Une nouvelle enseigne de distribution vient de voir le jour à Nanterre. Inaugurée en grande pompe lundi 15 mars, Hal Shop est un magasin halal nouvelle génération qui tranche avec l'offre existante allant de la boucherie traditionnelle au rayon pas toujours bien fourni d'un Auchan ou d'un E.Leclerc. Frustré de ne pas trouver dans l'Hexagone de quoi satisfaire sa gourmandise, Rachid Bakhalq, entrepreneur de trente ans et «de triple culture» (française, marocaine et mulsumane) a créé ce qui lui manquait: un magasin proposant à la fois des plats mexicains et de l'huile d'argan, des sauces pour tajines prêtes à l'emploi et du foie gras Labeyrie, du hachis parmentier et des dattes d'Oman, sans oublier une large gamme de bonbons à base de gélatine de bœuf venue du Pakistan. De quoi concilier modernité alimentaire française et tradition musulmane avec des produits halal (permis pour les musulmans) respectant des règles strictes: pas d'alcool, pas de porc et une viande tuée, selon un rite précis, par un sacrificateur musulman.
Avec Hal Shop et ses 1400 références, Rachid Bakhalq vise une large clientèle : le «touriste alimentaire», amateur de cuisine méditerranéenne et de saveurs du Sud et les «beurgeois», des consommateurs musulmans nés en France, majoritairement jeunes (entre 25 et 45 ans) et ayant réussi professionnellement. Un nouvel eldorado? «La France compte entre 6 et 7 millions de musulmans. La demande est là et le marché est important. Le halal représente aujourd'hui la plus grande niche alimentaire française, avec un chiffre d'affaires compris entre 5 et 9 milliards d'euros et un taux de croissance annuel de 15% bien supérieur à celui du bio», explique Rachid Bakhalq. Pas étonnant que ce marché attise l'appétit des distributeurs et des marques (lire l'encadré).
Zone de dégustation
Pour partir à sa conquête, il a souhaité s'appuyer sur une marque contemporaine ouverte à tous. Des agences de design sollicitées pour concevoir Hal Shop, Venise, Malherbe et Market Value, seule cette dernière, filiale de Team créatif, a cru au projet. «Rachid Bakhalqa eu la bonne idée et la bonne approche en refusant les clichés un peu folkloriques ou nostalgiques du halal traditionnel que l'on retrouve, par exemple, dans Au pays, une enseigne concurrente ouverte à Saint-Étienne», commente Philippe de Mareilhac, directeur général de Market Value. Pas de couleur rouge donc, ni d'arabesques avec Hal Shop, mais un magasin ultramoderne qui valorise le consommateur avec une couleur verte omniprésente. «Elle évoque le caractère naturel des produits mais aussi le paradis pour les musulmans, explique Rachid Bakhalq. Je souhaitais que ce magasin parle à tous.» Une sorte de Daily Monop du halal avec un espace pour déjeuner sur le pouce, mais aussi une zone de dégustation pour faire connaître l'étendue des produits.
Market Value a également conçu une mascotte, Hal Boy, pour incarner la marque et communiquer de façon accessible et sympathique avec le client. Rachid Bakhalq, ancien acheteur notamment pour LU, souhaite aussi créer une marque de confiance garantissant une certification halal rigoureuse dans un secteur mal encadré et opaque où chacun y va de son label. Un concept marketing qui est aussi appelé à faire des petits: une dizaine de magasins pourraient être ouverts dans les trois ans. Sans parler de la possibilité de vendre sur Internet ou de créer des produits de marque distributeur.
Juteux mais sensible
La polémique autour des restaurants halal de Quick montre à quel point le sujet est sensible en France, mais le marché juteux. Plusieurs ont ainsi pris position sur ce créneau porteur: Casino avec Wassila, sa marque distributeur de produits halal, mais aussi Fleury Michon, Maggi, Herta, le groupe LDC (Loué, Le Gaulois, Marie, etc.) avec la marque Reghalal ou encore KFC qui indique que sa viande est certifiée halal – sans en faire, pour autant, un positionnement marketing.