Dans la veine d'un Stanley Kubrick précurseur avec Eyes Wide Shut, le voyeurisme ne fait plus aujourd'hui figure de déviance. Les citoyens aiment avoir les yeux grands ouverts, sauf quand il s'agit de regarder en face la préoccupante situation politique française.

Fidelio...  Déjà 25 ans depuis que Tom Cruise, à son plus fringant, prononçait ce Sésame à l’entrée d’un manoir embrumé, ouvrant ainsi la porte sur la plus mystérieuses des bacchanales. Le 15 septembre 1999 sortait le chef d’oeuvre posthume de Kubrick, Eyes Wide Shut, thriller psychanalytique et grand film sur – entre bien d’autres choses – le voyeurisme. Celui du personnage principal mais aussi, par extension, celui du spectateur. Ce sommet de paranoïa donne aussi à voir, un quart de siècle après, un monde encore sans Internet, dans lequel Cruise, tout à ses déambulations hallucinées, ne peut se repérer que par la maigre grâce de téléphones filaires, de clichés argentiques flous.

Qu’aurait pensé Kubrick de notre époque de la monstration, dans lequel le voyeurisme ne fait quasiment plus figure de déviance, tant tout est fait pour l’étancher en deux clics ? On se prend également à rêver avec gourmandise de ce que, au moment où Google et consorts sortent l’artillerie lourde en matière d’IA, Kubrick aurait fait de l’intelligence artificielle générative. N’avait-il pas envisagé de tourner Artificial Intelligence - A.I., finalement réalisé en 2001 par Spielberg ? Dans tous les cas, s’il reste une chose farouchement d’actualité, c’est le titre du film, lequel reflète bien la désinvolture d’un bon nombre de nos concitoyens quant à la préoccupante situation politique française, après un été gorgé de soleil et de jeux : les yeux grands fermés.  

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