«Action discrète-Frêche : le sketch de trop ?», «La Frêche Touch sera-t-elle fatale à Action discrète». A l'instar de metro.fr ou d'Agoravox, de nombreux articles en ligne s'interrogent sur le dernier happening d'Action discrète, sur Canal+. En cause : la mise en scène d'une série d'insultes à Montpellier formulées par de faux militants de Georges Frêche à l'encontre des communautés arabes, juives, handicapées et homosexuelles. Si le président du conseil régional du Languedoc-Roussillon n'a pas tardé à protester auprès du Conseil supérieur de l'audiovisuel, la plaisanterie n'a pas non plus été du goût d'associations locales. La Lesbian and Gay Pride et le Collectif contre l'homophobie de Montpellier ont déposé plainte contre Canal+. Quant à Thierry Nouvel, directeur général de l'Union nationale des associations de parents et amis de personnes handicapées, il évoque des «propos insultants» sur le site d'Arrêt sur images ou «ce qu'il y a de plus dégradant pour des personnes handicapées mentales», l'utilisation de mots comme «baveux» ou «gogolitos».
«Quand vous travaillez sur l'humour, il y a des victimes, réplique Yves Le Rolland, le producteur de l'émission à Arrêt sur images. Interrogé par Stratégies, Ara Aprikian, directeur des programmes de flux de Canal+, va plus loin : «Cela fait sept ans qu'Action discrète est à l'antenne. Je ne peux pas accepter une instrumentalisation qui consiste à laisser entendre qu'on défend les propos qu'on dénonce. Il s'agissait de démontrer par la provocation la banalisation d'un discours stigmatisant. Dans le discours public, il y a une forme de dérapage permanent quand on songe au propos de Georges Frêche sur la tête pas très catholique de Fabius. Lorsqu'on en vient à poser la question de savoir si l'humour va trop loin, j'y vois un danger pour la démocratie (…) Ou alors, il faut interdire Borat, Kazakh antisémite misogyne.» Mais l'humour doit-il pour autant s'exonérer d'un questionnement légitime ? La résurgence dans un vocabulaire médiatique des expressions antisémites «nez crochu» ou «youpin», même pour susciter des réactions, ne fait pas spécialement rire…
Richard Sénéjoux, chef du service TV de Télérama
«Un sketch assez glaçant»
Les opinions étaient partagées à Télérama. Pour certains, Action discrète a trouvé le ton juste afin de dénoncer les racismes ordinaires entrés dans le vocabulaire courant. Pour d'autres, l'équipe a pu agresser certaines personnes sans prendre de recul et sans se dévoiler à la fin. La question est de savoir si l'on peut tout faire au nom de l'humour. Personnellement, je ne suis pas sûr que le sketch, assez glaçant, soit de bon goût : il suscite à certains moments une espèce de rire au premier degré qui met mal à l'aise. Ceux qui connaissent Action discrète perçoivent la dérision, mais ceux qui n'en ont pas les codes peuvent se sentir agressés. Il aurait sans doute fallu mettre un peu plus de distance dans le commentaire.