Après avoir publié une vidéo humoristique au sujet de Body Minute en octobre 2022, la créatrice de contenus Laurène Lévy a reçu une assignation en justice de la part de l’institut de beauté et fait l'objet de harcèlement. La réaction de l’enseigne est massivement critiquée sur les réseaux sociaux. Anatomie d'une «mauvaise» com'.
Elle s’appelle Laurène Lévy, mais Body Minute a décidé de la renommer « Laurène La Haine ». En octobre 2022, la créatrice de contenus raconte dans une vidéo parodique sur son compte TikTok, différentes mauvaises expériences qu’elle a vécues dans un institut de beauté de l’enseigne. « À l’époque, cette vidéo ne fait pas spécialement beaucoup de vues », explique Laurène Lévy dans une vidéo (voir également ci-dessous) qui revient sur l’affaire qui l’oppose, malgré elle, à Body Minute.
@laulevy POV : c’est pas un pov 😭 les body minute de Ledru Rollin et de Gare de Lyon be like 💀 #bodyminute #pov #humour #acting #estheticienne #passifagressif ♬ son original - Laurène ✨
L'histoire aurait pu s'arrêter là. Mais, plusieurs mois plus tard, le 21 février 2023, le PDG de Body Minute, Jean-Christophe David, envoie un email à son réseau d’esthéticiennes pour leur demander de signaler la vidéo de la créatrice et poster des commentaires pour dénoncer les propos « calomnieux et mensongers » de Laurène Lévy. C’est le début d’une longue vague de harcèlement pour la créatrice de contenus.
Le mail ici 👈 pic.twitter.com/smTMaj2Qxg
— Balance ton agency (@agency_ton) January 4, 2025
Insultes, menaces de mort, intimidation sur son lieu de travail… Le 21 février Body Minute envoie également un courrier recommandé à son employeur. L'enseigne reproche à ce dernier de ne pas contrôler les propos de sa salariée. Son employeur, une agence de publicité, est ainsi accusé d’avoir demandé à Laurène Lévy de créer cette vidéo pour calomnier Body Minute et favoriser, de ce fait, un éventuel client concurrent de l'enseigne - ce que la créatrice de contenu nie. Un deuxième recommandé suit quelques semaines plus tard et des huissiers sont également envoyés sur son lieu de travail pour fouiller les ordinateurs à la recherche d’une preuve de dénigrement pour le compte d’un concurrent. L’enseigne va jusqu’à mettre en demeure la créatrice de contenus, en octobre 2024, dans un courrier de 20 pages. En décembre, elle reçoit également une assignation en justice devant le tribunal de commerce pour dénigrement commercial.
Le 31 décembre, Body Minute publie sur son compte TikTok, une vidéo utilisant l’IA dans le but de dénigrer Laurène Lévy. La créatrice de contenus prend alors la parole le 2 janvier, en racontant l’acharnement qu’elle subit depuis deux ans.
@laulevy Le 31/12/2024, le compte TikTok @bodyminuteofficiel publiait une vidéo à mon sujet : voici ma réponse.
♬ son original - Laurène ✨
Pour l’influenceuse, la vidéo de Body Minute est « diffamante et comporte des propos mensongers. Je suis assez surprise de cette vidéo, car il semblerait qu’au contraire, c’est Body Minute qui demanderait à ses esthéticiennes de laisser des faux avis et des commentaires ». Dans sa vidéo, BodyMinute donne rendez-vous à Laurène Levy le 16 janvier devant la justice, alors qu’il s’agit en réalité du début des échanges entre les avocats des deux partis.
Effet Streisand
Ce n’est pas la première fois qu’une marque est critiquée sur les réseaux sociaux, mais la façon dont Body Minute y a répondu est loin d'être un exemple à suivre. « Nous sommes vraiment dans ce qui va devenir un cas d’école de comment faire un bad buzz sur les réseaux sociaux. En 2025, les consommateurs ont besoin d’une cohérence entre la communication interne et externe qui est un gage d’authenticité, et le fait que même d’anciens collaborateurs témoignent montre que nous en sommes loin », décrypte Anaïs Loubère, fondatrice de Digital Pipelettes et experte en stratégie numérique.
Alors que la tendance est plutôt à la recherche de conversation entre une marque et sa clientèle, Body Minute fait tout l’inverse en faisant abstraction des reproches qui lui sont faits. « C’est assez révélateur d’une génération et d’une communication datant des années 1990 qui viennent alimenter cette image de marque despotique et qui est à côté de la plaque côté réseaux sociaux. Et plus l’institut prend la parole, plus elle crée un fossé entre les franchisés et les clients. On est dans la parfaite illustration de l’effet Streisand : en voulant cacher cette vidéo qui aurait pu tomber dans l’oubli, on en fait une polémique démesurée en ajoutant de l’huile sur le feu », poursuit-elle. En réponse au TikTok initial, l’enseigne de beauté aurait pu éviter sa dégradation d’image en rebondissant différemment, en « utilisant du second degré, ce qui aurait pu redonner un capital sympathie à la marque et recréer du lien avec les internautes, ou en proposant un sujet coulisse pour s’infiltrer au sein des équipes par exemple ».
Ce qui est sûr, c’est que cette affaire laissera des traces dans l’image de marque de Body Minute, même si au cours des prochaines semaines elle se sera peut-être tassée. « La meilleure des choses, c’est de s’excuser. Les réseaux sociaux sont un amplificateur de ce qui se passe, et il semble que ce ne soit pas le premier ressenti d’expérience négative qui remonte », conclut Anaïs Loubère.
La créatrice de contenus Sindy a repartagé un témoignage datant de 2021 d’une cliente qui s’est fait brûler la peau post-séance d’épilation.
Déso je déterre un truc qui date ca parle de Body minute
— Sindy 🍉 (@SindyOfficiel) January 5, 2025
Mais attendez je vous poste leur réponse pcq c’est encore plus lunaire https://t.co/gXNJcBLrGI
En dessous de son tweet, la réponse de l’Institut de Beauté à ce moment-là :
— Sindy 🍉 (@SindyOfficiel) January 5, 2025
Body Minute a par la suite publié un communiqué sur son TikTok en assurant retirer leur vidéo et leurs poursuites, si la créatrice accepte de supprimer la sienne datant d’octobre 2022.
@bodyminuteofficiel Le bien-être est amour chez Bodyminute @laulevy #bodyminute #laurène #estheticienne #institutdebeauté #entrepreuse ♬ son original - Bodyminute officiel
Quelques jours plus tard, l'Institut de Beauté a rajouté une couche en postant un nouveau TikTok en écrivant « Le bad buzz existe-t-il vraiment ? », faisant référence à leur nombre de vues sur leurs précédentes vidéos contre Laurène Lévy. De quoi renforcer leur mauvaise gestion en termes de communication.
@bodyminuteofficiel 🚨Pendant les soldes le 3ème produit Skinminute Swiss🇨🇭Biotech sera offert à chaque internaute et TOUTE L’ANNÉE pour les abonnées ! Chez Bodyminute le bien-être est Amour 😍
♬ son original - Bodyminute officiel