Communication politique
Trente-cinq citoyens français tirés au sort pour « accompagner » la campagne de vaccination : une belle idée démocratique mais incomprise, voire décriée. Qu’est ce qui coince ? Éléments de réponse.

« Imaginez un seul instant, Clemenceau organiser un tirage au sort de citoyens pour remonter le moral des troupes dans les tranchées ? #tirageausort #vaccinations », peut-on lire sur Twitter ce lundi 4 janvier, jour du tirage au sort des 35 Français chargés de se prononcer sur la stratégie vaccinale de la France contre le coronavirus. L'initiative, bien qu’annoncée depuis novembre, est abondamment critiquée. Entre détournements et bon mots, les réseaux sociaux s’en donnent à coeur joie.

Incompréhension

L’idée émane directement du président Emmanuel Macron pour, selon ses mots, « associer plus largement la population » sur la vaccination. Un « panel » de personnes choisies selon plusieurs critères tels que l'âge, le genre ou la catégorie socioprofessionnelle. Mais le procédé semble mal compris par la population et fait également grincer des dents la classe politique. Du député LR Philippe Gosselin, qui y voit une tentative de « s'asseoir sur le Parlement », au président de l'UDI Jean-Christophe Lagarde, qui évoque un « gadget totalement délirant et antidémocratique ».

Il faut dire que le sujet est brûlant, il cristallise la défiance de la population envers un gouvernement qui tâtonne à de nombreux égards depuis le début de la crise covid-19 : 66 % des Français ont le sentiment que le rythme actuel de vaccination de la population française est trop lent, selon le dernier sondage de l'institut Elabe. Quand en même temps, encore 45 % des Français n’ont pas l’intention de se faire vacciner. 

Reco n°1

« C’est le timing du tirage au sort qui était inapproprié »

Bernard Sananès, président de l'institut Elabe

« La méthode n’est pas nouvelle, l’exemple le plus récent étant la Convention citoyenne pour le climat en 2019. Le gouvernement fait très souvent appel à des panels citoyens, et cela n’est jamais remis en question. Ce qui change ici, c’est l’importance et l’urgence du sujet. Cela a rendu la démarche plus visible. Ce tirage au sort a été réalisé au moment où une autre polémique, celle de la lenteur de la campagne de vaccination, battait son plein. L’annonce est intervenue à un moment inapproprié et a donné l’impression que la réponse était ridicule face à une problématique absolue. Résultat : cela renforce l’idée de l’inutilité de ce comité puisque toutes les décisions ont déjà été prises, la campagne étant déjà lancée… »



Reco n°2

« Ce qu’attend la population, c’est aussi de l’autorité »

Philippe Moreau Chevrolet, président de l’agence MCBG Conseil

« Toute la stratégie de communication du gouvernement a été basée sur le principe qu’il allait falloir convaincre une population française réticente, voire hostile, à se faire vacciner. Sans prendre en compte la probabilité qu’une fois le vaccin livré, les Français changeraient d’avis. Nous sommes nombreux à penser que ce qu’attend la population, c’est aussi de l’autorité, une marche à suivre claire. L’idée d’un collectif de citoyens tirés au sort ne fonctionne pas : ce n’est pas un nouveau format démocratique mais un outil de communication. Dans une crise aussi grave, c’est trop peu et trop tard. Je pense que la meilleure communication possible reste la communication médiatique, d’aller sur les plateaux TV répondre aux questions des gens. »

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