Nombreux, aisés, consommateurs et fidèles: les seniors sont une cible très intéressante pour les marques. Pourtant, en raison d'un tabou sémantique persistant – les mots «vieux», «personne âgée» et même «senior» sont prohibés dans les publicités –, les annonceurs continuent de s'adresser prioritairement à la ménagère de moins de cinquante ans.
Selon Thierry Joly, directeur général de Zenith-Optimedia, «les termes employés dans les publicités visant les seniors sont souvent métaphoriques. Par exemple, Société Générale sur un produit d'assurance vie parle d'érable, d'ébène, de séquoia et d'épicéa: des variétés de bois solides et durables.»
L'enjeu pour les annonceurs est donc de séduire une cible qu'ils ne peuvent, ou ne veulent pas, nommer. Pour Florence Renault, directrice associé de Carat, «il est clair que la “ghettoïsation” ne fonctionne pas sur cette population».
La preuve avec l'échec de Vivolta, une chaîne télé lancée en 2007 et estampillée senior. Trois ans plus tard, elle change d'objectif pour devenir «la chaîne de l'art de vivre féminin au quotidien» sur une cible de femmes de 25 à 49 ans. Même punition sur le Web, avec le changement de nom du site SeniorPlanet.fr, lancé en 2000 et devenu Planet tout court en 2008, car, selon son créateur Patrice Angot, «les quinquas ne se reconnaissent plus dans ce terme».
En matière de médiaplanning des seniors, il faut absolument prendre en compte le décalage entre la date de naissance et l'âge ressenti, qui est inférieur de 10 à 15 ans selon Kantar Media, et même de 19 ans après 65 ans. Une fois ce critère intégré, mieux vaut savoir qui ils sont, car ce segment est vaste (les plus de cinquante ans sont 22 millions en 2012) et hétérogène.
«Les seniors sont très difficiles à catégoriser. Selon qu'ils sont actifs ou inactifs, retraités ou pas, leurs besoins sont très différents», estime Thierry Joly. La presse spécialisée senior, par exemple, s'adresse aux plus de 65 ans, mais aimerait bien recruter des baby boomers (50/62 ans), cible préférée des marques. Or ceux-ci préfèrent la presse quotidienne régionale et les news magazines.
Surconsommateurs de médias, les seniors aiment la télévision, la radio, la presse et de plus en plus le digital, surtout pour les 50-65 ans. Selon Thierry Joly, le médiaplanning des seniors doit donc comprendre une grosse part de télévision, de la radio comme média d'accompagnement et de la presse, très efficace sur cette cible. Affichage et cinéma sont les deux parents pauvres des plans médias. Le Web est consommé de manière raisonnée, Skype et MSN pour rester en contact avec les petits enfants, et des sites pratiques pour recueillir de l'information.
Florence Renault, directrice associé de Carat, qui s'occupe depuis un an du médiaplanning d'une marque de produits contre l'incontinence, est d'accord avec cette analyse: «L'ensemble des médias est consommée par cette cible. Le média principal pour les toucher dans leur intégralité, c'est la télévision. La catch-up TV marche d'ailleurs très bien sur ce segment.» Parmi les chaînes, c'est France Télévisions qui est plébiscitée par cette population, ainsi que les chaînes de la TNT.
Autre outil à ne pas négliger: le hors médias. Marketing direct et imprimés sans adresses sont en effet très efficaces sur une population qui a le temps d'étudier en détail les offres des marques.
Encadré
Les seniors décryptés
Reload (Zenith-Optimedia) a établi une typologie par catégorie d'âge de cette cible pour aider les annonceurs à choisir les médias les plus efficaces. Les «senio-optimizer» (50-60 ans) sont encore dans l'action et n'ont pas le temps de penser à la retraite. Les «tee-niors» (60-65 ans) sont curieux et profitent de la vie. Les «senio-fears» (plus de 65 ans) commencent à se préoccuper de savoir s'ils ont réglé leur succession. Enfin, les «sereniors» (plus de 70 ans) sont apaisés et sereins. P.C.