Étude
Le baromètre intitulé «Les consommateurs et le new normal» se penche sur le moral des Français et leurs habitudes de consommation en pleine crise sanitaire. Les explications de Mathieu Morgensztern, country manager de WPP France et CEO de GroupM France.

Inquiétude, anxiété, stress et frustration... Avant même que le variant anglais ne fasse son apparition, et que le troisième confinement ne soit plus qu’une question de jours, le moral des Français n’était pas des plus allègre. Décidément, le «monde d’après» annoncé avec tambours et trompettes après le premier confinement n’est pas advenu, loin s’en faut. Il s'agit pourtant, pour les Français mais aussi les marques, de s’adapter à une crise sanitaire qui perdure. WPP a choisi d’explorer les contours de ce quotidien altéré dans un baromètre intitulé «Les consommateurs et le new normal». 500 répondants de 18 à 70 ans sur un panel propriétaire de GroupM ont été interrogés toutes les deux semaines puis tous les mois à partir de septembre 2020. «En raison du contexte, le dernier terrain lancé le 26 octobre a été prolongé pour bénéficier de suffisamment d’interviews pour réaliser une analyse post-confinement, est-il précisé en préambule dans l’étude. Toute l’analyse porte donc sur les interviews réalisées après l’annonce du reconfinement par Emmanuel Macron le 28 octobre.»

Si le Français est morose, il n’a pas les deux pieds dans le même sabot. Il s’est donc vite adapté aux nouvelles restrictions: les hypers et supermarchés sont fréquentés au moins une fois par mois (85%) tandis que les commerces de proximité regagnent en intentions de consommation avec 68% qui les fréquentent une fois par mois, contre 56% pour les marchés alimentaires et 52 % pour les centres commerciaux. On note en revanche une baisse générale de la fréquentation des enseignes spécialisées depuis juin.  

Parallèlement, les critères de consommation sont en train de s’enraciner dans un sol nouveau. «60% des Français souhaitent que leurs achats aient un impact dans l’économie locale, relève Mathieu Morgensztern, country manager de WPP France et CEO de GroupM France. 80 % d’entre eux donne clairement cet objectif à leur consommation. On entre dans la deuxième phase de préoccupation des Français : après les angoisses quant à la crise sanitaire, les inquiétudes quant à son impact économique...» 

Prime aux marques engagées

Dans ce contexte, ceux qui ont décidé de communiquer sur le «Made in France» ont, semble-t-il, fait un bon calcul. «83% des Français favorisent les produits faits en France, tandis que 74% donnent leurs préférences aux produits originaires de leur région, un item que l’on a vu monter en flèche», relève Mathieu Morgensztern. Le «purpose» affiché par certaines marques reste plus que jamais d’actualité, finalement plus que la recherche du moindre prix. «Celles qui communiquent en disant “Je suis une marque engagée” cochent une case. Les Français considèrent à 65% que les marques sont légitimes à très légitimes à avoir une responsabilité sociale. Si je dis “je joue un rôle positif dans la société et en tant que marque”, je suis dans le vrai de ce qu’attendent les Français.»  

Sur les autres secteurs, comme l’équipement technologique et l’électroménager, la qualité et durabilité soit de loin les critères de choix privilégiés devant la puissance de la marque. Sauf sur les secteurs automobile et luxe pour lesquels une marque reconnue est prioritaire dans le choix d’un produit. Certaines choses ne changent pas : «La marque reste le premier critère du luxe», résume Mathieu Morgenzstern. 

Pour autant, les temps ne sont pas à la frivolité : les intentions d’achat sur les secteurs de la mode, de la beauté et du voyage-tourisme sont fortement impactées par le reconfinement avec des intentions d’achat à court terme et moyen terme en baisse. La crise touche également les secteurs de l'automobile, de la restauration rapide et du luxe dont le renoncement à la consommation progresse à mesure que la situation sanitaire se dégrade. Le report de la consommation est une attitude largement partagée: les confinements et les couvre-feux successifs, l’absence de sorties et de tentations ont permis aux Français de se constituer un bas de laine. Même les cigales se sont faits écureuils, les temps sont à l’épargne. «72% disent disposer d’une réserve d’argent destnée aux achats plaisir, souligne Mathieu Morgensztern. L’idée est que, dès que la situation va se dégager et que les Français seront moins anxieux, ils vont reconsommer.»   

Tous e-commerce

Ce qui restera de toute cette ère de la covid, sans l’ombre d’un doute, est l’ancrage du digital, et ce, précise le CEO de GroupM France, «pour toutes les tranches d’âge et toutes les CSP»: la croissance de l’e-commerce a été de l’ordre de 40% en 2020 contre 13% en 2019. Selon l’étude, in fine, «la nécessité de proposer des modes de distribution hybrides devient indispensable. Le commerce de proximité, extrêmement plébiscité depuis le début de la crise, doit être couplé avec des solutions de e-commerce, dont l’usage s’est également accéléré au cours des confinements et ce, sur tous les secteurs».  

Par ailleurs, le baromètre insiste sur un tiraillement interne: «la crise sanitaire qui s’accompagne désormais d’une crise économique importante accentue l’opposition “fin du monde vs fin du mois”», alors que «les entreprises vont ainsi devoir conjuguer avec une partie des Français qui a les moyens de ses idéaux (économies en vue d’achat plaisir, qualité et marque qui priment sur les prix, etc.) et l’autre partie qui est soumise à des difficultés économiques accrues»... 

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