Petit, mais costaud: le marché des produits biologiques attise les convoitises. Cette niche ne pèse que 2,5% du marché alimentaire global mais elle se porte très bien, avec une croissance supérieure à 20% entre 2005 et 2010, et de 10% en 2011 malgré la crise, selon les chiffres de Cécile Desclos, directrice du pôle distribution du cabinet Eurostaf, qui a réalisé récemment une étude sur ce secteur (1). Le marché de l'alimentaire bio pesait 3,9 milliards d'euros en 2011, il pourrait atteindre 5,3 milliards en 2015.
Pour capter une clientèle à haut revenus, friande de ce type de produits, tout en «verdissant» son image, la grande distribution multiplie les initiatives, à l'instar d'Auchan, qui va ouvrir un point de vente entièrement bio (lire l'encadré). E.Leclerc a relancé en mars la campagne de publicité sur son comparateur de prix (Lebiomoinscher.com). Auchan et Leader Price avaient également communiqué en 2010 sur le prix du bio. Monoprix, l'une des premières enseignes à avoir parié sur ce créneau, a racheté le réseau francilien Naturalia en 2008.
Augmentation de la surface de vente
Selon Eurostaf, les grandes et moyennes surfaces (GMS) pesaient en 2010 47% de la distribution du bio alimentaire, contre 36% pour les spécialistes (indépendants et réseaux, comme Biocoop et La Vie claire). Les réseaux mettent en avant leur expertise et la provenance locale ou régionale de leurs produits, là où les GMS importent une majorité de leur assortiment. «Les consommateurs engagés dans une démarche environnementale privilégient le bio de proximité», confirme Cécile Desclos. La vente directe (marchés, Amap, producteurs) pèse d'ailleurs 12% de ce segment.
Pour affronter la concurrence des GMS, les spécialistes du bio augmentent la surface de leurs points de vente, à l'instar de la chaîne parisienne Bio C Bon et ses magasins de 700 m2, ou de Natureo, dont le supermarché de Chartres est le plus grand de France, soit 1 000 m2 et quelque 14 000 références.
Charles Kloboukoff, PDG du groupe Lea Nature (marques Floressance, Jardin Bio, La Maison de Léa, Biovie, etc.) distribue une majorité de ses produits en GMS, mais considère néanmoins que «l'offre des magasins bio a une vraie légitimité, grâce à une valorisation des producteurs locaux et uns service client étendu, surtout dans les produits frais». Mais pour recruter de nouveaux clients, il conseille aux réseaux de communiquer davantage. Biocoop, le premier de ceux-ci avec 322 magasins, l'a fait l'année dernière, dans une campagne réalisée par l'agence Oko. Pour illustrer la signature «Notre bio n'a rien à cacher», une poire, une gousse d'ail et une citrouille offraient au regard leurs rondeurs suggestives. Une manière de rendre sexy des produits qui souffrent de prix jugés trop élevés et d'une image quelque peu austère.
Encadré
Chez Auchan, le bio prend son indépendance
L'enseigne ouvrira en mai prochain un point de vente entièrement dédié au bio. C'est à Brétigny-sur-Orge, dans l'Essonne, que le magasin Cœur de nature va proposer une offre de produits bio et éco-labellisés sur 1 000 m 2. Une surface nettement supérieure à la moyenne des boutiques spécialisées, qui est de 131 m2 pour les boutiques indépendantes et de 207 m2 pour les réseaux, selon Eurostaf. Pour François Cathalifaud, responsable de la communication du distributeur, «le bio est un marché en croissance. Dans nos hypermarchés, nous proposons environ mille références en moyenne.» Prudent, comme à son habitude, le groupe nordiste évoque «une expérimentation»: «Il s'agit d'un test. Il n'y a aucune autre ouverture prévue pour l'instant», précise François Cathalifaud. Segment porteur, les produits biologiques, surtout alimentaires, cartonnent chez Auchan: les ventes du rayon épicerie bio ont doublé depuis 2005. En 2010, l'enseigne a fait une campagne autour de 50 produits de sa marque distributeur, «Mieux vivre bio», à moins de 1 euro. Pour l'instant, Auchan n'a pas prévu de communiquer sur Cœur de nature.