Des diverses prises de parole des agences et des consultants en communication auxquelles on a pu assister lors du récent Adforum Summit, qui s'est tenu à Londres du 13 au 15 avril, on peut dégager trois thèmes.
1. La télévision reste la référence pour lancer une marque. Du côté de «l'infiniment grand», une confiance renouvelée dans le média télévision par les acteurs «historiques» du marché: Martin Sorrell, CEO de WPP, Ulrich Proeschel, «brand director» de TBWA Europe et Ben Fenell, CEO de BBH. Avec une croissance de 1,6% des investissements publicitaires mondiaux en 2010, selon Zenith-Optimedia, la dynamique de ce média est alimentée par les marchés émergents (Bric, pour Brésil, Russie, Inde et Chine) et la relative stabilité des marchés matures, dans lesquels l'offre de TV numérique est régénérante.
Au risque de contrer ceux qui annoncent la fin de ce média au bénéfice des réseaux sociaux, aucune alternative ne semble avoir été trouvée pour créer rapidement de la notoriété et de l'image, lancer des marques ou encore procurer des sujets de conversation… pour les réseaux sociaux.
2. Le mobile est le support e-commerce de demain. Concernant «l'infiniment petit», le téléphone mobile est l'étoile montante qui transformera à nouveau les pratiques du métier de la communication. Comme exposé par Tom Acland, «managing director» de Razorfish, la technologie «Near Field Communication», en cours de déploiement sur les nouveaux smartphones, permettra sous peu le développement du mode de paiement intégré. Les banques sont actuellement en phase de développement de ces applications. Ces dernières encourageront de nouvelles pratiques pour les professionnels du marketing.
À cause ou grâce au mobile, l'e-commerce va connaître de substantielles évolutions. Un exposé du fondateur de la société de conseil Darren Knight, spécialisée en «f-commerce» (e-commerce sur les réseaux sociaux), a mis en avant quelques tendances phares de l'e-commerce pour 2011: le commerce sur les mobiles, une intégration majeure en et hors ligne, le développement du tracking du ROI [retour sur investissement] sur les réseaux sociaux, la montée en puissance des achats groupés (Groupon) et de l'usage de la vidéo dans les techniques d'e-commerce (par exemple, Asos utilisant You Tube pour présenter ses collections).
3. Vers une nouvelle typologie médias au standard anglo-saxon. Au fur et à mesure que les technologies numériques prennent le pas sur les analogiques, la complexité s'accroît: le rythme effréné des évolutions contribue à brouiller la perception du paysage médias. Les différentes agences que nous avons rencontrées ont, chacune, contribué à mieux cartographier le paysage médias et à identifier comment chacun des canaux de communication pouvait être utilisé au mieux pour servir les stratégies des annonceurs.
Dans l'objectif de simplifier l'appréhension de cette complexité, en donnant des points de repères aux annonceurs, un consensus pour segmenter le panorama médias semble faire l'unanimité auprès des professionnels que nous avons rencontrés. Médias achetés, médias propriétaires, médias gagnés: cette typologie du paysage semble désormais un standard du marché anglo-saxon.
Cette modélisation permet aux agences de créer des points de repère pour mieux se positionner sur le marché et permettre à leurs clients de mettre en œuvre des stratégies différenciées:
- Le «paid media». Les médias achetés (télévision, presse, radio, cinéma, affichage, bannières Internet, etc.) sont clairement positionnés comme des vecteurs de notoriété et d'image.
- Le «owned media». Les médias propriétaires (site e-commerce des marques, réseau de distribution) s'occupent de la relation avec la marque.
- Le «earned media». Les médias gagnés (réseaux sociaux, tel Facebook, ou relations presse et blogueurs) sont intégrés dans les stratégies de communication pour construire une conversation entre les marques et les consommateurs, en utilisant le principe du bouche-à-oreille.
Dans une société de consommation où tous les produits et offres de service tendent à se ressembler, les annonceurs doivent désormais construire des «plates-formes» composées d'un mélange d'actions impliquant les trois typologies de médias. Cette démarche permettra également de mieux valoriser toutes les parties prenantes chez l'annonceur ayant un impact sur l'image, les réseaux de distribution en particulier.
L'approche anglo-saxonne nous semble très intéressante dans la mesure où elle simplifie une offre médias pléthorique, source de confusion pour les clients. Le marché de la communication dans sa globalité a tout à gagner à disposer d'une méthode qui fasse référence et permette de simplifier l'appropriation des concepts par les annonceurs.
Deux questions restent alors posées: le marché français adoptera-t-il cette segmentation? Si oui, comment les agences de communication et les «pure players», qui n'ont de cesse d'élargir leur champ de compétences, vont-ils se positionner dans cette nouvelle cartographie?