Chaque époque se crée ses symboles et chaque génération façonne ses totems.

 

Si, au panthéon des éléments, les références célestes et stellaires, les «sun» et autres variations autour du mot «air» ont eu leur heure de gloire, cette année est marquée par l'imaginaire en apparence plus nébuleux mais tout aussi riche du «cloud».

 

Ainsi, après le filet (Net) ou la toile d'araignée (Web), le secteur de la technologie a la tête dans les nuages: le 6 juin dernier, Steve Jobs annonce le lancement d'Icloud (disponible uniquement à l'automne), tandis que IBM communique en presse sur son Smart Cloud.

 

Citons également les Jolicloud, Mondeducloud.fr, le HP Cloudsystem, Cloudera, l'improbable «infonuagique» plus heureusement nommé «service en nuage» ou encore Mobile Me dont le logotype représente... un nuage.

 

Des signaux faibles de l'effet de mode à venir avaient été identifiés: en attestent les cinquante dépôts de marques effectués à l' Institut national de la propriété industrielle (Inpi) depuis mars 2011 autour du terme «cloud» dont Finance Cloud, Cloud médical, «le cloud des gens du Nord»... On dénombre 1 300 logotypes incluant un nuage dans les grandes classes de dépôts des marques technologiques.

 

L'usage de la métaphore semble particulièrement adapté pour Apple qui, fort de sa pomme fondatrice, de son bestiaire d'OS (Lion, Puma, Tiger, Panther, Leopard), renouvelle aujourd'hui sa stratégie de marque autour d'une poétique météorologique.

 

Dans L'Air et les Songes, Gaston Bachelard parlait des nuages comme «objets poétiques [...] d'un onirisme du plein jour [qui] déterminent des rêveries faciles et éphémères. On est en un instant "dans les nuages" et l'on revient sur terre doucement raillé par les hommes positifs, la rêverie des nuages est une rêverie sans responsabilité...»

 

Du nuage, synonyme des rêves, instants hors du concret, au nuage support de virtuel et d'interactivité, il y a une passerelle quasi naturelle.

 

Pourquoi avoir choisi une métaphore ambivalente? Parce qu'à l'instar de la pomme défendue/objet de connaissance, le nuage est aussi radioactif, menaçant (en attestent les propositions de Google autour du terme: radioactif, France, Japon, tandis que «cloud» renvoie sur Google France a «cloud computing»)...

 

Dans cette réversibilité du symbole s'ancre la puissance potentielle de la marque et à n'en pas douter une tendance lourde à venir. Avis aux poètes de la marque, cloud.eu est mis en vente par son propriétaire...

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