Depuis l'accident entre Manon Lanza et Maxime Biaggi, la Youtubeuse subit une vague de haine sur les réseaux sociaux, principalement portée par la misogynie. Elle déplore, entre autres, une réaction un peu tardive de la part de ses homologues masculins.
« J'ai eu l'impression qu'à travers moi on insultait toute la gent féminine »: après un accident lors d'une course automobile entre stars d'internet, la surfeuse et Youtubeuse française Manon Lanza a été victime d'une déferlante de haine et de sexisme sur les réseaux sociaux. La créatrice de la chaîne « Allons rider » pilotait samedi une Formule 4 pour la deuxième édition du GP Explorer, qui réunissait sur le circuit du Mans (centre de la France) 24 participants, dont 5 femmes, tous amateurs. Retransmis sur la plateforme Twitch, l'évènement a affolé les compteurs, avec un pic de 1,3 million de spectateurs en direct.
Mais le résultat de la course a été éclipsé par la vague de messages haineux à l'encontre de Manon Lanza, après un carambolage entre sa voiture et celle d'un autre Youtubeur, Maxime Biaggi, qui a contraint les deux concurrents à déclarer forfait. « Tout se passe tellement vite. Je roule à 160, 170km/h, et en une fraction de seconde, je passe au-dessus de sa roue, je me fais projeter en l'air, je retombe sur le bitume avant de me faire éjecter dans le bac. J'ai la tête qui cogne, le choc est assez violent, ça me coupe la respiration », se remémore la créatrice de contenus, habituée aux sports extrêmes.
Pendant qu'elle est extraite avec précaution de sa voiture pour être transportée à l'hôpital, de nombreux messages lui attribuent déjà la responsabilité de l'accident. « Je pense qu'il y a beaucoup de gens qui ont profité de cet incident sur la piste pour simplement avoir des propos sexistes », explique-t-elle lors d'un entretien mercredi à l'AFP. « Il y avait énormément de messages sous mes publications, parfois plus de 10.000 messages. Également des DM (messages privés) mais la haine était surtout sur Twitter » (aujourd'hui X).
De retour de l'hôpital avec une hernie cervicale, elle fait défiler les injures sur son écran: « Femme au volant, mort au tournant », « Retourne dans ta cuisine », « T'as niqué la course de Maxime », parfois partagées par des femmes. « Je ne les ai pas pris personnellement. J'ai eu l'impression qu'on insultait toute la gent féminine », évoque-t-elle, le cou maintenu par une minerve. Manon Lanza n'a toutefois pas l'intention de porter plainte pour cyberharcèlement. « La meilleure chose que je puisse faire c'est avoir de l'énergie pour continuer à me battre et ne pas leur donner raison. »
Manque de réaction
« Je fais des sports très largement pratiqués par les hommes: surf, skate, snowboard, motocross. Je suis souvent avec des garçons et j'ai déjà eu des remarques de ce type. Ce n'est pas que sur internet, ça se passe aussi dans les skate parks et dans l'eau. » Malheureusement, le sexisme reste « le sujet relou (lourd) qu'il ne faut surtout pas aborder », déplore-t-elle, face au soutien tardif des concurrents et organisateurs de l'évènement. « J'aurais aimé que la réaction soit plus immédiate de la part des Youtubeurs et qu'ils se sentent autant concernés en tant qu'homme qu'une femme peut l'être », estime Manon Lanza.
Squeezie, à l'origine du GP Explorer et premier Youtubeur français, a mis trois jours avant de réagir dans une vidéo, s'emportant contre les auteurs des messages haineux. Le monde du streaming en ligne, comme celui des jeux vidéo, est secoué depuis des années par les scandales de harcèlement à l'égard des femmes. Malgré les engagements des plateformes, et les mesures mises en place pour lutter contre le cyberharcèlement, de nombreuses figures féminines continuent d'y être victimes de menaces et d'insultes.
Revenant sur l'accident de samedi, Manon Lanza estime que « les choses ne se sont pas déroulées comme elles auraient dû » pour la protéger. « Les commentateurs ont juste diffusé la vision de Maxime, du coup on se rend difficilement compte de ce qu'il se passe en piste. (...) Il aurait été pas mal d'avoir d'autres angles de vue, ou une image de l'ambulance pour que les gens se rendent compte que j'étais blessée », souligne-t-elle.