RSF confie à une commission internationale l'élaboration d'une charte encadrant l'usage de l'IA par les médias. Les enjeux sont multiples : droit à l'information fiable, indépendance éditoriale... Les premiers retours sont attendus d'ici à la fin de l'année.
Face à l'essor de l'intelligence artificielle, « menace » pour « l'intégrité de l'information », Reporters sans frontières (RSF) a annoncé jeudi 27 juillet l'élaboration d'une charte encadrant son utilisation dans les médias, confiée à une commission internationale présidée par la journaliste philippine Maria Ressa, prix Nobel de la paix 2021 (photo).
L'IA va « radicalement transformer le monde du journalisme », prévient dans un communiqué l'organisation non gouvernementale internationale, fondée en 1985 à Montpellier (sud de la France), qui défend la liberté de la presse.
« Comment garantir le droit à une information fiable lorsque la majorité des textes et des images seront générés par IA ? Comment assurer l'indépendance éditoriale si des modèles de langage propriétaires sont utilisés par les rédactions pour suggérer, relire, voire rédiger des articles ? », s'interroge RSF.
Composée d'une vingtaine d'universitaires et professionnels du monde entier, la commission qui se penchera sur ses questions « livrera les résultats de ses travaux avant la fin de l'année 2023 », précise RSF. Lancée en partenariat avec une dizaine d'autres organisations, dont le Comité pour la protection des journalistes (CPJ), elle élaborera ainsi « un ensemble de principes, de droits et d'obligations » concernant l'usage de l'IA, dans un texte voué à devenir « une référence ».
« Protéger l'éthique du journalisme »
« Face à l'immense incitation économique à exploiter cette technologie pour gagner en productivité et en parts d'audience, aucun acteur n'est encouragé à adopter une démarche prudente et raisonnée » justifie RSF. Et ce même si, « partout dans le monde, des groupes médiatiques publient leurs propres déclarations de principes », selon l'ONG. « Nous avons besoin d'un engagement mondial fondé sur des principes solides pour protéger l'éthique du journalisme et mettre l'IA au service du droit à l'information », résume le secrétaire général de RSF, Christophe Deloire, cité dans le communiqué.
Le succès phénoménal de l'IA dite générative, c'est-à-dire capable de générer toutes sortes de textes ou images sur simple requête en langage courant, suscite beaucoup d'inquiétude chez les créateurs de contenus. Plus tôt en juillet, Google a annoncé mettre au point un nouvel outil d'IA censé aider les journalistes à écrire leurs articles, en partenariat avec plusieurs grands noms de la presse, dont le New York Times. Open AI, la start-up qui a créé ChatGPT, a aussi récemment passé des accords avec des organisations de presse. Elle a notamment obtenu la permission d'utiliser les archives de l'agence de presse américaine Associated Press (AP) depuis 1985.