En 25 ans, 64 s’est imposée comme une référence des marques à fort ancrage régional… et familial. Créée par Denis Wargnier en 1997, l’entreprise est aujourd’hui dirigée par Louis Lacube, ancien directeur marketing de la marque et gendre du fondateur. Il revient sur l’ascension de 64 dont la notoriété a largement dépassé les frontières des Pyrénées-Atlantiques.
Comment définiriez-vous la marque 64 aujourd’hui ?
64 est très atypique. D’abord, parce que nous sommes une marque familiale, et qu’elle a été la première, dans le textile, à se lancer en misant sur ce côté identitaire. Ce qui, en 1997, suscitait plutôt le scepticisme. Les années nous ont donné raison quand on voit aujourd’hui l’attrait pour tout ce qui est produit, fait ou entrepris localement. Une autre spécificité est d’avoir choisi de prendre pour nom le numéro d’un département.
Les fondateurs avaient identifié le potentiel de développement d’une marque textile identitaire régionale déclinée partout sur le territoire, avec laquelle il y a matière à raconter une histoire. C’est la raison pour laquelle 64 a déposé tous les numéros de départements comme nom de marque, à l’exception de ceux qui l’étaient déjà. Derrière cette initiative, il y avait donc l’idée de protéger et développer notre marque en dehors des Pyrénées-Atlantiques, mais aussi d’éviter que tout le monde nous copie dans toutes les régions.
Votre positionnement a-t-il évolué depuis 1997 ?
Il évolue, car nous sommes sur un secteur, la mode, qui l’impose. Quand la marque s’est lancée, elle a très vite été adoptée par les locaux. C’était une fierté de la porter. Mais étant liée à une région très prisée pour les vacances, elle est aussi rapidement devenue très appréciée des touristes. Au point de provoquer une forme de rejet auprès de notre clientèle locale qui voyait en 64… une marque à touristes. Pour ne pas finir cataloguée parmi les marques et produits souvenir, nous avons dû nous remettre en question. Nos produits sont aujourd’hui moins marqués. Les références à notre région sont toujours présentes, mais de façon beaucoup plus subtile, plus travaillée.
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L’ancrage régional explique-t-il à lui seul le succès de la marque ?
Le succès résulte d’une combinaison de facteurs. Au-delà de ceux déjà évoqués, j’ajouterais le fait que 64 est une marque qui propose une collection Homme, Femme, Enfant, Bébé, et Accessoires… peu le font. Dès le début, nous avons également fait le choix d’être distribué exclusivement dans notre réseau. Quel que soit le canal - boutiques ou site internet - nos produits affichent le même prix.
Maîtriser son réseau nous permet de laisser le temps nécessaire à un nouveau produit pour trouver sa place, d’oser des collections qui nous sortent de notre zone de confort. C’est d’ailleurs pour préserver cette liberté que nous ne nous sommes implantés que dans notre région. Nos dix boutiques se situent entre Hendaye et Arcachon, près de l’océan. La plupart de nos vendeurs connaissent le nom de leurs clients, 80 % de notre chiffre d’affaires est réalisé en boutique, 20 % sur le net, dont 60 % par la clientèle aquitaine.
Côté fabrication, 64 fait-elle aussi dans le local ?
Nous avons une équipe en interne de trois graphistes, une styliste et une acheteuse qui sont là toute l’année et conçoivent toutes nos collections. Tout est pensé, conçu à Guéthary dans nos locaux. Nous choisissons nos coupes, nos matières, nos couleurs… Nous n’utilisons pas de textile en marque blanche. Aujourd’hui, 98 % de nos produits sont fabriqués au Portugal et en Turquie. Les 2 % restants sont des produits très spécifiques (matériaux recyclés) fabriqués en Inde. Enfin, 40 % de nos produits sont éco-conçus et nous allons monter en puissance sur ce point. Nous travaillons depuis 25 ans avec les mêmes fournisseurs, plus quelques nouveaux en fonction des produits et de leur spécificité technique.
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Comment communique la marque ?
Notre principal média depuis 25 ans est l’autocollant ! Tous nos clients repartent avec un sticker qu’ils collent sur leur voiture, leur scooter, leur planche de surf, etc. Nous en fabriquons chaque année plus de 2 millions que nous traitons comme nos autres produits, avec une collection automne-hiver et printemps-été. C’est un élément fort et marquant de notre communication.
Parallèlement, nous assurons notre présence locale et régionale en équipant en textile les personnels de nombreux restaurants, bars et hôtels parce qu’ils sont des lieux de convivialité, en phase avec 64. Pour les mêmes raisons, nous équipons les clubs et associations sportives locales. Nous avons un programme d’ambassadeurs dans nos sports (rugby, surf, tennis, golf) que nous soutenons par de la dotation de produits. En revanche, nous refusons d’investir les grands clubs, le sport professionnel et ses stars. Ce n’est pas dans l’état d’esprit de la marque. Ni de la région.
La communication nationale est portée par notre site internet. Nous mettons également beaucoup de moyens sur le digital et les réseaux sociaux. Nous travaillons avec des influenceurs locaux dans le cadre de collaborations pour développer des collections, des produits, mais ça reste assez éphémère. Faire une campagne publicitaire ne nous apporterait rien de plus.
Vous avez également développé des partenariats dans d’autres univers. Que vous apportent-ils ?
Il s’agit d’animer la marque, de monter qu’elle innove, qu’elle est toujours là, en mouvement, et qu’on ne lâche pas. Nous développons ces collaborations sur des thèmes spécifiques : sur des chaussures avec Bocage, des sous-vêtements avec Le Slip Français, des bonnets avec Pipolaki, ou encore avec Pierrot Gourmand en habillant les sucettes à distribuer aux enfants dans les boutiques à nos couleurs. Dans ce registre, nous avons aussi travaillé avec MBK et Bic, mais notre action la plus marquante est une série limitée réalisée avec Peugeot de 2007 à 2012 : la plus grosse vente de série limitée de l’histoire de Peugeot, devant la Roland Garros ! Étonnamment, c’est dans les départements du Nord et du Rhône qu’ont été réalisées les plus fortes ventes. Toutes ces marques viennent nous chercher pour notre notoriété, notre image, nos valeurs. Mais, ces partenariats doivent rester ponctuels pour ne pas lasser les gens. Pour être efficace, il ne faut pas que ça dure trop longtemps.