Contrats déséquilibrés, prix de gros trop élevés… Carrefour est accusé dans un livre de mauvais traitements vis-à-vis des responsables de ses magasins exploités en franchise, ce qu’il conteste en mettant en avant le nombre élevé de candidats à ce type d’exploitation.
Les franchisés sont-ils les « vaches à lait » du distributeur Carrefour ? C’est ce qu’affirme dans « Carrefour, la grande arnaque » (Éditions du Rocher), qui paraît ce 13 septembre, Jérôme Coulombel, ancien directeur juridique du département contentieux qui a quitté le groupe en 2017 après un burn-out.
En France, les magasins exploités par Carrefour en franchise ou en location-gérance (une variante dans laquelle le groupe reste propriétaire du fonds de commerce) sont très majoritaires : sur un peu moins de 6 000 magasins Carrefour à fin 2022, seuls 565 (166 hypermarchés, 255 supermarchés, 144 magasins de proximité) sont détenus et exploités par le groupe.
Jérôme Coulombel accuse notamment le distributeur de pénaliser les patrons de magasins exploités en franchise par des prix de gros trop élevés ainsi que par des conditions contractuelles qui seraient trop déséquilibrées.
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Dans son livre, il cite plusieurs témoignages d’anciens franchisés ayant changé d’enseigne, selon lesquels certains prix de gros et prestations externes (commissaire aux comptes ou technicien de maintenance agréé par Carrefour par exemple), sont sensiblement moins élevés chez d’autres enseignes. Deux d’entre eux l’ont également affirmé à l’AFP.
Conséquence de tels prix d’achat élevés auprès de la centrale et de prestations de services moins avantageuses que pour la concurrence, ces commerçants franchisés ont eu plus de difficulté à atteindre la rentabilité sous enseigne Carrefour, assure Jérôme Coulombel. Sauf à augmenter les prix de vente, avec le risque de faire fuir des clients en période de forte inflation.
Quant à la relation contractuelle, elle serait notamment déséquilibrée quand Carrefour est propriétaire d’une partie du capital de la société du franchisé, un cas de figure assez fréquent, relève Jérôme Coulombel. Dans un tel cas, Carrefour détient une part minoritaire mais suffisante pour bloquer un changement d’enseigne, voire pour récupérer le magasin en cas de départ du franchisé, poursuit-il.
Nombre élevé de magasins franchisés
Sollicité par l’AFP deux jours avant la parution du livre, Carrefour a répondu qu’il est « signé par un ancien collaborateur qui a quitté le groupe il y a six ans et dont l’activité professionnelle consiste, depuis son départ, à conseiller des franchisés pour qu’ils rallient des groupes concurrents ».
En outre, défend Carrefour, « l’argumentaire de l’auteur est contredit par l’attractivité d’une franchise qui fait bénéficier des milliers de partenaires de sa croissance », dénombrant « pas moins de 250 nouveaux partenaires qui rejoignent chaque année le groupe pour créer ou reprendre un magasin en franchise ».
La relation de Carrefour avec ses franchisés « n’a jamais été affectée par les arguments de l’auteur ni par les rares cas de contentieux qui sont cités en exemple et qui témoignent de désaccords ponctuels », représentant selon l’enseigne « moins de 1 % de nos contrats de franchise ».
Jérôme Coulombel affirme dans son livre « soutenir plus de six cents » franchisés. Ciblé par une plainte pour vol, chantage et tentative d’extorsion émanant de Carrefour, il a été relaxé de ces chefs par le tribunal correctionnel de Caen en janvier dernier.
Les enseignes de supermarchés, notamment Carrefour, s’appuient de plus en plus sur le modèle de la franchise, qui leur permet de garder leur surface commerciale et donc leur niveau de chiffre d’affaires tout en externalisant un certain nombre de dépenses, à commencer par les salaires ou les investissements dans les magasins.