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Le Sénat reste opposé à l'obligation pour les plateformes et moteurs de recherche de retirer sous 24 heures les contenus «manifestement» illicites, mesure phare de la proposition de loi controversée de lutte contre la haine sur le web.

Le Sénat s'est de nouveau opposé mercredi 26 février à la mesure phare de la proposition de loi controversée de lutte contre la haine sur internet, l'obligation pour les plateformes et moteurs de recherche de retirer sous 24 heures les contenus «manifestement» illicites. Le Sénat dominé par l'opposition de droite a adopté en nouvelle lecture à main levée la proposition de loi de la députée LREM Laetitia Avia, après avoir, comme en première lecture, écarté l'instauration d'un nouveau délit de «non-retrait» de tout contenu haineux en 24 heures.

La proposition de loi va maintenant retourner à l'Assemblée nationale en vue de son adoption définitive, les députés ayant le dernier mot. Le texte n'est toutefois plus pour l'instant à l'ordre du jour de l'Assemblée, embolisée par le projet de réforme des retraites. À l'issue de la première lecture, députés et sénateurs avaient échoué à se mettre d'accord sur un texte commun et l'Assemblée nationale avait rétabli l'obligation pour les plateformes et moteurs de recherche de retirer les contenus «manifestement» illicites sous 24 heures, sous peine d'être condamnés à des amendes allant jusqu'à 1,25 million d'euros. Sont visées les incitations à la haine, la violence, les injures à caractère raciste ou encore religieuses.

«Risques d'inconstitutionnalité»

Les sénateurs ont mis dans la balance la liberté d'expression pour s'opposer à cette disposition. Ils ont substitué à l'obligation de résultat «une obligation juridique de moyens». Ils se sont également opposés à une «règle spécifique» introduite à l'Assemblée par le gouvernement pour les contenus terroristes ou pédopornographiques, prévoyant une obligation de retrait en une heure. «La position du Sénat n'a jamais été de bloquer ce texte ou de le détricoter, mais bien de le renforcer et de le sauver des risques d'inconstitutionnalité», a assuré le rapporteur Christophe-André Frassa (LR), tandis que plusieurs orateurs ont évoqué les récentes affaires Mila ou Griveaux.

Le secrétaire d'Etat chargé du Numérique Cédric O a ainsi cité la réaction à cette dernière affaire du président du Sénat Gérard Larcher, pour pointer «un équilibre à géométrie variable» défendu par la majorité sénatoriale. «Il est grand temps de réguler les torrents de boue qui se déversent sur les réseaux sociaux», avait notamment écrit sur Twitter Gérard Larcher. Cédric O s'est par ailleurs attiré les foudres du président de la commission des Lois Philippe Bas (LR). «Vous avez cru judicieux de citer l'affaire Griveaux (...), ça n'a rien à voir avec le traitement de la haine sur internet», a-t-il affirmé. Cette proposition de loi, sur le métier depuis l'été dernier, a suscité de nombreuses réserves, notamment du Conseil national du numérique, de la Commission nationale consultative des droits de l'Homme ou encore de la Quadrature du Net.

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