Après celles de Nicolas Demorand à Libération et de Laurent Joffrin au Nouvel Observateur, la nomination définitive d'Érik Izraelewicz à la direction de la rédaction du Monde, jeudi 10 février, clôt une séquence importante dans la presse: trois nouveaux patrons de rédaction élus par les journalistes. Mais ce vote d'adhésion n'épuise pas la question de la légitimité.

Au Monde, la rédaction sera dirigée par un professionnel chevronné, 57 ans, un ancien de la maison qui a aussi fait ses preuves aux Échos et à La Tribune. Sa légitimité est incontestable. Elle lui sera fort utile pour travailler en binôme avec un manager, Louis Dreyfus, dans un contexte tendu.

Retour au bercail aussi, et légitimité également incontestable, pour Laurent Joffrin, 58 ans, au Nouvel Observateur, où l'ancien patron de Libération devient de surcroît président du directoire et, de fait, héritier de Claude Perdriel. En familier de la classe politique, en habitué des plateaux de télévision et des studios de radio, il est «the right man in the right place».

Le cas de Nicolas Demorand est plus problématique - et peut-être symptomatique de l'époque. Ni journaliste ni manager de formation, il va pourtant, à 39 ans, diriger la rédaction de Libération et coprésider l'entreprise. Le calcul d'Édouard de Rothschild, propriétaire de Libération, est risqué: choisir à l'extérieur une personnalité jeune susceptible d'incarner la «marque Libération» et de conquérir un lectorat à la fois de gauche et renouvelé, mais sans autre légitimité que médiatique, c'est faire passer la tête de gondole avant le journaliste. Est-ce vraiment la meilleure manière de toucher au but?

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