La jeune start-up française Spliiit propose de partager le prix de ses abonnements avec des inconnus, à l’heure où se multiplient les hausses de tarifs et les passages au payant des partages de comptes dans les grandes plateformes.
Juillet 2023. Spotify augmente les tarifs de son abonnement premium. La hausse ne passe pas inaperçue, ni chez les utilisateurs, ni chez Spliiit… Cet acteur, né en 2019 et principalement connu par le bouche-à-oreille, propose à ses clients de partager le prix de leurs abonnements (plateformes de streaming audio, vidéo, presse, etc.). À chaque changement de ce type, elle observe donc un pic d’audience sur son site. « Ces deux dernières années, beaucoup de hausses de tarifs ont eu lieu, des gens se plaignent alors sur les réseaux sociaux ; en réponse, d’autres consommateurs leur font découvrir notre service », observe Guillaume Lochard, cofondateur.
Autre exemple, Netflix. En ayant rendu son partage de comptes payant, en mai dernier, la plateforme « affirme que le partage est inéluctable et qu’il vaut mieux le monétiser », dit-il. Et ce n’est pas le mouvement actuel du marché qui va le démentir. Le 1er novembre, Disney+, à son tour, rendra le partage de compte payant au Canada, avant a priori de le faire dans d’autres pays, dont la France. Sans compter, par ailleurs, que l’inflation conduit les consommateurs à vouloir faire des économies.
Spliiit référence aujourd’hui 220 services (la plateforme de sport de Decathlon, L’Equipe…). « Notre modèle est inspiré de Blablacar », raconte Guillaume Lochard. Le propriétaire de l’abonnement met à disposition des « places » vacantes sur celui-ci, l’entreprise trouve des « co-abonnés », assure la mise en relation, gère le paiement, non sans avoir vérifié la conformité de la demande.
Son modèle économique repose sur une commission prélevée chaque mois sur la transaction entre le co-abonné et le propriétaire (5 % + 50 centimes). Les éditeurs, eux, ne paient pas pour être référencés. Comptant aujourd’hui 865 000 inscrits, Spliiit souhaite désormais lancer une appli web et se développer en monnaies locales, au-delà de l’euro. En matière de communication, le bouche-à-oreille ne suffit pas et la start-up fait aussi de de la publicité via Google, Facebook et TikTok. Elle prospecte également les éditeurs pour les convaincre de ce qu’elle peut leur apporter : des utilisateurs plus fidèles, des audiences décuplées, l’extension du marché du payant, via l’accès à une cible qui ne se serait pas abonnée autrement.
En quatre ans, Guillaume Lochard, dont l’entreprise compte aujourd’hui 17 salariés, et qui a désormais moins besoin de rassurer sur la légalité ou la solidité de son offre face au piratage, a vu plusieurs changements s’opérer sur le marché. « On a observé une adoption des abonnements multi-utilisateurs chez les éditeurs. La France était en retard. Aujourd’hui, quasiment tous les éditeurs de presse proposent une telle offre », constate-t-il. Il note aussi qu’il existe moins de restrictions pour partager un compte obligatoirement au sein d’un foyer ou d’une famille et de plus en plus d’abonnements avec un partage sécurisé (sans partage d’identifiant). « Depuis deux ans, nous voyons aussi se développer le partage d’outils utilitaires tels que Microsoft 365, Canva ou Setapp », ajoute-t-il. De plus en plus de free-lances ont besoin de travailler à moindre coût.