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Winamax a failli perdre le droit d'exercer son activité professionnelle à la suite d'un tweet jugé homophobe. L'Autorité nationale des jeux s'est engagée à être «plus vigilante sur la stratégie de communication» de la marque.

Le 15 août 2020, Winamax détourne sur Twitter les paroles d’une chanson du groupe de rap français PNL. Dans un montage photo, la marque remplace les têtes des deux rappeurs par les logos des clubs du Paris Saint-Germain et de l’Olympique Lyonnais, qualifiés pour les demi-finales de la Ligue des champions. En légende : « On prend l’Europe et on l’encule à deux. » Jugé homophobe, le tweet génère pourtant plus de 80 000 likes. Le lendemain, Marlène Schiappa, ministre déléguée en charge de la Citoyenneté et Roxana Maracineanu, ministre déléguée en charge des Sports, réagissent en apostrophant la marque sur Twitter. D’autres personnalités politiques et défenseurs des causes LGBT font également part de leur indignation. Le 17 août, la députée LREM de l’Ain, Olga Givernet, adresse un courrier au gouvernement et demande à l’ANJ [Autorité nationale des jeux] de suspendre « l’autorisation de proposer des paris sportifs en France, avant les compétitions. » L’ANJ conclut que le tweet ne constitue pas un motif de suspension, mais invite Winamax à retirer sa publication « sans délai ». Le lendemain, la marque supprime son tweet en relayant le courrier de la députée LREM et répond : « Nous supprimons immédiatement notre tweet “choquant”, “abject” et insupportable. » Les mots entre guillemets sont ceux employés par la députée. Contacté par Stratégies, Winamax n’a pas souhaité réagir. Connu pour ses posts humoristiques adaptés à sa communauté, la marque s’est forgé une forte identité sur les réseaux. Mais pourquoi cette prise de position était-elle risquée ? 

Reco n°1 : « Des références et non des valeurs en commun »

Fabien Contino, directeur du pôle réputation, influence et crise de l’agence Shan

« Le dénominateur qui va déterminer si “tu fais partie ou non de la bande”, c’est la référence. Et la référence est centrale dans l’expression de la marque sur le social media. Winamax s’adresse à une communauté qui ne partage pas forcément des valeurs en commun, mais plutôt des références en commun, le rap en fait partie. Or si tu n’as pas la référence sur ce type de sujet, ça implique des conséquences. Devant rebondir sur l’actualité, Winamax ne peut imposer un système de validation hyper pyramidal. Mais je suggérerais de mettre en place un filtre de validation pour que leurs prises de position à travers des blagues, puissent correspondre à une charte de valeurs de la marque. » 



Reco n°2 : « Winamax aurait pu créer un good buzz »

Marie Muzard, experte en crise digitale chez MMC

« Winamax a probablement renforcé son lien avec une majorité de sa communauté, mais a négligé ses autres stakeholders [parties prenantes]. En particulier l’ANJ, qui délivre son autorisation à exercer son activité et qui s’est engagée à le placer sous surveillance. Pour conserver la confiance de l’autorité de régulation, il aurait dû retirer son tweet dès qu’il a été mis en cause et s’excuser plutôt que de publier un commentaire ironique. Certains fans auraient critiqué ce rétropédalage rapide, mais c’était le prix à payer pour échapper à la colère de ses autres stakeholders. Ainsi, Winamax avait pu transformer un good buzz en générant un débat plus large, portant sur les limites de la liberté d’expression dans le rap et dans les autres milieux, tels que le foot et le jeu. »

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