Arrivé en France fin 2023, la marque de donuts américaine Krispy Kreme entend s’y développer rapidement et y faire grandir sa notoriété, accompagnée par l’agence Buzzman.

Au cas où les fêtes n’auraient pas été assez riches en douceurs sucrées, voici l’occasion de se rattraper (ou pas). Krispy Kreme, marque de donuts d’origine américaine, présente dans près de quarante pays dans le monde mais jusqu’alors peu ou pas connue en France, a posé ses valises dans l’Hexagone le 6 décembre, en ouvrant un point de vente au Forum des Halles, au cœur de Paris. Les locaux n’auront sans doute pas échappé à la campagne d’affichage sauvage signée Buzzman qui a accompagné cette ouverture (« Macaron démission ! », clamait l’une de ces affiches) ni à la polémique qui s’est ensuivie sur les frais de nettoyage, nourrie sur X par plusieurs élus de Paris. Ils auront peut-être aussi croisé des files d’attente interminables dans les rues de certains quartiers de la capitale quand la marque, afin de créer l’événement, avait lancé une opération 100 000 donuts offerts. Une arrivée bien soignée, donc, mais au budget communication gardé confidentiel. « Westfield [gestionnaire du centre commercial des Halles] nous a dit que c’était la plus belle ouverture depuis cinq ans en termes de notoriété », assure la marque, qui le jour J, a dû gérer quelque 400 personnes dont certaines avaient campé devant chez elle dès la veille au soir. Il faut dire que le défi est de taille : installer non seulement une nouvelle marque mais aussi un nouveau produit et de nouvelles habitudes de consommation (qui pour un donut au petit-déjeuner ?), dans un marché à potentiel mais en construction. « On essaiera de prendre notre part d’estomac », lançait Alexandre Maizoué, son directeur général France, devant des médias, à J-2 de l’ouverture.

Donuts, Netflix and chill

« Nous ne sommes pas des vendeurs de donuts : nous sommes venus donner un goût de pop culture américaine », affirmait-il au même moment. La pop culture américaine mais aussi la joie, le partage, le plaisir, la gourmandise, voilà les valeurs qu’elle revendique. « En achetant une boîte pour ses collègues, on devient le office hero [le héros du bureau] ou bien une super maman, un super papa en ramenant une boîte à partager devant Netflix ou un match de foot », aime à répéter le DG France. Le tout, semble-t-il, teinté d’une pointe de nostalgie pour « le goût des beignets dégustés à la plage dans l’enfance ». Quant au magasin, établi sur 550 m2, il tient moins de l’enseigne de fast-food que du concept store, avec espace vitré où voir les donuts en train d’être fabriqués, dorés à la machine, et espace merchandising où acquérir des goodies (mugs, t-shirts, sweats, casquettes…) marqués du logo vintage de la marque. Une petite quarantaine de places assises, avec banquettes et mobilier inspiré des bistrots parisiens, complète le tout. À l’extérieur, une enseigne « Hot now » s’allume en rouge quand une cuisson se termine, invitant les passants à venir déguster un donut chaud. Un parfait lieu « d’expérience », donc, comme disent les experts en marketing. « On se considère plus comme une marque de retail que de food service », appuie Alexandre Maizoué. Autre composante de la marque : son côté « glocal », en bon français. Par exemple, tout en commercialisant les recettes originales, elle va aussi décliner certains produits selon le goût local (davantage de fruits…).

Cette approche, ces valeurs, voilà donc ce qu’il faut « vendre » en communication. Et cela, c’est le travail de Buzzman, officiellement retenue à la fin de l’été dernier après un appel d’offres l’ayant opposé à quatre autres agences. « Le brief était assez ouvert : il s’agissait de rappeler les valeurs de la marque, de trouver un moyen de faire la différence, même sans forte notoriété, de traduire tout cela sur le marché français, expose Alexandre Maizoué. L’objectif est d’être une love brand ». Le tout en partant de pratiquement rien en termes de « notoriété spontanée » mais en s’appuyant sur « d’excellents sous-jacents portés par ceux qui ont voyagé (États-Unis…) ou regardé Netflix ». Donut fétiche d’Homer Simpson, Krispy Kreme est visible aussi dans des séries comme Sex and the City.

Tacler les icônes

« La difficulté était de donner ce côté américain tout en disant qu’on allait se mouvoir dans des habits avec une touche française. Il fallait éviter le côté "Les Américains débarquent" et plutôt jouer la connivence », détaille Georges Mohammed-Chérif, président et directeur de la création de Buzzman. D’où une série de visuels à la tonalité humoristique mélangeant le produit, des références culturelles tricolores et des clins d’œil au patrimoine boulanger français (« Le meilleur croissant de Paris », « Pain au chocolat ou chocolatine ? Fin du débat », « Ça aurait été plus logique d’ouvrir à Trouville »…). Car, autre problème : imposer le donut au pays du croissant. « On se sert d’icônes de la culture française pour faire des petits tacles mais avec tendresse », décrit Georges Mohammed-Chérif. Ce parti pris visait l’efficacité, le temps ayant manqué pour élaborer et installer une plateforme de marque. Autres avantages collatéraux : le dispositif est immédiatement parlant (« le donut est un produit d’impulsion, il ne fallait pas trop d’intellectuel », déclare le patron d’agence) et intemporel, potentiellement déclinable dans le temps. Avec succès, donc, si l’on en croit les files d’attente et les résultats des premières semaines de fréquentation.

2024 commence a priori sous de bons auspices pour la marque et son agence, qui ont signé pour un an avec la volonté de s’inscrire dans la durée. L’idée, en communication, sera notamment d’accompagner les développements à venir de l’entreprise, qui vise dans les cinq ans 500 points d’accès (plus petits points de vente, kiosques dans les gares, pieds d’immeuble, présence en grande distribution…). En parallèle, elle prévoit de lancer un service de livraison en février et devrait au printemps ouvrir un nouvel espace de production à Créteil (Val-de-Marne) pour pouvoir servir l’est parisien. D’autres activations suivront au fil de l’année, y compris autour des incontournables JO de Paris 2024 - dont la marque n’est pas partenaire officiel. Le tout, indépendamment des campagnes menées aux États-Unis et ailleurs, l’agence VML accompagnant Krispy Kreme au niveau global.

Chiffres clés

23 500 Nombre de salariés de Krispy Kreme dans le monde au 1er janvier 2023 (une centaine recrutés en France pour le lancement).

1,5 milliard de dollars Chiffre d’affaires 2022 au global.

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