Dassault Systèmes, Capgemini et Bloom ont publié la première édition du Baromètre des réseaux sociaux pour l’action climatique. La sur-communication positive des marques entre en dissonance avec les experts, et décourage les citoyens à l’action.
Pourquoi, malgré des signes de plus en plus évidents du dérèglement climatique, les actions ne semblent pas à la hauteur des enjeux. Si ce n’est pas le débat que l’on a vu aux Cannes Lions, ni à Vivatech, c’est ce qu’ont tenté de comprendre Dassault Systèmes, Capgemini et Bloom avec la première édition du Baromètre des réseaux sociaux pour l’action climatique. Concrètement, l’outil d’intelligence artificielle et d’analyse des réseaux sociaux, Bloom, a analysé les contenus postés en anglais par les individus et organisations sur cinq réseaux sociaux (Twitter, Facebook, Instagram, YouTube, TikTok) entre février et octobre 2022. Au total : 330 millions d’acteurs, et 14 millions de commentaires, contenus ou posts, pour 480 millions d’engagements.
Le climatoscepticisme, bien qu’encore très marqué aux États-Unis, semble « marginal », et la population s’interroge surtout sur la meilleure façon de faire face au problème, concrètement. Mais il existe plusieurs freins exprimés sur l’émotion des plateformes.
En premier lieu, les trois entreprises notent « l’optimisme déconnecté, voire opportuniste, des entreprises et des institutions sur leurs progrès environnementaux. » Ce qui ressort des analyses, c’est que la sur-communication positive entre en contradiction avec les analyses des experts du climat. « Cette dissonance génère défiance et décourage à l’action », assure le trio d’analyste, qui va jusqu’à tacler les techno-solutionnistes. « L’« optimisme déconnecté » concerne aussi ceux qui pensent que la technologie est la solution à l’urgence climatique au point qu’il n’est pas nécessaire d’agir », indique la synthèse de l’étude.
Deuxième constat : le manque d’information fiable. Face à la multiplication des informations contradictoires, et la désinformation, les citoyens se trouvent désarmés. Ce qui provoque « défiance et un sentiment d’impuissance ». L’étude note un accroissement du nombre de publications et du taux d’engagement sur cet aspect, « marqué par de fortes émotions négatives », indique le rapport.
Ensuite, CapGemini et Dassault Systèmes ont relevé l’apparition d’une nouvelle donnée dans les craintes des analyses : l’enjeu économique et les conséquences sociales. « Dans une année 2022 marquée par l’inflation, l’enjeu du coût de la vie s’invite davantage dans le débat sur les changements drastiques de modes de vie nécessaires pour limiter le réchauffement à 1,5°C (énergie, transport, alimentation etc.), indique les auteurs de l’étude. Les citoyens sont notamment très soucieux que les populations les plus fragiles n’en soient pas les premières victimes. » Un point qui est corroboré par le baromètre Odoxa de La Fondation pour la Nature et l’Homme, qui indique que 71 % des Français ressentent le changement climatique dans leur quotidien, mais que 52 % citent comme frein principal le fait de ne pas avoir les moyens financiers de lutter contre, et sont en grande partie favorable à l’instauration d’un système de bonus-malus pour avancer.
Autre fait important que relève la giga analyse de Bloom, la fin de l’effet « colibri », où les actions individuelles ont un impact. Chacun délègue son autorité, et considère que l’action climatique relève des autres. Ainsi « les entreprises sont vues comme les premières à pouvoir agir durablement et efficacement, devant l’action individuelle, et loin devant les États. » Les citoyens considèrent qu’elles sont plus efficaces que les gouvernements en termes d’échelles de leurs actions, et de rapidité. C’est en ceci, qu’elles sont perçues comme responsable d’une partie du problème.
Enfin, et ce n’est pas le moindre, l’étude relève un accroissement du désespoir face au changement climatique, et donc une inaction de résignation. Ce désespoir, est « celui qui provoque le plus fort engagement et la plus importante proportion d’émotions négatives parmi tous les freins étudiés». Alors comment garder espoir sans devenir trop positif... Place au cynisme ?