En s’attaquant au sujet ô combien sensible de la consommation de contenus pornographiques par les jeunes, la Région Île-de-France et Publicis Consultants remportent le Grand Prix Stratégies de la communication d’engagement.
En 2022, l’Île-de-France choisit de s’engager sur un sujet de société majeur : l’exposition des plus jeunes aux contenus pornographiques et ses risques. Pour avoir des informations concrètes, elle conduit avec Opinionway une étude sur la question et le constat est alarmant : un âge moyen de première exposition à la pornographie de 10 ans, une consommation qui a explosé pendant la crise sanitaire et surtout une image biaisée de la sexualité qui a des effets destructeurs à une période où les jeunes se construisent de ce point de vue. « Dans l’étude, on a tout de suite constaté que ce qui manquait, c’était le dialogue, raconte Perrine Danmanville, directrice de la communication de la Région Île-de-France. C’est un peu ce que ressentent les jeunes : ils se rendent bien compte que la consommation de contenus pornographiques a des effets dévastateurs mais au fond, ils ne savent pas en parler, la sexualité reste un sujet tabou et les parents sont eux aussi désarmés. La question du dialogue, c’était une nécessité absolue. »
Un ton positif
La Région se rapproche donc de Publicis Consultants, son agence depuis 2017. Suit une importante phase de réflexion et d’échanges avec l’institution et ses partenaires – le think tank VersLeHaut, Île-de-France Prévention Santé Sida, l’association e-Enfance et le centre Hubertine Auclert – afin de construire une campagne pour sensibiliser au fait que la pornographie ne doit pas être considérée comme une référence pour la sexualité.
Son déploiement commence en 2022 avec le lancement de la marque blanche – totalement décorrélée de l’institution – « Pas la réf » autour d’un compte Instagram dédié au ton positif et aux couleurs flashy. « Le claim “Pas la réf” montrait aux jeunes qu’on était dans leurs codes et que l’on s’adressait directement à eux, explique Laurent Glépin, vice-président de Publicis Consultants. Nous avions trois niveaux de cible : d’abord, les enfants de plus de 10 ans, ensuite par capillarité les parents, et enfin en étendant le spectre, toutes les parties prenantes de la Région (élus, associations, institutions…). » À partir de là s’engage une communication à 360, avec notamment une campagne d’affichage dans 431 lycées d’Île-de-France.
Filmer l’envers du décor
L’année suivante, la Région et Publicis Consultants vont plus loin dans la campagne, d’abord avec un partenariat avec Konbini sur des micros-trottoirs de l’influenceur Victor Habchy et des vidéos d’Anissa Maille (6nissa), puis en s’associant au youtubeur Théodort dans une vidéo de 22 minutes intitulée « J’ai joué dans un porno ». « À partir du moment où il n’y a pas de moyens techniques pour empêcher les jeunes d’être exposés aux contenus pornographiques, il fallait déconstruire ce qu’ils voient, poursuit Laurent Glépin. L’idée était donc de filmer les coulisses de la pornographie pour montrer qu’en réalité tout ça, c’est du fake, que ça répond à des règles de cinéma, avec des orgasmes simulés, des corps retouchés, des bruitages en postproduction… »
Et la campagne atteint ses objectifs, avec des chiffres qui parlent d’eux-mêmes : la page Instagram, qui compte aujourd’hui plus de 5 000 abonnés, a généré près de 124 000 interactions ; les vidéos sur Konbini ont comptabilisé 3,3 millions de vues ; celle de Théodort avait été vue plus de 1,1 million de fois un mois après sa sortie. Et surtout, l’ensemble des commentaires sur le dispositif ont été très positifs.
Côté Publicis Consultants, l’expérience est elle aussi très positive : « D’un point de vue communication, cette campagne est très intéressante, Car elle ressemble vraiment à une communication d’engagement comme on peut l’imaginer en 2024, commente le vice-président de l’agence. Elle est à 360 et tout l’éventail de l’expertise communication a été mis à contribution, du planning stratégique à la création, en passant par la production et les relations presse, ce qui nous a permis d’utiliser différents leviers pour viser différentes cibles avec des messages appropriés pour chacune d’elles. C’est rare dans la vie d’une agence d’avoir des campagnes d’influence aussi ambitieuses. »
« Encercler le sujet et traiter toutes les cibles »
Perrine Danmanville, directrice de la communication de la Région Île-de-France
« Avoir une communication à 360, puis travailler avec Théodort et avec Konbini a permis d’encercler le sujet et de traiter toutes les cibles. Mais cette campagne n’est pas un one shot : la page Instagram a cet intérêt qu’elle peut être nourrie de façon régulière et jouer son rôle, en étant une base de dialogue, elle a donc vocation à rester active, elle prend la lumière dès qu’on active une opération de communication. »