commenté auprès de l'AFP Sylvie Pierre-Brossolette, ancienne membre du CSA et coordinatrice du rapport pour la Fondation des femmes. Ces images «ont du succès mais font beaucoup de mal, car elles donnent une vision biaisée du mâle dominant et de la femme dominée», et donc «font le lit des violences» dans la vie réelle, insiste-t-elle.
Les pouvoirs publics doivent se saisir du problème et lutter contre ce «sexisme en liberté» sur internet, plaident les autrices du rapport. Ainsi, la loi pourrait élargir les prérogatives du CSA. Celui-ci devrait désormais pouvoir s'assurer que les programmes diffusés ne contiennent pas de «propos et images sexistes» ou «dégradants à raison du sexe ou de l'identité de genre», proposent-elles.
Par ailleurs, les organismes publics de soutien à la production, comme le Centre national du cinéma (CNC) ou de la musique (CNM) devraient s'engager à ne plus financer d’œuvres «véhiculant des propos et images sexistes, dégradantes ou stéréotypées». Les plateformes numériques pourraient par ailleurs s'engager, via une «charte de bonne conduite», à surveiller les vidéos mises en ligne et supprimer les séquences les plus dégradantes, suggèrent les autrices de l'étude.