N’en déplaise à Elon Musk : passer 40 heures par semaine au bureau n’est plus au goût du jour, les salariés veulent de la flexibilité. Certains dirigeants, comme le médiatique patron de Tesla, regimbent et menacent. Mais pour combien de temps ?
Pour la majorité des salariés, la chose est acquise : la flexibilité est la meilleure façon de travailler. Hier encore privilège de quelques happy few, elle est devenue, après deux ans de crise sanitaire, la nouvelle norme. Reste que le travail hybride n’est pas acquis pour tous. Un peu partout dans le monde, les gardiens du temple font les gros yeux, freinent des quatre fers. En vain. Les barrières sont tombées : nous avons changé de paradigme et ceux qui feignent de l’ignorer s’exposent à de sévères déconvenues. Il n’y aura pas de retour en arrière.
L’exemple de Goldman Sachs est éloquent : son PDG, David Salomon, a eu beau s’agiter, seule la moitié des 10 000 salariés du groupe est revenue travailler en présentiel, comme il l’exigeait en février dernier. Il faut s’adapter, et ce quelle que soit la taille de l’entreprise. L’hybridité n’est plus l’apanage des start-up : des groupes comme Orange et Hewlett-Packard, pionniers sur le télétravail, ont su rester hyper attractifs en misant sur une organisation favorisant le bien-être des salariés. Avec la guerre des talents qui bat son plein, la question ne devrait même pas se poser. D’ailleurs, il n’y a qu’à regarder les jobboards : sur Monster, Indeed, Welcome to the jungle, le travail flexible est partout.
Prioriser le bien-être des employés
Le risque pour ceux qui refusent de s’adapter au travail hybride est de ne plus retenir grand monde et de ne plus attirer personne, même à proposer de meilleurs salaires. La fuite des talents a déjà commencé : de nombreuses entreprises, qui n’ont pas su, ou pas voulu, s’adapter aux exigences de ce nouveau paradigme, c’est-à-dire répondre à la quête de sens et de bien-être des collaborateurs, voient partir leurs salariés pour des organisations plus agiles, plus disruptives, plus modernes. En vérité, le travail flexible n’est déjà plus un critère si différenciant pour le recrutement : les talents le considèrent comme un prérequis et c’est bien plutôt sur ses modalités que les organisations se distinguent.
Permettre à ses collaborateurs de venir au bureau à leur guise, deux ou trois jours par semaine, et de télétravailler le reste du temps est un bon départ, mais cela ne suffit pas. L’enfer du distanciel est peuplé de bonnes intentions. De fait, la gestion de la flexibilité est cruciale. C’est que l’autonomie des collaborateurs à distance n’est pas acquise ; à vrai dire, elle ne dépend pas d’eux, mais des outils et process mis en place à cette fin. Les applications qui permettent de savoir qui est au bureau et quand chacun est censé s’y trouver en sont un bon exemple : elles favorisent concrètement la collaboration et le lien social. Quand on vient sur site, ce n’est pas pour faire d’autres réunions en visio. Les solutions qui accompagnent les salariés remote dans la prévention des risques psychosociaux sont également à choisir avec soin, tant la santé mentale des collaborateurs est devenue un enjeu essentiel.
En toile de fond, un risque financier majeur
Mais peut-être l’argument économique sera-t-il mieux à même de convaincre les sceptiques. En effet, les entreprises ont beaucoup à perdre à ne pas gérer correctement l’hybridité. Certaines, comme à La Défense, ont déjà vendu leurs immeubles et emménagent dans des locaux plus petits, moins coûteux donc, et surtout mieux adaptés aux nouveaux modes de travail et à la nécessité de créer des espaces plus collaboratifs. Le bureau change et s’adapte aux besoins des salariés. De même pour la gestion du matériel à distance qu’il faut pouvoir amener au collaborateur dès son arrivée dans l’entreprise et récupérer à son départ. Le défi est double : il en va du confort des personnes et des finances de l’entreprise, qui peut perdre beaucoup de temps et d’argent si la rotation de l’équipement n’est pas bien gérée.
Bien sûr, le risque financier ne se limite pas à la question du loyer et du matériel, qui demeurent parmi les postes de dépenses les plus importants, et l’on pourrait parler d’autres dépenses courantes directement impactées par le choix de la flexibilité. Mais le plus gros enjeu, pour les organisations, reste l’attractivité et la compétitivité. Les salariés sont évidemment leur actif le plus précieux. Mieux vaut ne pas l’oublier, car rien n’est jamais acquis. N’en déplaise à Elon Musk.