Synthèse de Bernard Petit, président de VT Scan
Nous sommes dans un contexte de post-crise où les consommateurs attendent des marques « value et values » c'est-à-dire :
- Plus que jamais à la capacité de délivrer de l'utilité et de la « value for money », en tenant strictement les promesses qu'elles ont faites sur leurs offres commerciales (gare à celui qui a triché, la sanction sur les media sociaux sera immédiate)
- mais aussi de prouver qu'elles sont là pour autre chose que faire des bénéfices, en faisant des choses concrètes pour améliorer leur vie/la planète . D'où le formidable succès des offres promotionnelles avec un plus « Charity » ( ex Pampers et la vaccination gratuite des bébés en Afrique pour chaque paquet de couche acheté.). D'où le sérieux apporté par tous les grands annonceurs à leur politique de développement durable, qui peut devenir un plus compétitif. « Sustainability is no longer a charity, it's a business driver ».
En parallèle, Les annonceurs prennent de plus en plus en compte la nécessité impérative de s'adresser à la « Génération C », (C comme « connected » ) qui sont les 15-25 aujourd'hui, qui passent plus de temps avec leur pairs sur le net ou leur mobile) qu' à consommer des medias.
Ceci les conduit à favoriser la recherche d'un comportement positif plus qu'une attitude positive envers les marques, comportement qui sera relayé et amplifié par les media sociaux ( Facebook, Twitter, etc) et donc à d'adresser à des agences capables de créer des « expériences consommateurs très positives » avec les marques et moins des images positives des marques. Le lieu de ces expériences est double : réel au point de vente et virtuel sur le web, d'où le fort développement des agences digitales , les R/GA, Sapient -NItro, Digitas, Publicis Modem, Huge, pour citer celles que nous avons rencontrées , mais aussi des agences de « shopper marketing » telles Saatchi X. ou Creative Realities.
Les priorités des agences :
A. Les talents :la chasse aux talents est forcenée et certaines agences n'hésitent pas à créer des agences ou les talents veulent vivre et pas forcément là ou sont les clients
- Ex : Crispin Porter+ Bogusky à Miami (la mer) ou Boulder Colorado (la montagne), en n'ayant dans les centres urbains que des équioes commerciales
- Ex : R/GA qui a ouvert a San Francisco car certains spécialistes digitaux pointus veulent vivre à S-F , pas à Los Angeles.
B. Les « BRIC »:toutes les acquisitions et les priorités d'investissement se font dans ces 5 pays (Brésil, Russie, Inde, Chine) , bien loin devant les USA et la « vieille Europe ». La démonstration d'Ogilvy organisant une Video conférence simultanée avec les top mananers de ces 4 pays lors d'un petit déjeuner a impressionné les consultants.
C. Des holdings plus souples/ créatives : loin du système d'acquisition par « earn out » généralisé par Interpublic et WPP depuis les années 90, qui conduisait les dirigeants de sociétés achetées à forcer sur la profitabilité a court terme avant de partir, les nouvelles holdings, telles MDC Partners Canada/USA) ou encore Engine ( UK /USA) laissent les managers aux commandes pour pousser leur marques, tout en leur apportant des services ( financiers , conseil) et en favorisant les échanges et la coopération entre les sociétés, au service du développement commun de la holding dont ils sont tous actionnaires.
D. Le digital à tout va
• Aujourd'hui la plus grande agence de Manhattan n'est plus McCann ou Grey ou Ogilvy, toutes autour de 500 personnes, mais R/GA (760 personnes a New-York),l'agence digitale de Bob Greenberg créée voici 33 ans et votée agence de la décade par Adweek, et seconde agence de la décade par AdAGe, après CP+B .
• Aujourd'hui les holdings n'hésitent pas à empiler les agences digitales (Publicis avec Digitas, Modem, Razorfish et peut être bientôt AKQA.., Interpublic avec R/GA et Huge, au prix d'une certaine confusion entre les positionnements respectifs.
Deux raisons majeures à cela : l'importance qu'accordent les analystes au % du business de la holding en « digital » ( la source de croissance n°1 avec le % de business réalisé dans les pays émergents) et puis laisser jouer une concurrence acharnée entre les agences, notamment pour attirer les talents.
• La première semaine d'octobre 2010, au cours du Summit, nous avons visité 18 agences dont 9 étaient digitales.... (Modem, Sapient, Digitas, Huge, R/GA Creative Realities, Skinny , Spies& Assassins). Rien que cet agenda est significatif.
E. Le nouveau Modèle Intégré d'agence
• Toutes les agences généralistes rencontrées (Y&R, Arnold, Grey, Saatchi, Euro-RSCG) nous ont déclaré vouloir mettre le digital au cœur ou avoir mis tous les créatifs ensemble, sans silos ni barrières.
• Le problème est plus complexe et il nous semble que les meilleures agences digitales ayant intégré des créatifs de nature publicitaire comprennent mieux que les structures mentales de la création de message ( publicitaire) et de la création de plateformes ( le digital) sont fondamentalement différentes ( cerveau droit contre cerveau gauche, imagination et flou contre rigueur et systèmes ...) . Seules les agences de l'ére digitale , d'origine publicitaire ou digitale , mais ayant su décloisonner et faire fonctionner ensemble ces équipes ( process) vont vraiment percer. Le problème est complexe.
F. La Productivité Partagée
L'approche des agences sur mesure de WPP pour un client donné (ex Team Detroit pour Ford) ou le triple modèle de CHI selon les besoins de ses clients (The Box, the new Full service and Big Small) prouvent que la réflexion et le travail concerté client/annonceur sur les structures d'agences, mené par des managers très expérimentés ayant décidé d'aboutir ensemble, dans un esprit de collaboration permet des gains de couts de l'ordre de 30-40% pour les clients tout en améliorant la profitabilité de l'agence. Win -Win et adapté à l'époque...
Bernard Petit -VT Scan-25 octobre 2010
Synthèse de Florence Garnier, directrice associée de Marketing Efficiency/Cost Limited
A l'heure où la situation économique mondiale semble se redresser, l'Ad Forum Summit de New York a permis d'effectuer un état des lieux des tendances de marché et des agences.
Deux points saillants ressortent : le retour affiché de la créativité dans sa version audiovisuelle ou numérique, comme effet de levier sur la performance, et la mise en place dans les agences, d'initiatives organisationnelles permettant aux annonceurs de faire des économies.
1/ Les « holding companies » cherchent à redonner de la valeur ajoutée à leur offre.
La créativité comme moteur de performance, le renforcement du lien entre planning stratégique et management des données ainsi que le développement dans les BRICS sont les principaux leviers mis en avant par les holdings companies (WPP, Publicis, Havas ).
Les agences des holdings assistent à la croissance ininterrompue des agences digitales pure player, portées par la croissance des médias numériques mondiaux.
2/ Les agences nées du monde numérique, positionnées comme des « creative engineers » connaissent une croissance sans égal
Créée il y a de cela 33 ans sur la base d'une plate forme de production cinématographique, l'agence R/GA, membre de la holding Interpublic, est aujourd'hui un des chefs de file de la création numérique. Comptant parmi ses clients des marques prestigieuses telles que Nike ou encore L'Oréal, et bien d'autres, l'agence affiche des taux de croissance de 40% annuels, pour compter aujourd'hui 940 employés répartis dans 7 bureaux et une plate forme de production en Roumanie. L'agence est une des références du marché, car elle a compris que la communication du 21ème siècle ne peut pas s'articuler autour de campagnes qui racontent des « histoires » sur les marques, mais doit au contraire s'articuler autour de plate formes pérennes pour les clients et les prospects, dont on mesure le succès au fil du temps et du nombre de souscripteurs, qui adhèrent au concept sur la base de l'utilité, l'égal de ce que l'agence développé pour Nike avec les Nike ID, puis « The human race ».L'agence réussit se maintenir au plus haut niveau d'innovation et de performance en développant des modèles d'organisation intégrés où les techniciens et les profils plus créatifs collaborent étroitement
Surfant dans le sillage de son cousin R/GA et faisant partie de la même holding Interpublic, l'agence HUGE, affiche également un portefeuille de clients prestigieux (Saab, GE Capital , Gemey, Maybelline, Mastercard...) en mettant son talent au service de fonctions plus orientées e -commerce que R/GA. L'agence connait également une très forte croissance et ouvre des bureaux l'international dans les endroits au plus fort potentiel, se qui lui permettra de se déployer l'international sans démultiplier les filiales.
Positionnée sur le retail marketing à forte valence technologique, et forte d'un succès commercial sans égal depuis 4 ans avec un taux de croissance de 30% , l'agence de marketing services Sapient Nitro, fruit de la fusion de l'agence digitale Sapient et de l'agence créative Nitro, affiche de prestigieux gains de budgets : Nike Id, Unilever, Coca Cola, Wall Street journal.
Son positionnement original « creative engineers » la conduit à proposer à ses clients des dispositifs originaux, en usant de la technologie pour créer du lien avec les consommateurs au bénéfice des marques, l'égal de l'initiative « snickerpedia » pour Foot Locker, un site qui permet aux fanatiques de chaussures de sport de compléter leur collection et de partager leur passion avec d'autres internautes.
Poids lourd du secteur, l'agence DIGITAS, originaire du marketing direct, et partie intégrante du réseau Publicis depuis son rachat en 2006, compte aujourd'hui 3200 employés dans le monde et poursuit sa croissance exponentielle. Comptant 24 bureaux dans le monde, Digitas s'appuie sur ses marchés majeurs que sont : les USA, la France (avec la transformation de Business Interactive en Digitas, qui connait aujourd'hui un changement de direction générale avec le départ de Stéphane Amis pour Fullsix), et le UK.
L'agence décrypté les 5 tendances, qui selon elle, transfigurent le comportement des consommateurs :
a) La pertinence prend le pas sur la notoriété
b) Le développement des applications qui permettent de mettre à disposition un grand nombre de services sans effort et quel que soit l'endroit
c) La montée en puissance de la quête de sens
d) La nécessaire prise en compte du droit de réponse, des marques, qui utilisent les réseaux sociaux pour écouter mais pas toujours pour s'exprimer.
e) Le paradoxe du temps pour les consommateurs, qui veulent à la fois aller toujours plus vite en ce qui concerne la technologie et freiner le passage du temps avec le recours frénétique à la chirurgie esthétique.
Le rôle des agences doit alors évoluer pour :
- Construire des marques actives
- Donner du sens et de l'utilité aux consommateurs
- Créer des expériences et pas des publicités
- Impliquer les consommateurs pour qu'ils participent
- Opérer dans l'instantanéité
- Faire en sorte que les marques gardent leur jeunesse.
Autant de principes qui vont avoir une lourde conséquence sur la façon dont les clients choisissent leurs agences, la fourniture de données consommateur faisant désormais partie des briefs...
III/ La technologie et la pression sur les coûts conduit les agences à proposer de nouvelles organisations, moins onéreuses pour les clients ...
La crise que nous venons de traverser à fait prendre conscience aux agences de la nécessité de changer leurs modes de fonctionnement pour offrir aux clients des modes d'organisation plus flexibles, plus efficaces et moins coûteux. Une réunion avec les acheteurs (strategic sourcing procurement) de PFIZER, NOKIA, et GOLDMAN SACHS à permis de clarifier les attentes des Directions des achats vis-à-vis des agences et des consultants. En termes de rémunération des agences, le modèle de paiement aux résultats à été salué comme une des voies de progrès continu entre les clients et les agences.
Concernant la production, le « decoupling » (maîtrise par le client des achats de second rang au sein des agences) a été plébiscité par les acheteurs comme un modèle pérenne visant à optimiser les flux sur le moyen terme, et pas uniquement dans une optique de réduction des coûts à court terme.
Sans préjuger de la pression des services achats, certaines agences anticipent les besoins des clients, ainsi, la holding de WPP, a exposé les différents modèles d'équipes multi disciplines constitués partir de différentes agences (JWT, Y&R, Wunderman,Ogilvy,Mindshare) pour servir un client donné. Le cas emblématique de cette organisation est « Team Detroit » une équipe pluri disciplinaire de 1300 personnes au service de FORD dans le monde. Cette initiative a ensuite été dupliquée pour Kimberly Clark, et consent aux clients de gagner en cohérence, rapidité et coût en supprimant les superpositions de fonctions commerciales, et ainsi les conflits d'intérêt. De son côté, le client doit prendre l'engagement de dédier un pilote senior pour le projet.
La holding créative de Crispin Potter, MDC, qui compte la sixième position mondiale, adapte elle aussi son offre aux clients, en constituant des équipes multi talents au sein de sa holding de 50 agences, dont 45% du chiffres d'affaires est numérique.la particularité de cette holding, qui connait une croissance sans égal, est de préserver la culture créative et le talent des agences du groupe en ne prenant que 50% des parts de ses agences, et en faisant en sorte de conserver les fondateurs pour maintenir l'esprit entrepreneurial.
Avec une logique de fonctionnement bien différente, WPP vient d'accueillir récemment en son sein la hot shop créative londonienne CHI, créée par John Hornby. L'accord passé entre WPP et l'agence permettra de développer une plate forme d'offre composite, adaptable aux besoins et aux contraintes financières des annonceurs : the box, une offre low cost initialement conçue pour réduire les coûts de développement des documents commerciaux du réseau de la Royal Bank of Scotland lors de la crise financière, une offre mixte intégrant la création et les médias avec un modèle de rémunération spécifique MCHI, et enfin une offre plus traditionnelle. L'agence entend mettre ces offres à la disposition des clients à l'international, comme c'est le cas pour Best Buy par exemple, en usant des capacités de déploiement du groupe WPP, et en particulier en s'adossant à Ogilvy.
Au fil des échanges avec les agences, de nouvelles initiatives permettant également d'optimiser les processus de production ont été évoqués :
- Grey a recruté aux USA un réalisateur à plein temps afin de produire en interne à des coûts plus bas et d'obtenir une « patte » artistique homogène au sein de l'agence.
- Sapient Nitro, produit tous les supports en une seule fois sur le même set : vidéos, photos...permettant ainsi de faire de substantielles économies.
- Y&R sous traite la production de tous les supports auprès d'une entité avec laquelle elle dispose d'une joint venture : HOGARTH.
- Saatchi et Saatchi a crée un studio internalisé et dirigé par un réalisateur salarié pour son entité de dessins animés dédiée aux enfants.
En synthèse, ce séminaire à permis de prendre conscience de la poursuite de la mutation des métiers de la communication, qui visent désormais à créer des liens de sens entre les consommateurs et les marques, en usant des technologies et au plus juste coût. La prochaine révolution ? Le mobile a été cité à de nombreuses reprises car il sera le support qui permettra aux marketeurs des marques internationales de pénétrer les marchés à forte croissance BRIC...
Florence Garnier-Marketing Efficiency/ Cost Limited 15 octobre 2010
Les CEO présents à l'AdForum
Miles Young,CEO OgilvyWW-David Droga,CEO Droga 5-Jim Heekin,CEO Grey WW-Hamish Mac Lennan,CEO Y&R- Richard Pinder,CEO Publicis WW-Gaston Legoburu, ED&CCO Sapient Nitro-John Hornby,CEO CHI and Partners- David Jones, CEO EuroRSCG WW-Satish Korde, Global Client Director WPP- Mary Baglivo,CEO USA Saatchi&Saatchi-Miles Nadal, CEO MDC Partners-Andrew Bennett,CEO Arnold Worldwide-Paul Price, CEO Creative Realities-Aaron Shapiro, Partner Huge-Seth Solomons, CMO Digitas