En presque vingt ans d’existence, la marque de haute joaillerie Messika a contribué à dépoussiérer l’image d’un diamant vieillissant pour le rendre plus glamour, grâce notamment à un accès privilégié aux VIP.

Carla Bruni, Kate Moss, Cher ou encore Kendall Jenner… Qu’ont toutes ces femmes en commun ? Elles ont toutes porté un bijou signé Messika. Si aujourd’hui la marque de bijoux en diamant est devenue la chouchoute des stars, le hasard a bien fait les choses. Du moins au début. Beyoncé a été la première à la repérer. En 2014, elle poste sur Instagram une photo d’elle portant une bague à double phalange – offerte par la maison – entraînant désir et demande. « En tant que créatrice, c’est un rêve de voir des femmes aussi puissantes et prescriptrices porter mes bijoux. D’ailleurs, tu as vu Selena Gomez ce matin ? », interroge Valérie Messika en se tournant vers sa directrice communication Caroline Ripoche. Rapport aux boucles d’oreilles Messika portées par Selena Gomez à la soirée de lancement de son fond Rare Impact. « Non mais Naomi Campbell et Selena Gomez la même semaine, c’est exceptionnel ! », répondra l’intéressée.

Avant de pouvoir dérouler le tapis rouge aux VIP, Valérie Messika s’est lancée sur le marché de la haute joaillerie en 2005, à tout juste 30 ans. Une secousse dans un milieu cristallisé par des marques patrimoniales, pour la plupart centenaires. Mais cette audace ne vient pas de nulle part, en effet, elle est la fille d’André Messika, célèbre diamantaire parisien, qui lui a transmis cette passion des pierres précieuses. « J’ai toujours eu facilement accès au diamant, je jouais avec quand j’étais petite. J’avais envie de reproduire cette spontanéité et cette liberté que j’ai eues durant mon enfance au sein de ma marque », témoigne la fondatrice. Presque vingt ans après sa création, on peut dire que la maison a su renouveler les codes de l’industrie et a permis de libérer le diamant de certains diktats. « Il fut un temps où cette pierre précieuse était synonyme de mariage, de pouvoir et de richesse, mais ça, c’était avant. Nous voulons montrer le diamant comme un atout de style, de force, d’expression de sa personnalité, que ce soit pour une femme ou un homme. » C’est donc logiquement que Messika a organisé son tout premier défilé pendant la Fashion Week de Paris printemps-été 2024, son troisième depuis sa création. Pour célébrer les dix ans de la collection de haute joaillerie « Midnight Sun », Carla Bruni a ouvert le bal des parures rue Cambon. « J’ai voulu lancer ma marque un peu comme une maison de mode en me mettant en porte-à-faux toutes les maisons centenaires de la joaillerie. Même si j’ai beaucoup de respect pour elles, j’avais la volonté de désacraliser le diamant pour quelque chose de plus mode, contemporain et accessible. » Une accessibilité qui a un coût, puisque la marque propose une gamme de prix allant de 800 à 5 000 euros, sans compter la haute joaillerie.

Avec un diplôme du Celsa, un passage en agence de pub – Euro RSCG (absorbé par Havas) – puis chez l’annonceur (Fred et Chanel), Valérie Messika a su capitaliser sur ses expériences pour installer sa marque dans un territoire bien gardé : « Aujourd’hui, ce qui m’importe, ce n’est pas seulement de créer des bijoux mais également les univers autour. La pub, c’est vraiment mon dada, et même si je n’oublie pas de remercier le print, je me tourne davantage vers le digital par pure stratégie. J’aime que mes campagnes soient comme mes bijoux, disruptives. » Cette stratégie digitale est principalement visible sur les réseaux sociaux au travers notamment de collaborations avec des influenceuses, majoritairement suivies par la jeune génération. « Je n’ai pas décidé de cibler les jeunes, ce sont eux qui sont venus à Messika. Quand je me suis lancée sur le marché, j’étais jeune, j’avais une certaine liberté dans mes créations et ce côté non ostentatoire est resté dans l’ADN de la marque. On vend à toutes les générations de femmes mais il y a un certain jeunisme dans la maison qui les a attirés, et effectivement quand on s’est rendu compte de ce trésor, on a surfé dessus. Nous avons eu la chance folle de faire une collaboration, entre autres, avec la mannequin Gigi Hadid qui a super bien marché. Elle est venue ancrer ce positionnement et a participé à notre différence », avoue Valérie Messika. Son compte Instagram personnel regorge d’ailleurs de photos avec des célébrités plébiscitées par la Gen Z, à l’instar de la chanteuse Cardi B ou la célèbre mannequin Kardashian, Kendall Jenner.

Un flagship rue de la Paix

Pour autant, les ventes sur le digital ne représentent que 5% du chiffre d’affaires. Le gros se passe en physique, en témoignent les 600 points de ventes dont 75 boutiques en propre étalées dans 85 pays. « Nous sommes allés en Asie pendant le covid mais comparativement à nos confrères, ça reste un marché encore anecdotique, il représente moins de 10% alors que les joailliers y enregistrent quasiment 50% de leur chiffre d’affaires. Notre marché principal reste l’Europe. » Dix ouvertures y sont d’ailleurs prévues d’ici 2025, la plus récente datant de juillet 2023 à Paris. En effet, la marque a rejoint le club très fermé des maisons de haute joaillerie rue de la Paix et se rapproche de la mythique place Vendôme, en ouvrant un flagship conçu comme un coffre-fort. 

Si en 2020, la maison affichait un chiffre d’affaires de 115 millions d’euros, malgré un recul des ventes de bijoux en diamant de 15% à cause de la pandémie, elle espérait atteindre les 150 millions d’euros en 2022-2023. Messika n’a pas souhaité corroborer cet objectif mais affirme que depuis 2019, son chiffre d’affaires global a été multiplié par 2,5 et que sa croissance atteint 10% chaque année en France. Si le covid est resté clément pour l’industrie du luxe, en termes de business, l’inflation n’aura peut-être pas le même impact. « Forcément, à cause de cette inflation, nous nous dirigeons vers des mois un peu moins euphoriques que ce que l’on a connu post-covid. Pour l’instant, nous affichons de très beaux taux de croissance, je reste optimiste car malgré tout l’écosystème du luxe se porte bien et la joaillerie se porte encore mieux », espère la fondatrice. Toujours dans cette optique de casser les codes, la marque a lancé le 10 octobre une collaboration avec la maison de beauté Estée Lauder. Dans deux ans, Messika franchira le cap des 20 ans, un âge charnière pour une marque, à supposer qu’elle ait encore besoin de prouver sa légitimité sur le marché.

Chiffres clés

150 millions d’euros. Chiffre d'affaires prévisionnel 2022-2023 (115 millions d’euros en 2020). 

+ 10%. Croissance annuelle depuis 2019.

×2,5. Évolution du chiffre d'affaires global depuis 2019.

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