La procédure d'attribution des fréquences de la nouvelle technologie mobile 5G est officiellement lancée en France: l'Autorité de régulation des télécoms (Arcep) a publié ce 21 novembre son cahier des charges, avec quelques semaines de retard et dans un contexte d'intense lobbying de la part des opérateurs.
L'arrivée de la 5G est très attendue car, par les débits importants et le très faible temps de réaction (latence) qu'elle promet, elle est censée accélérer la numérisation de l'économie et permettre à terme le développement de nouveaux services, de la voiture autonome à la santé connectée en passant par une accélération de la robotisation de l'industrie, notamment.
Un enjeu de taille
La publication du cahier des charges de l'Arcep était prévue initialement début octobre, avec pour ambition d'attribuer officiellement les fréquences dès le début de l'année 2020. Cela devrait désormais intervenir seulement avant le début du printemps.
«Les opérateurs n'ont pas répondu d'une voix commune, contrairement aux fois précédentes, ils sont partis divisés. La difficulté a sûrement été de trouver le bon équilibre», a expliqué à l'AFP une source proche du dossier. Pour la première fois en effet, les opérateurs vont d'abord acquérir un bloc fixe chacun puis enchérir sur la part des fréquences restantes, un modèle inhabituel comparé aux enchères précédentes ou même à ce qui s'est produit ailleurs en Europe.
L'enjeu est de taille: plus que pour les technologies précédentes, la possibilité d'offrir les services promis par la 5G repose avant tout sur la taille des blocs détenus par les opérateurs. Trop petits, et c'est le risque de ne pas pouvoir rivaliser avec les autres. Très vite, deux camps se sont formés, Orange et SFR militant plutôt pour des blocs minimaux de 40 mégahertz (MHz) quand Bouygues Telecom et Free poussaient pour des blocs de 60 MHz.
«L'Arcep a proposé de retenir une taille de bloc de 60 MHz pour répondre à l'ensemble des orientations fixées par le gouvernement», mais ce dernier «a privilégié une taille de bloc de 50 MHz pour atteindre les objectifs qu'il a fixés», explique le régulateur jeudi 21 novembre dans son communiqué.
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Reste encore à savoir combien cela va coûter aux opérateurs. Parmi les pays européens où l'attribution des fréquences pour la 5G a déjà été réalisée, l'Italie et l'Allemagne sont ceux où ils ont déboursé le plus, au-delà de 6,5 milliards d'euros. «Il est indispensable de trouver le bon équilibre entre les enchères et la capacité d'investissement des opérateurs», insiste Arthur Dreyfuss, le président de la fédération française des télécoms (FFT), interrogé par l'AFP, «nous investissons déjà 10 milliards d'euros par an et nous devrons maintenir ces capacités d'investissement.»
Le gouvernement devrait préciser le prix dans les prochains jours. «On devrait être plus proche de 1,5 milliard que de 3 milliards d'euros», estime une source proche du dossier, qui relève notamment que Free, qui a dû fortement dépenser en Italie pour les fréquences 5G, a énormément milité en faveur d'un prix bas. Au-delà de la question des blocs et du tarif, le cahier des charges de l'Arcep prévoit toute une série d'engagements de couverture pour les opérateurs.
Parmi les plus importants, Orange, Bouygues Telecom, Free et SFR devront couvrir au moins deux villes chacun avant la fin de l'année 2020. Des échéances ont également été prévues pour la couverture des axes de circulation à moyen terme, ainsi qu'un débit minimal de 240 mégabits par seconde (Mbit/s) sur 75% des sites mobiles à l'horizon 2022.
Qui fournira les équipements ?
Pas d'encadrement en revanche à ce stade des fournisseurs d'équipements, alors même que l'un des plus acteurs les plus avancés du secteur, le chinois Huawei, est dans le collimateur aux États-Unis. «Nous sommes toujours en attente de clarifications sur le sujet des équipementiers car elles sont indispensables au regard des enjeux et des investissements en cours et à venir», insiste d'ailleurs M. Dreyfuss.
Le gouvernement français a fait voter avant l'été une loi sur la sécurisation des réseaux qui doit permettre un contrôle accru des équipements qui seront utilisés, mais les décrets d'applications n'ont toujours pas été publié, forçant les opérateurs retarder la commande de leurs équipements.