«Riposte party» à gauche, «soirée live-tweet» à droite: à chaque émission de leur poulain, comme à chaque meeting, les militants PS et UMP se mobilisent en masse sur les réseaux sociaux, et particulièrement sur Twitter. Rue de Solférino, une quarantaine de militants s'occupent de la campagne Web de François Hollande, contre 12 pour celle de Nicolas Sarkozy. Objectif, inonder la toile de messages du candidat et répondre aux attaques du camp adverse, aidé d'argumentaires à l'usage des twittos-militants.
«Ce type d'événement nous permet de propager la parole de Nicolas Sarkozy et de l'enrichir avec des contenus, comme des vidéos», explique Nicolas Princen, son responsable de campagne numérique. «Les militants veulent occuper le terrain. Le nombre de messages envoyés permet de mesurer l'intensité de la campagne de tel ou tel candidat », estime Benoît Thieulin, co-fondateur La Netscouade et directeur de la campagne Internet de Ségolène Royal en 2007.
Avec plus de vingt-six millions de Français inscrits sur Facebook et cinq millions sur Twitter, difficile d'ignorer les réseaux sociaux. Un outil qui n'existait pour ainsi dire pas en France il y a cinq ans. «C'est l'une des évolutions majeures de cette campagne», assure Benoît Thieulin. Et tant pis si seulement 3% des Français suivent un candidat sur Twitter, 5% sur Facebook. «L'essentiel de la campagne ne passe pas par les pages des candidats mais par les discussions qu'ont les utilisateurs entre eux au quotidien», estime le directeur de La Netscouade.
Comme les marques, les candidats veulent s'immiscer dans les conversations, profiter du pouvoir d'influence qu'offre la recommandation et ainsi faire passer leur message. «Ce qu'un candidat dit sur sa page Facebook n'y reste pas. Le partage de ces contenus par des gens ordinaires a un effet multiplicateur énorme. Et ces contenus viennent des personnes qui influencent le plus votre vote, à savoir vos amis», souligne Patrick Ruffini, directeur de l'agence Engage et webmaster de la campagne Bush-Cheney en 2004 aux Etats-Unis.
Des outils que chacun utilise à sa manière. C'est sur Facebook que l'équipe de Nicolas Sarkozy concentre ses efforts. «Avec environ 50% de la population française inscrite, Facebook est le seul mass-média aujourd'hui sur Internet. La qualité de l'engagement y est également supérieure comparé à Twitter. Facebook est un réseau affinitaire, basé sur le “like”, et qui crée donc un lien affectif avec le candidat», souligne Nicolas Princen.
Avec plus de 600 000 fans, en hausse de quelque 100 000 personnes depuis le début de la campagne, Nicolas Sarkozy devance de loin ses rivaux. Avant le premier tour, François Hollande dépassait les 85 000 fans, devant Jean-Luc Mélenchon, champion de l'interactivité, avec à lui seul 54% des «j'aime» et des commentaires générés en mars sur le site par les dix candidats à la présidentielle, selon le baromètre de l'agence Socialbakers.
Plus que Facebook, l'équipe de François Hollande privilégie Twitter, sur lequel le candidat socialiste totalise plus de 225 000 followers, devant Nicolas Sarkozy (160 000 abonnés). «L'utilisation politique de Facebook n'est pas si importante que ça. C'est surtout un réseau familial et amical. On y parle beaucoup moins de politique que sur Twitter», estime Vincent Feltesse, responsable de la campagne numérique de François Hollande.
Au total, le candidat socialiste a généré en mars plus de 830 000 tweets, selon l'étude Twittoscope de TNS Sofres, contre 1,3 million pour Nicolas Sarkozy. Des messages dont la teneur est moins favorable pour le président sortant, avec 21% de messages critiques pour Nicolas Sarkozy contre 12% pour François Hollande. «Je ne suis pas sûr que Twitter permette de convaincre de nouveaux électeurs», estime Vincent Feltesse. Selon lui, le site de micro-blogging sert surtout à faire savoir ce que fait et ce que dit François Hollande aux leaders d'opinion.
«Les médias sociaux permettent aux candidats de s'humaniser, de se montrer sous un angle personnel», estime pour sa part Patrick Ruffini. Un outil précieux pour une élection présidentielle, censée marquer la rencontre entre un homme et un peuple.