Pourquoi avoir lancé une nouvelle version de GQ ?
Xavier Romatet. Nous nous sommes aperçus que nous avions été beaucoup copiés. Le Grand Journal a, par exemple, utilisé la police de GQ. De nombreux journaux ont repris les signes distinctifs du titre, instaurés par le GQ américain, comme l'étoile, les astérisques, le grenier, etc. Du coup, nous avons décidé de réinventer notre forme, alors qu'il nous semble que nous avons réussi le pari du fond: après deux ans d'existence, GQ a atteint ses objectifs, avec une diffusion France payée de 71405 exemplaires. Nous avons donc fait appel à des typographes suisses, qui nous ont dessiné des typographies exclusives. Nous pourrons ainsi attaquer si on nous copie. Notre typo rappelle celles de l'entre-deux-guerres… Nous avons voulu revenir à un esprit très français. Nous avons également changé notre code couleur, autrefois rouge, jaune et bleu, pour une palette plus atténuée et plus masculine.
La presse masculine n'est pas des plus florissantes...
X.R. Nous nous sommes toujours interdit d'être dans la caricature. C'est d'ailleurs pour cela que nous avons choisi une femme, Anne Boulay, comme rédactrice en chef. Nous avons également eu à cœur de faire de GQ un magazine qui a "du gris". J'entends sans arrêt dire: il faut faire des textes courts. Mais la presse est précisément en train de crever à cause de cela! Les mensuels veulent faire du news, les news veulent faire du quotidien et les quotidiens sont dans l'immédiateté la plus totale! En ce qui me concerne, je dis aux équipes: «Faites des mensuels qui sont de vrais mensuels, des objets que l'on peut garder.» Réaliser des magazines qui ressemblent à Internet, c'est une aberration.
Vous comptez développer la marque GQ ?
X.R. Depuis le 15 février, GQ a quitté le giron du portail menstyle.fr pour un site à part entière, www.gqmagazine.fr. La marque est désormais assez forte pour exister seule: nous lancerons prochainement une application gratuite et allons développer des événements autour du titre. Nous avons également été approchés par des éditeurs qui souhaiteraient publier les guides que nous proposons en plus-produits à nos lecteurs.
Comment Condé Nast France résiste-t-il à la crise ?
X.R. Notre chiffre d'affaires, de l'ordre de 80 millions d'euros, a reculé de 15% par rapport à 2008, avec une diminution de 17% de la publicité (qui représente 25% du chiffre d'affaires global) mais une augmentation de la diffusion de 10%. Tous nos titres ont progressé en diffusion, avec une performance, celle de Vogue, dont les ventes en kiosques ont bondi de 11,8% en 2009. Ce mensuel a battu ses records historiques de diffusion depuis les années 1920 !