«Ultracool, superpratique et très sexy, mais pas mieux.» La sentence, signée Samuel Axon, chroniqueur du site spécialisé Mashable, résume assez bien l'avis général de la blogosphère et plus généralement des «geeks» sur l'Ipad, la tablette Internet d'Apple présentée à San Francisco le 27 janvier par Steve Jobs, président du groupe américain.
Doté d'un écran de 24,6 cm de diagonale, cet ordinateur tactile ultraportable et multifonction (courrier, musique, vidéos, jeux, livres, journaux, etc.) ne fait guère l'unanimité parmi les initiés: «Ipad : du bon et du très mauvais» (Standblog), «No thanks» (Gizmodo.com), «I don't understand who this product is marketed for» (Bottom-up), «Apple invente le "device" pour vieux» (Blog.lefigaro.fr)…
Selon un sondage express mené par le site 01net.com auprès de ses internautes, seuls 12% d'entre eux voient en l'Ipad la tablette tant attendue, 36% le considèrent plutôt comme un gadget inutile, 10% comme un mauvais délire de Steve Jobs.
On est loin de l'appareil «vraiment magique et révolutionnaire» présenté par le patron d'Apple: pas d'appareil photo, toujours pas de ports de connection hors système Apple, pas d'applications simultanées, pas de support de Flash, etc.
Forte notoriété dès le lancement
À cet accueil mitigé au sein du microcosme high-tech, il faut ajouter la polémique sur la propriété de la marque Ipad: Fujitsu commercialise en effet depuis 2002 sous ce même nom un terminal destiné à la distribution. Ne parlons pas du buzz autour du sens équivoque de la nouvelle marque d'Apple: en anglais, «pad» signifie plaquette mais aussi serviette hygiénique.
Cependant, cette vague de scepticisme ne semble pas avoir atteint le grand public. L'énorme couverture médiatique mondiale du lancement de l'Ipad a fait son œuvre. La France n'y échappe pas.
Selon une étude GFK Custom Research, 48 heures après l'annonce officielle de son lancement, l'Ipad affichait une notoriété supérieure à 75% auprès des internautes français, accompagnée d'intentions d'achat proches de 80%. Cette notoriété ne concerne pas une cible spécifique de «technophiles», mais bien le grand public, assure l'institut.
Des données corroborées par une autre enquête, menée sur Internet le 28 janvier par Toluna Quick Surveys (http://fr.tolunapro.com) auprès de 1000 panélistes: 73% des Français déclarent avoir entendu parler du nouveau produit d'Apple. Parmi eux, 66% ont une opinion favorable de l'Ipad, 28% pensent que cette tablette à écran tactile est une révolution (plus d'un tiers chez les fans d'Apple) et 38% une évolution importante.
Toutefois, 16% la voient comme un gadget. Il est intéressant de noter que les produits d'Apple ne laissent pas indifférent, puisque seuls 13 % des personnes n'avaient pas encore d'avis.
La réputation de la marque Apple et de ses autres produits (Ipod, Iphone, etc.) ne sont pas étrangers à ces bons résultats, même s'il reste à convaincre les consommateurs de passer à l'acte d'achat. La commercialisation de l'Ipad est prévue fin mars au prix d'entrée de gamme de 499 dollars, la version «luxe» (64Go, Wi-Fi et 3G) atteignant 829 dollars. L'institut GFK prévoit entre 4 millions de tablettes Apple vendues dans le monde cette année, dont environ 10% en France.
Parole d'expert
Laurent-Yves Giloux, directeur du département presse et Web de Kantar Media
«En France, la couverture médiatique, Web compris, du lancement de l'Ipad a été concurrencée par d'autres actualités, plus nationales, comme l'intervention télévisée de Nicolas Sarkozy, l'affaire Proglio ou le film Océans. À noter que l'information est également retombée très vite, alors que le buzz avant le lancement avait fait grand bruit. Mais la grande réussite d'Apple est d'avoir «imposé» le terme «tablette» et l'idée d'un marché «à mi-chemin entre téléphone et ordinateur portable", largement reprise dans les médias. La couverture médias devrait reprendre sensiblement lors de la commercialisation de l'Ipad, l'expérience physique de l'objet sera l'occasion de nombreuses retombées. »