Produit en quelques heures par l’intelligence artificielle, le magazine Now Futures explore les tendances et les anticipations à prévoir pour l’année 2024. Les explications de la consultante spécialisée sur les enjeux du numérique qui est derrière ce projet, Morgane Soulier.

Comment en êtes-vous arrivée à réaliser un magazine avec une IA générative ?

J’utilise ChatGPT au quotidien parce que je m’amuse avec, je le challenge et je rédige pas mal d’articles pour la presse. C’est vraiment un sujet qui me fascine ! Un matin, je me suis réveillée et je me suis dit : je vais jouer avec ChatGPT aujourd’hui et je vais lui demander de me donner sa vision de ce que pourrait être 2024, sachant que je venais tout juste de livrer un article qui évoquait les enjeux politiques à venir dans l’année. J’ai demandé à ChatGPT : « si je devais rédiger un magazine des grands enjeux de 2024, quelles sont les thématiques phares qu’il faudrait mettre dans ce magazine ? » Il m’a livré quelque chose d’assez standard avec de la politique, le climat, l’économie et les finances, les sciences et les technologies, la culture et la cuisine… Puis sujet par sujet, je l’ai challengé en lui demandant ce qu’il mettrait dans le magazine.

Que vaut le résultat ?

Dans les points positifs, factuellement, c’est hyperlisible et très clair sur les enjeux climatiques, sanitaires ou encore politiques. Pour les points négatifs, c’est assez creux car il n’a pas, encore, cette capacité à creuser et à aller plus loin.

Quel a été votre degré d’implication dans la rédaction du magazine ?

Je n’ai absolument rien écrit, le magazine Now Futures a été intégralement rédigé par ChatGPT. Il faut avoir en tête que je n’ai pas réalisé de modification sur les réponses générées. Je suis rentrée dans un jeu en essayant de voir ce que pourrait donner un livre 100% généré par l’intelligence générative. Ensuite, thématique par thématique, je suis allée sur Midjourney pour générer les illustrations. Pour le prompt, j’ai uniquement demandé : « quelles seront les tendances food 2024 », et je n’ai rien retouché. Mon premier prompt était « je veux rédiger un magazine », ensuite les prompts ont été rédigés dans le même corps que la demande, donc il avait intégré le fait que c'était pour le magazine.

J’ai envoyé le premier prompt un samedi matin puis j’ai terminé le dimanche soir. Mais en tout, j’ai mis à peine cinq heures pour faire 37 pages. Ce qui prend le plus de temps, c’est la réflexion pour le challenger.

J’ai dû intervenir sur la partie politique parce que, quand je lui ai demandé de me lister les grandes élections de 2024, il a présenté les élections de 70 pays sauf la Russie. Pour le challenger, je lui ai répondu : « tu ne me cites pas la Russie, pourquoi ? » Et ChatGPT a répondu : « Tu as raison. Si la Russie suit un calendrier électoral normal, effectivement la Russie devrait avoir des élections. » Je me suis dit qu’il y avait quelque chose de biaisé ou du moins d’interpelant avec cette réponse.

Quelle est votre position sur la place que l’IA peut prendre dans les médias ?

Je pense qu’il y a deux catégories de personnes : les technos optimistes et les technos pessimistes. Les technos pessimistes ont très peur et souhaitent interdire ChatGPT pour les dangers qu’il symbolise et les postes qu’il peut remplacer. En parallèle, les technos optimistes vont plus se positionner sur le gain de temps que l’IA apporte et tenter d’apprendre à l’utiliser.

Je suis davantage du côté optimiste pour une raison très claire : on n’a pas le choix. On peut avoir peur et trouver l’outil dangereux, sauf que l’évolution de l’IA ne risque pas de s’estomper. Je préfère me l’approprier, essayer de comprendre comment il fonctionne et l’utiliser à bon escient. Je pense que la révolution pour les médias sera considérable, notamment dans le milieu de la presse et dans la façon de rédiger des articles journalistiques. Il faut vraiment réussir à comprendre comment fonctionne au mieux cet outil plutôt que de l’ignorer.