Parce qu'ils sont désormais défavorablement notés au Nutri-Score, le géant agroalimentaire a annoncé qu'il ne l'afficherait plus sur ses yaourts à boire, une marche arrière «lamentable» selon le concepteur du logo.

C'était une des premières entreprises à adopter le Nutri-Score. Et pourtant, Danone, a annoncé mercredi 4 septembre qu'elle ne l'afficherait plus sur ses yaourts à boire, désormais défavorablement notés. « Nous avons décidé de retirer progressivement le Nutri-Score de nos produits laitiers et d'origine végétale à boire de nos marques à partir du mois de septembre 2024 », a indiqué le fabricant dans une déclaration à la presse. Cela concerne les versions liquides des marques Actimel, Danonino, Hi-Pro, Danone ou encore Activia, a précisé un porte-parole à l'AFP.

Avec un code couleur simple, allant du vert au rouge, et des lettres de A à E, le Nutri-Score oriente le consommateur vers les produits meilleurs pour la santé et pousse les industriels à améliorer leurs recettes. En attendant un étiquetage harmonisé et obligatoire au niveau européen, les entreprises l'affichent sur la base du volontariat dans sept pays (Allemagne, Belgique, Espagne, France, Luxembourg, Pays-Bas et Suisse). D'autres, comme en Italie, y sont farouchement opposés.

Danone revendique d'avoir été « pionnier en France », utilisant le Nutri-Score dès son lancement en 2017. « C'est un outil auquel on a beaucoup cru », assure le porte-parole du groupe. Mais la mise à jour du mode de calcul, décidée en 2023 par le comité scientifique du Nutri-Score, est contestée par Danone et d'autres industriels dont les produits deviennent moins bien notés.

Une décision qui fait réagir. « C'est lamentable, extrêmement choquant, de voir que Danone abandonne le Nutri-Score lorsque les règles du jeu établies par des scientifiques ne lui plaisent plus », a réagi auprès de l'AFP Serge Hercberg, professeur de nutrition à l'université Sorbonne Paris Nord et concepteur du Nutri-Score. Non-membre du comité scientifique, il défend le travail de ces experts qui « travaillent ni pour faire plaisir aux industriels ni pour les pénaliser de façon gratuite mais uniquement en fonction de l'intérêt de la santé publique ».

Une « boussole pour élaborer nos nouvelles recettes »

L'entreprise Ecotone, propriétaire du fabricant de biscuits et boissons végétale Bjorg, avait été épinglée fin 2023 par l'association UFC-Que Choisir pour avoir fait disparaître le Nutri-Score de ses emballages juste avant le déploiement du nouvel algorithme. Ecotone s'est défendu, dans une réaction transmise à l'AFP, d'afficher depuis avril 2023 un « Planet-score » pour « sensibiliser » les clients à l'impact environnemental des produits. Le Nutri-score reste une « boussole pour élaborer nos nouvelles recettes » et reste disponible en ligne, précise l'entreprise, qui affirme que la part de ses produits notés A, B ou C reste « dans les mêmes ordres de grandeur » avec la nouvelle méthode de calcul.

La décision de Danone concerne uniquement ses yaourts à boire. Ceux-ci sont désormais considérés comme des boissons plutôt que des aliments et donc notamment comparés à l'eau, qui seule peut être classée A. Suivent le lait écrémé et demi-écrémé (B), puis le lait entier (C). Avec la révision de l'algorithme, Actimel, promu par le groupe comme un produit santé, passe de A ou B à D. Le yaourt à boire pour enfants Danonino plonge aussi à D, « comme une boisson soda sucrée », déplore le porte-parole, remarquant que le yaourt Danonino consommé à la cuillère « reste en B » avec « des valeurs nutritionnelles similaires ».

Distinction pertinente

Même si la quantité de sucres est équivalente, la distinction entre yaourt solide et à boire est « pertinente » pour le professeur Hercberg : le second est surtout pris en dehors des repas, comme « snack liquide », au risque d'amener « à une consommation importante chez les enfants et adolescents ». « Cela permet d'alerter le consommateur sur le fait que ces produits doivent être consommés de façon raisonnable », estime Serge Hercberg.

L'UFC-Que-Choisir dénonce « l'argumentaire pseudo-nutritionnel de Danone » et estime que l'épisode apporte « une nouvelle preuve que l'affichage du Nutri-Score sur la base du volontariat ne permet pas d'assurer la bonne information des consommateurs ». L'association de consommateurs Foodwatch a qualifié d'« inadmissible » la « marche arrière » de la multinationale française. « Que Danone ne nous fasse plus croire qu'elle se préoccupe de la santé des consommateurs », a tancé Audrey Morice, chargée de campagnes de l'organisation, dans une réaction transmise à l'AFP.

L'abandon du Nutri-Score sur les yaourts à boire « ne change rien à notre cap » axé sur les « produits santé » et « l'amélioration de la composition de nos produits », assure le porte-parole de Danone.

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