Samedi 14 janvier, 6 heures du matin. Le portable de Marc Eskenazi, directeur conseil chez Burson-Marsteller, sonne. L'agence de relations publiques travaille depuis cinq ans sur la prévention et la gestion de crise avec Costa Croisières. L'un de ses bateaux s'est échoué au soir du 13 janvier, au large des côtes toscanes. Plus de 4 200 passagers ont été évacués en catastrophe. Le bilan humain, mardi 17 janvier, s'élevait à sept morts et une vingtaine de disparus. Marc Eskenazi se rend chez son client, très affecté. «Il faut gérer l'émotion, se donner un plan d'action, organiser la cellule de crise, en pensant en priorité aux familles des victimes et aux rescapés à rapatrier», explique-t-il.
A traiter également en urgence: l'arrêt de la campagne de publicité. Lancée le 1er décembre dernier (agence Leo Burnett), elle met en scène un voyage onirique et poétique signé... «Le paradis sur mer». «Elle a pu facilement être arrêtée en télévision. Sur le Web, vu la multiplicité des acteurs, c'est plus progressif. Quant au cinéma, Mediavision n'a pas de contact le week-end», explique Marc Eskenazi. Le film a donc été hué en salles jusqu'à dimanche, sans échapper aux parodies du Web. «Faire du ciel le plus bel endroit de la terre a survécu à deux crises, les attentats du 11 septembre et le drame du vol 447, avec des périodes de gel publicitaire. Celui-ci risque de définitivement faire naufrage», estime Jean-Luc Gronner, créateur de Souslelogo, base de données en ligne de signatures et de slogans.
Autre urgence: répondre aux appels des journalistes, soit plus de 120 en deux jours. Wellcom, en charge des relations presse de Costa Croisières France, prête main-forte. Des éléments de langage sont rédigés en accord avec Burson-Marsteller Italie qui mène la danse et organise, lundi 14, une conférence de presse. Un communiqué donne le ton: compassion, excuses aux familles des victimes, plan d'action (sauvetage, aides aux rescapés), désignation d'un responsable, le commandant, puis éloge de la sécurité de Costa Croisières. Une prise de parole trop tardive, selon certains spécialistes, alors que les passagers évoquent dès vendredi un équipage dépassé. A noter aussi le discours déplacé de l'américain Carnival, la maison-mère de Costa Croisières, évoquant, dès le lundi, l'impact de la catastrophe sur ses comptes. L'heure est aujourd'hui à l'indemnisation des passagers. Reste à faire oublier, pour la marque, mais aussi pour l'ensemble du secteur des croisiéristes, cette image du Costa Concordia couché à quelques mètres des côtes...