Dans leur nouveau film de marque réalisé par DDB Paris, les Galeries Lafayette réaffirment leur existence et tentent de rajeunir leur audience. Sous la forme d'un conte des temps modernes, ce mastodonte historique rappelle son rôle culturel.
Après quatre ans d’absence, c’est le retour de l'un des plus mythiques grands magasins sur le petit écran. En mars 2021, les Galeries Lafayette ont lancé une compétition que DDB Paris a remportée pour renouveler leur plateforme de communication. C’est le genre de campagne qui n’arrive qu’une fois tous les trois à cinq ans. Après un an et demi de travail, la campagne de marque voit enfin le jour, le 21 août en France. Il fallait bien tout ce temps pour cette marque vieille de 130 ans. « Après la crise du covid s'est ensuivie une période de tension liée à la guerre et l’énergie, en plus d’une compétition très accrue dans le secteur. Même si l’activité repart, nous avions envie de reprendre la parole pour rappeler notre importance. Pour nous, c’était le bon moment. Nous voulons inviter nos clients à revenir en magasin, en plus de notre site, afin de leur montrer nos nouveautés comme notre espace de santé, notre salle de sport ou notre espace dédié à la second main », raconte Guillaume Gellusseau, directeur marketing et communication des Galeries Lafayette.
Ce rappel passe donc par un film d'envergure : 60 secondes réalisées au sein même du célèbre bâtiment de la marque Galeries Lafayette, situé boulevard Haussmann. « Ce film de marque est une superbe opportunité pour un publicitaire, nous n’avions rien à vendre si ce n’est montrer la splendeur de la marque », explique Ondine Simon, directrice artistique senior chez DDB Paris. Connu internationalement, le grand magasin du boulevard Haussmann est un passage obligé autant pour les touristes que pour les fashionistas. Mais cette renaissance a nécessité un retour dans le passé. L’agence a souhaité fouiller les archives de ce monument historique pour en comprendre l’essence. « En creusant dans son histoire, nous nous sommes rendu compte que le bâtiment était connu pour faire du divertissement. D’ailleurs quand le bâtiment est vide, il ressemble vraiment à un théâtre. L’idée était de libérer l’état d’esprit du grand magasin sans rentrer dans les mécanismes du documentaire », ajoute Ondine Simon.
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Mais qui dit monument historique, dit dépoussiérage. « Depuis Jean-Paul Goude, on ne se souvient pas de grand chose des Galeries. Le but était donc de rajeunir l’image de la marque en s'appuyant sur une nouvelle plateforme, aveec de nouveaux principes que sont la joie, l’inclusivité et la jeunesse d’esprit », reformule Julie Haslé, directrice générale adjointe de DDB. Pour ce faire, l’agence s’est appuyée sur un casting éclectique, avec des « vraies gens » représentés par des jeunes et des moins jeunes qui ont en commun l’amour de la mode. Chaque personnage représente un caractère ou un « way of life », incarnant des « rebelles » ou des « vrais rebelles », des « impatients »… Ce casting donne des impressions de déjà-vu, en écho à la dernière campagne de la marque Vestiaire Collective. « Les plus jeunes auront une vision des Galeries sûrement différente de leurs parents, du fait de leur utilisation du digital. De temps en temps, ça fait du bien aussi de rappeler qui on est et de se repositionner », affirme Guillaume Gellusseau.
Pendant deux nuits d’affilée – pour ne pas déranger le bon fonctionnement du magasin –, une cinquantaine de personnes se sont donné rendez-vous au sein des Galeries Lafayette Haussmann. Pensée comme un conte de fée, cette campagne invite le téléspectateur à rêver et suit le personnage principal, une sorte d’Alice aux pays des merveilles moderne qui passe dans un autre monde, celui des Galeries. La scène suivante montre l’actrice principale au bord d’un plongeoir, sous la coupole mythique, avec des mètres de vide sous les pieds. De quoi donner le vertige. « C’était une prouesse technique tant pour la production que pour l’actrice. Elle est comme suspendue dans le vide avec une robe de la formidable griffe Ami. C’était un moment de grâce, sublimé par la prestation du drone. Personne dans l’équipe n’avait jamais vu d’aussi près la coupole. Je me souviens que tout le monde s’est levé pour filmer le retour caméra », confesse Julie Haslé. Une scène théâtrale empreinte de références filmiques notamment Roméo et Juliette ou encore Le Moulin Rouge. Pour accompagner cette écriture dynamique et contemporaine, l’agence s’est entourée du duo de réalisateurs BRTHR, Alex Lee et Kyle Wightman. « Malgré leur jeune âge, ils ont déjà travaillé pour Adidas, YSL mais aussi avec des artistes comme Selena Gomez, Lana Del Rey… Ils manient habilement les effets visuels et le montage tout en respectant l’histoire de notre marque », appuie Guillaume Gellusseau.
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Évidemment, une enseigne de mode ne pouvait pas se passer d’une garde-robe digne de ce nom, une mission parfaitement remplie par la styliste Joyce Sinanian, habituée des plateaux de cinéma. « Nous ne voulions pas faire un film de mode ni un défilé mais il fallait quand même subtilement intégrer ce chic à la française, ce french "je-ne-sais-quoi", ça reste quand même une enseigne de mode française », tranche la directrice adjointe de DDB Paris. Un léger chauvinisme qu’on pardonne aisément, renforcé par le choix de la bande son, une chanson interprétée par Michel Berger, « À quoi je rêve », méconnue du grand public mais qui donne une trame au film. « Nous avons exploré plusieurs années de variété française avant de trouver cette chanson assez tard dans la compétition. On ne reconnaît pas forcément l’artiste mais c’est vintage et mémorable », relate la directrice artistique. À tel point que le film porte le nom de la chanson. Aucune des deux parties ne dévoilera le budget alloué à cette campagne mais au vu des effets spéciaux et du casting première classe, on imagine qu'il est conséquent.
Avec ce film, DDB Paris donne à voir un nouveau visage de l'enseigne française. En plus d’être un patrimoine historique et de la mode, elle nous rappelle son rôle culturel. En témoignent les prints qui accompagnent cette campagne, réalisés par le photographe Clark Franklyn, qui rappellent les affiches de spectacles de Broadway. La culture est parfois là où on ne s’y attend pas.
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