Si vous ne connaissez pas encore le «sondophobe», trois livres se chargent de vous le présenter: Secrets de sondages de Denis Pingaud, La Guerre des sondages d'Hugues Cazenave et Opinion, sondages et démocratie de Roland Cayrol. Dans les trois cas le portrait de cet adversaire acharné des sondages présente les mêmes caractéristiques: une aversion pour la démocratie, un caractère obtus doublé d'un manque évident de culture.
Le sondophobe n'aime pas la démocratie. Ceux qui critiquent les instituts sont des adversaires des sondages, donc de l'opinion, donc de la démocratie. Sacré «sondophobe!» Soit il méprise l'opinion publique qu'il ne considère pas en mesure d'avoir un avis éclairé, soit il est un politique brutalement (ou désespérément) confronté à de mauvais sondages. (...)
Le «sondophobe» est un crétin. Plus que tout autre, il est convaincu de l'absence de fiabilité des sondages. Décidément, quelle bêtise! Car, pour les instituts, les études quantitatives se trompent rarement. Prenez le premier tour de la présidentielle de 2002 devenu l'exemple même de l'incapacité des sondages à détecter les glissements d'opinion. (...) Entre ceux qui ne croient pas aux sondages et ceux qui y croient trop, une chose est sûre, les pauvres instituts doivent faire face au même fléau: la crétinerie!
Le «sondophobe» n'explique rien. On ne peut être qu'atterré par le niveau intellectuel de la réflexion de nos experts. Ainsi le débat sur les sondages ne serait que le fait de quelques extrémistes ennemis de la démocratie et le résultat d'une ignorance généralisée? Heureusement non. Il s'agit de l'interprétation que privilégient les instituts pour éviter de parler des vrais problèmes. Réussiront-ils à étouffer la polémique de cette façon? C'est peu probable. La ficelle est trop grosse et l'argumentation au bout du compte bien trop faible pour que les instituts s'en tirent à aussi bon compte. Quoi qu'il leur en coûte, ils devront se résoudre à débattre sur le fond. Le débat ne fait donc que commencer. Pour la démocratie, il n'est pas anodin qu'un pays comme la France prenne l'initiative de le mener jusqu'au bout.