Agences
Alain Yav préside Pygma Communication, la plus grosse agence indépendante de Kinshasa. Son groupe se déploie dans la publicité mais aussi la promotion immobilière, le conseil ou les mines. C’est avec une vision très large de la communication qu’il aborde la transition politique dans son pays.

Il y a une sorte de paradoxe en République démocratique du Congo [RDC]. C'est à la fois le plus grand pays francophone, un marché plein de promesses et d'opportunités, et en même temps on ne peut ignorer un manque de visibilité politique. En quoi cela touche votre agence ?

Cela affecte nos vies, notre business. L'incertitude est une réalité mais tout dépend de comment on la vit. On a l'option d'attendre ou de faire. Le choc a été fort en décembre 2016, à l'échéance du mandat de Laurent-Désiré Kabila. Ca a créé une sorte de parano. On a passé une année très difficile financièrement. Ça a tout gelé et on l'a senti immédiatement dans notre business. L'agence existe depuis quinze ans et j'ai vécu trois élections. Des moments durs, il y en a eu. Mais quoi qu'il arrive on avance !



Vous avez été formé en Afrique du Sud...

Oui, j'y suis resté quinze ans. J'y ai fait mes études puis j'ai commencé ma carrière professionnelle à Johannesburg dans les multinationales, en communication et en marketing, pour Procter ou Cadbury. Je suis revenu à Kinshasa juste avant les premières élections démocratiques. Il y avait beaucoup d'énergie et d'optimisme mais aussi du doute.



Comment définiriez-vous les codes de la publicité en RDC ?

J'ai des clients comme Vodacom, Heineken, Brasseur, Western Union.... Il y a peu de gros annonceurs. Ce sont des communication à 360 avec le souci d'une bonne stratégie et de la compréhension du marché. La particularité est peut-être une approche très musicale et le goût pour les histoires. Le consommateur attend d'un spot qu'il lui raconte quelque chose. C'est d'ailleurs pourquoi ce spot dure au moins une minute, plutôt que trente secondes. Cela donne une communication très audiovisuelle avec un filtre social sur les réseaux sociaux.



Quels sont vos conseils pour un annonceur qui veut s'implanter en RDC ? Et les erreurs à ne surtout pas commettre ?

Le Congolais consomme local. Parlez-lui dans un langage qu'il comprend. Il faut qu'il s'y retrouve. Mettez-y de l'inspiration car il doit se projeter, avancer, tout en se reconnaissant, en se disant que c'est fait pour lui. Il décroche assez facilement. Il faut être très musical, très dansant et « stories » : ce n'est pas pour rien que les telenovelas et Nollywood marchent si bien ici. Le Congolais est très aspirationnel et brand conscious. Par contre, il est réaliste car il n'a pas d'argent. Il est très sensible au prix. Nous nous en rendons compte quand nous essayons de faire financer nos projets par abonnement sur Internet.



Pygma est aussi organisateur d'événements et producteur de télévision...

Oui, nous avons commencé à produire nos propres pubs puis nous nous sommes développés dans les RP et les événements. Nous avons organisé des concerts en faisant venir par exemple Stromae. En télévision, puis nous avons réalisé, sur le format de The Voice, Best of The Best avec Vodacom. Nous avons été aussi mandatés par le ministère du Tourisme pour réaliser Miss RDCongo, un programme de dix semaines de téléréalité, qui a remplacé Miss Vodacom. Cette marque a été attaquée par celui qui avait déposé les droits et elle a perdu deux fois. Mais c'est un concours novateur que l'on peut vendre en Afrique.

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