Qu'est-ce que le brand content? Qui peut le revendiquer? Qui le vend? De quoi parle-t-on? D'un «buzzword»? D'un nouvel écran de fumée pour mieux vendre nos métiers à des annonceurs avertis et lassés de nos offres anciennes? D'un mouvement philosophique? D'une querelle entre le monde de la publicité et le monde de la communication? Discussions passablement oiseuses.
Le brand content n'est pas tout cela et ceux qui y consacrent tribunes et blogs, qui nouvellement s'en réclament, ne prêtent qu'à sourire: ils courent après une aventure commencée depuis longtemps (sans eux) que l'avènement des technologies a seulement rendue visible. Tout à coup, ils revendiquent le droit à l'histoire, le droit à la narration, le droit au décryptage des valeurs de la marque, le droit au récit, à l'explication.
Après des années à avoir vendu images chocs et avantages prix-produit, à avoir travaillé sur la séduction («Demain, j'enlève le bas») en méprisant suprêmement le consommateur ou client final à coups de matraquage, ils en viennent à vouloir conquérir le territoire de la conviction, de l'explication, de la démonstration, de la recherche, de l'écriture, des valeurs, du storytelling.
Quelle revanche pour les agences de contenus – qui ne sont somme toute que les agences de communication éditoriale qui existent depuis le début des années 1990 – pour qui c'est le lot depuis toujours! Des agences qui se sont fondées sur cette promesse de «penser horizontal», au delà des silos et des spécialités, qui l'ont défendue envers et contre tous, qui ont été rejetées et niées par les «marketeux» et autres publicitaires issus de leur propre autosuffisance, autoproclamés génie, au prétexte qu'elles ne délivraient pas suffisamment de marge brute. Et quelle revanche du marché, devenu publiphobe, qui en vient à être exigeant et ne se satisfait plus des pièges grossiers des «publicitaires d'hier».
Le brand content n'est ni plus ni moins que l'art de considérer, de respecter, de comprendre ses publics (tous ses publics), comme des êtres intelligents, souvent membre de communautés plurielles et complexes, qu'il faut convaincre plutôt qu'abuser, en les installant dans un dispositif où résonne l'idée de marque, son innovation, sa différence.
C'est considérer les marques comme des vecteurs de valeurs, porteuses de choix, de philosophies, d'éthiques, mais aussi de champs de contraintes; c'est chercher un fil narratif auquel il faut donner cohérence et profondeur avec tous les moyens techniques à notre disposition (le digital n'est qu'un moyen, en aucun cas une fin!).
Bref, un travail de pédagogie, de compréhension, d'écoute, d'analyse, d'écriture, de mise en musique (en synchronie) des messages. Un travail qui n'a rien à voir avec la pseudo-fulgurance du cri créatif qui se doit d'installer une relation «win-win» entre toutes les parties prenantes. Qui se mesure. Se pense. S'aime. S'apprécie. Se réfléchit. Et ne s'improvise pas!