Adeline Challon-Kemoun a débuté chez Image 7, a traversé des turbulences sociales chez Air France, et dirige depuis cinq ans la communication de Michelin, un groupe qui innove au-delà du pneu, dans la mobilité durable, la santé et l’espace.
Retrouvez l'interview vidéo d'Adeline Challon-Kemoun.
L’innovation est au cœur de l’histoire de Michelin. Quel sens a ce mot aujourd’hui ?
Avec plus de 6 000 chercheurs répartis sur neuf sites dans le monde entier, l’innovation est le cœur de l’ADN de Michelin. Depuis sa création, Michelin défend l’idée que la technologie doit améliorer la vie des gens et leur environnement. Un exemple : lors du dernier salon du Bourget, nous avons présenté le pneu Air X Sky Light, qui contribue à réduire l’empreinte carbone des avions grâce à un gain en poids embarqué de 10% à 20%. Pour un A350, c’est 250 kg en moins sur le train principal.
Mais nos savoir-faire dans le domaine des matériaux et nos 12 000 brevets actifs s’expriment bien au-delà du pneu. En tant que spécialistes des polymères, nous sommes notamment présents dans le secteur de la santé avec des matériaux biocompatibles pour les implants. Nous fabriquons aussi des joints critiques pour les pipelines sous-marins qui doivent être à la fois rigides et flexibles – exactement comme les pneus sur la route.
Cette expertise n’est pas forcément connue. Comment la médiatiser ?
D’abord, nous avons remis l’innovation au cœur de la promesse de la marque Michelin, puis nous avons remis la marque au cœur de la vie des gens à travers une campagne mondiale lancée en 2020. En 2024, nous produirons la saison 2 dans laquelle nous surprendrons avec notre concept de voile gonflable qui contribue à la décarbonation du transport maritime ou encore notre colle biosourcée et non toxique pour des applications textiles et bois.
Nous avons aussi surmonté notre culture de la confidentialité pour ouvrir nos usines aux médias. C’est important de montrer qu’une économie forte a besoin d’usines qui investissent dans la technologie, l’intelligence artificielle, les conditions de travail, la réduction de l’empreinte carbone.
Et en communication interne, on a fait des choses assez audacieuses, comme co-construire notre Rêve d’entreprise avec les 130 000 collaborateurs du groupe : grâce à ses innovations critiques, Michelin aura, en 2050, contribué à relever certains des lourds défis que rencontre le monde sur le plan sociétal et environnemental.
En quoi votre parcours vous a-t-il permis de développer une culture de l’innovation ?
L’innovation, ce ne sont pas seulement les brevets, c’est tout ce qui permet de changer la donne. Chez Image 7, j’ai appris la liberté et le courage de dire, sans lesquels il n’y a pas d’innovation. Dans les entreprises de service dans lesquelles j’ai travaillé, j’ai appris à écouter le client et contribué à le réconcilier avec le citoyen. Quand on installe une promesse comme « Nourrir un monde de diversité » chez Casino, ou « France is in the air » chez Air France, on souligne à la fois le saut de qualité d’expérience et l’attachement à des valeurs. La marque n’a pas à choisir entre la promesse d’utilité et la responsabilité : il faut les deux.
Chez Michelin, j’ai compris que la transformation durable du monde passerait par l’industrie, ou n’aurait pas lieu. C’est elle qui fait la différence entre une trouvaille sympathique et une innovation qui change la donne. Pour moi, une communication innovante, c’est celle qui (re)donne foi en l’avenir et qui revendique l’invention pour qu’elle existe aux yeux du plus grand nombre.