Malgré un attentisme des clients observé par les professionnels de l’événement, le flou autour des contraintes imposées pendant les Jeux de Paris et leurs effets concrets sur l’activité, l’optimisme reste de mise du côté des lieux d’événements. Un article également disponible en version audio.
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À quelques mois d’accueillir le plus grand événement sportif de la planète, les professionnels de l’événementiel sont à l’ouvrage. Et pas seulement pour le Comité d’organisation de Paris 2024, qui mobilise depuis quelque temps bon nombre de ressources – techniques, matérielles, logistiques et créatives - du marché. Cet été, en attirant athlètes, supporteurs, médias et autres touristes du monde entier, la France devrait être « the place to be » pour toutes les marques et entreprises souhaitant s’associer, même de loin, à la dynamique des Jeux olympiques et paralympiques.
Même si, fidèles à la tradition française de self bashing, les médias se sont focalisés sur les risques de pénuries de main-d’œuvre, en matériels ou sur les risques de retards de chantiers, les retours du terrain sont plutôt optimistes. « Tout est prêt, tout est là, nous n’attendons plus que le "go", résume Alastair Currie, CEO de SLX, prestataire britannique chargé de l’éclairage des principaux sites des JO. Le comité d’organisation a recruté du personnel en France et ailleurs, tout comme il l’a fait pour le matériel. » Sur le sujet sensible de la sécurité, toujours en cours de règlement, beaucoup se rassurent en évoquant le cas des Jeux de Londres qui, confrontés à des problèmes de personnels, s’étaient finalement appuyés sur l’armée pour combler les manques.
Reprise de l'activité
Pour SLX, comme pour tous les acteurs engagés dans l’organisation des Jeux ou l’activation des partenaires de l’événement, le calendrier est plein et l’activité soutenue. Pour les autres, l’optimisme reste aussi de mise, sans pour autant verser dans l’euphorie. « La plupart des métiers ont retrouvé ou dépassé leur niveau d’avant covid, ce qui confirme la pertinence de l’événement et le besoin de rencontre physique, se félicite Philippe Pasquet, coprésident d’Unimev. La conjoncture actuelle se ressent mais elle n’empêche pas la reprise de l’activité. »
Indépendamment des JO, comme toutes les années paires, 2024 est chargée en grands événements (80 ans du débarquement, Mondial de l’automobile…). « Nous enregistrons également beaucoup de demandes d’entreprises pour les périodes de mai, juin et septembre, note Diane Domas de Crécy, présidente de Loc’Hall. La visibilité est meilleure, c’est peut-être là le seul effet JO. » Pour le reste, et à l’exception des prestataires engagés sur les Jeux, la situation est proche du business as usual. « Certains lieux magnifiques et bien placés ont encore des disponibilités. Et pas pour des raisons d’inflation des prix », insiste la patronne de Loc’Hall. Les principaux excès observés côté lieux concernent principalement les hôtels.
En faisant planer la menace de pénuries, ces Jeux ont eu la vertu d’obliger les entreprises à se projeter et à se positionner plus rapidement sur le calendrier événementiel. Résultat, le premier semestre est plutôt bien rempli pour les professionnels, même s’il n’affiche pas complet. « On sent encore un peu d’attentisme de la part des marques qui donnent l’impression qu’elles n’ont pas encore clairement défini ce qu’elles veulent faire, observe Olivier Girardot, directeur général et associé de Terres Rouges, qui scénographie les façades de plusieurs sièges sociaux pendant les Jeux. À leur décharge, toutes les règles n’ont pas encore été dévoilées, notamment sur les autorisations de communiquer autour des sites : on nous parle de 500 mètres autour des sites olympiques, mais à partir d’où pour la cérémonie d’ouverture prévue en plein Paris ou pour les épreuves se déroulant au Château de Versailles ou sur d’autres sites parisiens ? »
Questions sécuritaires
Sur la gestion des questions sécuritaires, le Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop) n’a pas encore clarifié les règles du jeu à l’heure où nous écrivons cet article. Seuls les partenaires officiels de l’événement, protégés par les clauses de non-concurrence aux abords des sites, peuvent afficher une relative sérénité. Les autres cherchent la parade. « Des marques partenaires des Jeux, mais aussi leurs concurrentes, qui n’ont pas accès au mobilier urbain, ont programmé des campagnes s’appuyant sur notre parc de véhicules - 20 000 taxis et VTC, 600 Flixbus, 200 Black Cabs…, annonce Hadrien de la Tour, président d’Adriver. Mais nous avons intégré à nos conditions générales de vente (CGV) les aléas liés au flou réglementaire et sensibilisé nos clients aux risques d’annulation. »
Le Cojop diffuse régulièrement des informations, des mises à jour des plans de circulation, des zones protégées, mais l’ensemble manque encore de précision. Delphine Bouclon, présidente de la Clé (collective des lieux événementiels), le confirme : « À l’exception de Sodexo ou Viparis, personne ne sait vraiment ce qui va se passer. La seule certitude est que l’accessibilité d’un grand nombre de lieux va devenir un sujet de préoccupation et de tension dès le mois de juin. Et l’appel fait aux Franciliens par la Mairie de Paris et un certain nombre d’entreprises à pratiquer le télétravail pendant cette période n’est pas un bon signal. Ni pour les professionnels, ni pour nos clients, qui peuvent être tentés de ne rien programmer en juin. »
Mais l’attentisme n’est-il pas courant dans le secteur ? Selon Philippe Pasquet, « les process de décision sont longs et compliqués dans nos métiers. Il y a beaucoup de contraintes à respecter. » S’il concède que le mois de juin pourrait être un peu plus calme que d’habitude pour la région parisienne, son pronostic reste optimiste. Ne serait-ce parce que les mois de juillet et août sont des périodes traditionnellement creuses pour les professionnels, à l’exception des organisateurs de festivals. « L’impact restera limité dans l’espace et dans le temps, prédit Philippe Pasquet. Pour nos métiers, ces Jeux restent une opportunité en termes de business, d’image et de démonstration de nos savoirs. Ils sont également l’occasion de développer de nouvelles compétences. » Pour lui, le sujet d’inquiétude est ailleurs : « Notre préoccupation devrait plutôt être de trouver le moyen d’attirer ou de maintenir au sein de nos structures tous ces gens qui se sont formés et professionnalisés à l’occasion des JO. »