Les responsables marketing ont un rôle clé à jouer dans les entreprises pour concilier croissance et sobriété énergétique.
Le marketeur et le marketing B2B peuvent-ils répondre aux injonctions paradoxales de la croissance et de la sobriété ? Nous sommes persuadés que oui. Pour cela, il convient de revenir aux fondamentaux du périmètre du marketing, au croisement des différentes fonctions de l’entreprise.
Après être un temps passé sous le radar, l’empreinte écologique de l’industrie du numérique est sous les feux de la rampe. On connaît les enjeux : le numérique représente 3,8% des gaz à effets de serre, 4,2% de la consommation de l’énergie primaire et 0,2% de la consommation d’eau au niveau mondial, selon GreenIT.fr. En France, c’est 16 millions de tonnes de CO2 et une trajectoire possible nous emmène vers 24 millions de tonnes équivalent carbone d’ici à 2040, d'après le Shift Project.
Ces chiffres ne sont pas alarmants. Dans ce contexte, les marketeurs de l’IT apparaissent comme une cible désignée de la promotion d’un secteur à la sobriété écologique discutable. Soumis à la double contrainte des impacts environnementaux (réchauffement climatique, ressources, biodiversité...) et de la croissance de son entreprise, le CMO doit répondre à cette injonction, mais comment ?
Les premières pistes sont simples et ouvertes par la communication : réduire l’empreinte carbone générée par la production de contenus. Sites web, vidéos, publicités, brochures…Tout doit être allégé et réduit au minimum en suivant les recommandations de l’AACC, de l’Ademe, du programme FAIRe de l’Union des marques ou tout autre référentiel propriétaire pour mesurer son empreinte et impact.
Un rôle d’objecteur de conscience
Pour faire bonne mesure, la réduction des goodies est une autre piste. Là, le CMO peut avoir un rôle d’objecteur de conscience et pratiquer le renoncement à lancer une nouvelle campagne, publicité, site web pesant ou goodies venus d’Orient. Pour concilier l’entre deux, entre renoncement et optimisation, il faudra sans doute attendre l’adoption massive d’un référentiel commun de mesure qui mettra tout le monde d’accord.
Dans l’intervalle, rien ne nous empêche de produire moins et mieux en travaillant finement la segmentation et le parcours client pour éviter le «carpet bombing» de contenu. Du quali plutôt que du quanti. C’est une première approche de la sobriété en phase avec une des préconisations de l’ISO 26000, la norme fondatrice du développement durable.
Revenons aux bases : de l’objection de conscience à l’évangélisation
Plutôt que renoncer, l’action du CMO passe par un retour à l’amont du produit ou service, de la conception à «l’éco-conception», la norme ISO 14006. Partir de l’usage «réel» des clients et du marché en s’appuyant sur les fameuses études cœurs de métiers (exploratoires, usages, focus groups...) pour nourrir la R&D d’un côté, mais aussi évangéliser les clients de l’autre en les amenant à réduire les besoins souvent imaginaires de personnalisation.
Il convient d'adopter une symétrie des attentions bien pensée pour optimiser l’expérience client et la réduction de l’empreinte numérique. Proposer de nouveaux serveurs construits avec des composants d’anciennes machines, ôter des fonctions inutilisées d’un logiciel, mutualiser la distribution de matériel ou réduire les stands sur les salons sont autant d’approches vertueuses, mais souvent à expliquer au client, au commercial et au distributeur pour en comprendre à la fois le bénéfice et la vertu.
L’externalité positive de la RSE : la créativité rigoureuse
Le CMO a un rôle à jouer en promouvant des actions ou des valeurs à ses différentes parties prenantes : renoncer à utiliser des composants de fournisseurs peu vertueux, réduire la chaîne logistique en imposant l’achat responsable, réduire l’obsolescence au profit de la durabilité, intégrer ses partenaires dans l’écosystème pour créer un continuum vertueux…
L’évangélisation pour la sobriété et la responsabilité se fait vers et pour toutes les parties prenantes, internes et externes, de la conception à la distribution, de la vente à l’éducation du client. En cristallisant toutes ses actions, en ajoutant les 3P (people, profit, planet) aux 4P, le CMO sera à même d’identifier de nouveaux modèles économiques pour créer de la valeur. Avec cette nouvelle focale posée sur le développement durable, le marketing est la fonction fédératrice et créatrice de l’entreprise.