Après les États généraux de l’information, une initiative est débattue au Sénat jeudi 17 octobre sur le renforcement de l’indépendance des médias et la protection des journalistes.

Respect du pluralisme, pouvoir de sanctions de l’Arcom, secret des sources… Le Sénat planche jeudi 17 octobre sur le renforcement de l’indépendance des médias et la protection des journalistes, une occasion de mesurer les ambitions du gouvernement sur les suites à donner aux États généraux de l’information.

La proposition de loi de la sénatrice socialiste Sylvie Robert, examinée dans la matinée à la chambre haute, balaye de nombreux sujets évoqués lors de ces États généraux (EGI), lancés il y a un an par le président de la République Emmanuel Macron et dont les conclusions ont été rendues début septembre. « Il faut absolument construire aujourd’hui un nouvel édifice législatif pour répondre à ce paysage médiatique qui s’est complètement transformé », insiste auprès de l’AFP l’auteure du texte.

Cette dernière a bon espoir de dégager une majorité au Sénat, pourtant dominé par une alliance entre la droite et les centristes, sur plusieurs de ses propositions, même si rien n’assure que le texte sera ensuite inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale. Mais « il fallait mettre à l’agenda du Sénat ces questions-là », assure-t-elle, espérant apporter une « contribution » au débat, alors que plusieurs initiatives parlementaires fleurissent, comme une proposition de loi macroniste déposée à l’Assemblée par Violette Spillebout (Renaissance) et Jérémie Patrier-Leitus (Horizons).

Plusieurs parlementaires s’attendent par ailleurs à voir la ministre de la Culture Rachida Dati mettre sur pied un texte « au premier semestre 2025 » reprenant les conclusions des EGI.

Divergences

Parmi les mesures consensuelles en passe d’être votées par le Sénat, le renforcement des chartes déontologiques dans les titres de presse écrite et audiovisuelle ou encore l’élargissement des bénéficiaires de la protection du secret des sources, notamment aux directeurs de publication.

Sur l’épineux dossier des droits voisins du droit d’auteur, qui permettent aux éditeurs ou aux agences de presse de se faire rémunérer lorsque leurs contenus sont réutilisés par les géants comme Google ou Facebook, le texte propose d’améliorer la transparence dans le dialogue entre plateformes et médias. Un dispositif de médiation de l’Autorité de la concurrence serait ainsi créé en cas de refus de la plateforme de transmettre des documents nécessaires à la négociation avec l’éditeur ou l’agence de presse.

Mais derrière ces propositions largement soutenues, l’examen de cette proposition de loi va raviver des clivages bien plus sensibles, notamment sur les pouvoirs de l’Arcom, le régulateur de l’audiovisuel qui n’a pas renouvelé la fréquence TNT de C8 et NRJ12 pour 2025. Le groupe socialiste propose ainsi d’élargir les exigences de pluralisme, conformément à un avis du Conseil d’Etat de février 2024 relatif à la chaîne CNews. Et étend les sanctions à la disposition du régulateur, activables dès lors que les chaînes recevraient deux ou trois mises en demeure selon les cas.

Droit d’agrément

« Cela donnerait à l’Arcom des droits exorbitants », s’insurge le sénateur LR Max Brisson, qui dénonce « une volonté cachée » par la gauche de « cibler le groupe Canal + » à travers ce « coup politique ». L’alliance LR-centristes devrait donc parvenir, en séance publique, à faire supprimer ces mesures. « Les dernières semaines ont montré que l’Arcom avait les moyens d’agir. Laissons faire les choses sans légiférer », insiste le centriste Michel Laugier.

La majorité sénatoriale entend également s’opposer frontalement à la mise en place, proposée par la gauche, d’un « droit d’agrément » des journalistes pour leur directeur de rédaction, permettant aux rédactions de s’opposer à certains profils. Une réaction, notamment, aux grèves de l’été 2023 au JDD contre l’arrivée comme directeur de Geoffroy Lejeune, marqué à l’extrême droite. « À ce rythme-là, il n’y aura plus aucun investisseur dans la presse écrite », s’insurge Michel Laugier, craignant une « entrave au droit d’entreprise » et rappelant que cette mesure n’a pas été retenue par le comité de pilotage des EGI. « Je ne suis pas dans un état d’esprit de défiance », se défend Sylvie Robert, « il y a au contraire nécessité que la confiance soit au rendez-vous dans les rédactions car tout le monde a à y gagner ».

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