Le retail media représente une énorme opportunité pour les marques mais induit aussi une exploitation plus complexe, en matière de données particulièrement. Les agences ont leur rôle à jouer pour les aider à naviguer dans l'écosystème.
En France, le retail media a encore cru de 24% en 2023 selon le SRI, pour atteindre 1,1 milliard d’euros, et ce malgré une pénétration des ventes e-commerce qui restent relativement stables, entre 9 et 12% du retail français selon les années selon le Fevad. Notre baromètre annuel Publicis Commerce du e-retail media prévoit une augmentation des investissements pour 46% des industriels.
Dans un contexte économique tendu, ce levier présente des atouts qui séduisent l’ensemble du marché. Pour les retailers, c’est une manne extraordinaire, avec un résultat d’exploitation jusqu’à quatre fois supérieur à leur activité traditionnelle de vente de produits (McKinsey, State of Grocery Europe, 2023). Il est donc naturel de voir l’inventaire, les partenariats et les solutions se démultiplier. Pour les marques, la concurrence s’intensifie pour s’arroger la bonne part de linéaire digital et le retail media devient le levier de croissance principal sur les plateformes de commerce en ligne.
Mais cette croissance rapide conduit naturellement à une fragmentation et une complexité d’exploitation, a fortiori lorsqu’il s’agit de remonter le funnel marketing et mesurer l’impact réel de formats davantage « branding » sur l’activité de l’annonceur. Charge à nous, agences, d’aider les marques à naviguer dans l’écosystème.
L'IA en renfort
En premier lieu, l’accélération d’un pilotage full-funnel est à prévoir ; c’est-à-dire que la mesure via des KPIs davantage media (attention, brand lift/brand recall…) sera plus centrale dans les années à venir, là où le juge de paix du retail media était jusqu’ici essentiellement la génération de ventes à court termes, le fameux ROAS (return on ads spend). Le marché s’accorde sur les limites structurelles du ROAS, d’autant qu’il n’est pas calculé partout de la même façon. Publicis Commerce conduit à ce titre des initiatives avec les interprofessionnels du secteur (Alliance Digitale, Ilec) pour proposer des méthodes de calcul plus probantes, par exemple en étant plus strict sur la notion de fenêtre d’attribution ou en visant d’implémenter la notion de iROAS, visant à mesurer les ventes incrémentales générées grâce à la campagne. Derrière ces enjeux, il y a inévitablement une réflexion « outils » pour connecter entre eux des sets de données retail et media au départ silotés (stock, prix, part de linéaire, etc.) afin de piloter un media tourné vers la performance business, de plus en plus appuyé par des modèles prédictifs faisant appel à l’IA.
Le marché se structure avec des solutions SaaS internationales comme Profitero, Skai et Pacvue, mais aussi françaises comme Datagram et Mimbi.
Dans un contexte de disparation des cookies tiers, se trouve également renforcée la pertinence de la data first party des retailers pour un ciblage personnalisé et plus précis, basé sur des signaux retail, pour réactiver les audiences en dehors du site du retailer, en open web ou sur les plateformes sociales, voire TV connectée.
La démocratisation des DSP propres aux retailers et des data clean rooms (comme Amazon Marketing Cloud, dont Publicis Commerce est un des partenaires privilégiés pour son exploitation) favorise le partage de données dans un environnement safe, pour la marque et le consommateur.
Cette dynamique fait mécaniquement tomber une barrière forte aux investissements retail media : ce dernier n’est plus réservé aux industriels endémiques (dont les biens manufacturés sont distribués par le retailer en question) mais ouvre son inventaire à tout annonceur souhaitant exploiter une donnée déterministe, au plus proche de l’acte d’achat, doublée d’une adressabilité accrue par les programmes de fidélité comme Amazon Prime.
Se pose aussi la question suivante : quel est le bon niveau d’investissement ? En l’occurrence, chez Publicis Commerce, nous appréhendons et croisons plusieurs méthodologies (% des spendings digitales, % du business e-commerce, share of voice…). Mais la question devient encore plus complexe lorsque certaines verticales voient apparaître et se développer le retail media, malgré un héritage d’investissements historiquement orientés Coopération Commerciale (contrats commerciaux) : certains arbitrages sont alors nécessaires.
Des réflexions organisationnelles
Enfin, avec un parcours consommateur de plus en plus fragmenté, le retail media catalyse également des réflexions organisationnelles. Un récent rapport de Skai montre que 53% des organisations déplorent un manque de coordination et des silos internes limitant les opportunités de conversion et de brand building. Dans le même temps, les équipes de Profitero (la solution e-commerce analytics du groupe Publicis) ont interrogé des industriels de tout secteur, faisant ressortir deux notions intéressantes :
- Deux tiers des interrogés ont conduit des réorganisations internes pour adresser le sujet e-commerce, mais 41% d’entre eux n’ont pas encore de Joint business plan dédié au e-commerce lors de leurs discussions avec les distributeurs.
- Des enjeux structurels sur lesquels nous accompagnons nos clients.
À plus long terme, la fragmentation du parcours d’achat profite au retail media sur deux tendances de fond. En magasin physique, où les formats d’affichage se digitalisent pour créer une expérience plus immersive et personnalisée, qu’il sera possible d’acheter en programmatique. Mais aussi sur les plateformes sociales, qui concourent à réduire le parcours d’achat, et sur lesquels des partenariats sans précédent ont émergé, entre Amazon et Meta par exemple, pour permettre un checkout Amazon directement sur Instagram suite à une exposition publicitaire au sein de son feed.