Les enfants et leur façon de penser ont toujours exercé sur moi une certaine fascination. Leur curiosité nous dépasse. Hier encore, après avoir demandé plusieurs fois à mon fils de 5 ans de finir son bol, je craque et hausse le ton. Sa réaction: « T’aimes pas être maman ? ». Déstabilisant. Cela peut paraître naïf, mais en fait, c’est du bon sens, rien que du bon sens. Derrière leurs questions spontanées se cache une volonté de donner du concret, de nommer ce qui les entoure. Ils voient la vie simplement, sans tous les biais sociaux qui parasitent nos sens en grandissant : les enfants sont en réalité, sans le savoir, des designers ! Et hypercréatifs en plus ! Bon à savoir, comme dit François Taddei, directeur du CRI (Centre de recherches interdisciplinaires), le pic de créativité est à 5 ans, et celui du questionnement à 4 ans ! Du coup, on pose un regard différent sur nos chérubins.
Se questionner sur l’essentiel, sans préjugé… on a du mal à oser en tant qu’adulte. On a peur de paraitre naïfs aux yeux des autres, on préfère jongler avec les mots technocrates, avec du jargon professionnel inaccessible aux non initiés. En tant que designer la recherche de sens, de « bon » sens et de simplicité est fondamentale. Car un bon design est utile & intuitif, il se passe de la notice. Il se comprend, se vit, on s’y attache… en toute simplicité.
Les enfants, champions du « sensé » et du « sensible »
Se questionner sur l’essentiel, sans préjugé… on a du mal à oser en tant qu’adulte. On a peur de paraître naïfs aux yeux des autres, on préfère jongler avec des mots technocrates, avec du jargon professionnel inaccessible aux non initiés. En tant que designer, la recherche de sens, de « bon » sens et de simplicité est fondamentale. Car un bon design est utile et intuitif, il se passe de la notice. Il se comprend, se vit, on s’y attache… en toute simplicité.
La véritable révolution, l’innovation de l’usage – Saint Graal du designer –, puise sa source dans « la bonne question ». C’est elle qui donne la direction au projet. Et les enfants sont de véritables champions pour aller à l’essentiel du sens et de l’utilité des choses. Preuve en est la révolution de la mobilité en cours qui prouve que le bon sens enfantin veut dire bon sens tout court. Depuis toujours les enfants clament : « Pourquoi il y a autant de voitures ? », « On voit plus les arbres ! »... C’est vrai, nos métropoles sont en train de s’étouffer, et mieux respirer en ville est le combat de tous les élus depuis quelques années.
À l’instar de l’enfant, questionner le pourquoi et le comment de ce qui nous entoure… Tout un art, peut-être même l’œuvre d’une vie. Picasso disait : « J’ai mis toute ma vie à savoir dessiner comme un enfant. » D’ailleurs, réfléchir à travers l’action est aussi l’une des spécialités du designer, dans laquelle les enfants excellent mieux que les adultes. En témoigne le Marshmallow Challenge où des groupes d’enfants du primaire « performent » particulièrement face aux adultes… car il se lancent dans le défi avec une joie d’explorer l’inconnu et n’ont pas peur de prendre des risques, de faire et de défaire.
Et comment parler de sens sans évoquer le sensible ? Les enfants peuvent pleinement participer à l’élaboration du sensible, qui nous touche quel que soit notre âge. À l’image du projet imaginé par Kinya Maruyama dans un jardin public à Nantes. Un lieu empreint de beauté et de poésie pensé pour et avec les enfants. Un voyage ludique même pour ceux qui ne sont plus en âge de se lancer dans le jeu lui-même.
Soyons professionnels, gardons une âme d’enfants !
Bonne nouvelle ! Les initiatives pour préserver ce questionnement de l’enfant fleurissent autour de nous. C’est le cas notamment de Brigitte Labbé qui parcourt le territoire à la rencontre des enfants pour leur parler… philosophie ! Elle défend l’idée que la mission de toute personne en contact avec des enfants est de leur apporter les outils pour développer leur esprit critique. Elle a créé les Goûters Philo, des livres pour ouvrir des débats avec les enfants. Une belle preuve que les enfants peuvent réfléchir sur des sujets complexes, ce qui laisse présager une future génération de brillants designers. Restons simples et sensibles, le projet de toute une vie.