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Les chiffres du SRI, dévoilés jeudi 2 février, témoignent d'une croissance ralentie en 2022 et de prévisions de progression limitée à 6% en 2023.

« Certains chiffres pourraient non pas inquiéter mais interpeller… ». Dès le départ, en cette matinée du 2 février au pavillon Wagram, à Paris, Sylvia Tassan Toffola, présidente du SRI (Syndicat des régies internet) donne le ton. Avec un gain de recettes de 10% en 2022, à 8,492 milliards d’euros, contre +25% en 2021, les acteurs du secteur ont en effet observé un net ralentissement de leur croissance. Avec un black Friday décevant, un contexte géopolitique incertain, des PME qui commencent à souffrir et une baisse de PIB observé de mois en mois, le second semestre s’avère même « compliqué » (+6%), selon Emmanuel Amiot, associé au sein du cabinet Oliver Wyman, qui a réalisé l’étude. « Le Q1 de 2023 ne va pas commencer de façon flamboyante », augure-t-il, même si « on peut penser que ce marché continuera à croître en 2024 et 2025 ». En 2023, le cabinet ne table plus que sur 6% de croissance.

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Dans le détail, le « social » - les réseaux sociaux - commence un peu à « patiner », à +10%, alors que sa croissance était de 26% en 2021. Une déception pour Meta, surtout si l’on sait que TikTok compte pour un tiers dans cette évolution. Emmanuel Amiot cite la prudence observée sur la brand safety, l’interrogation sur la performance des « short contents » et bien sûr l’impact de l’Apple ATT qui prévoit d’en finir avec les cookies tiers à la mi-2024 et aurait déjà coûté 18 milliards de dollars de revenus aux grands acteurs du social, selon une étude américaine.

Parallèlement, les annonceurs sont en attente d’outils de mesure plus fiables et avancés sur l’attention et la qualité de l’audience, mais aussi de formats de qualité qui puissent se combiner avec une couverture de masse, de prises de parole différenciantes en termes d’impact ou encore de stratégies multicanales et multiformats, incluant par exemple de la télévision de rattrapage (catch-up tv) ou linéaire.

Sur les autres grands segments, le search est en progression de 13%, à 3,698 milliards d’euros, devant le social donc (2,228 milliards), le display (1,662 milliard), à +9%, et l’affiliation et l’e-mailing  (905 millions), à +2%.

Un display soutenu par le retail et la tv-radio

Parmi les principaux enseignements de l’étude, on notera la bonne tenue dans le display du retail media (Fnac-Darty, Infinity, Le Bon coin, Carrefour Media…) en progression de 18,1%, pour atteindre 328 millions d’euros, alors que le streaming vidéo et musical (Youtube, Spotify, Deezer, Dailymotion…) est à +9,5% (et +0,8% au deuxième semestre), à 489 millions d’euros. A noter aussi, l'univers TV-radio, grâce à la TV segmentée ou la catchup, continue de croître de 18% (+9,6% au second semestre), à 260 millions d’euros, alors que le gros du marché, touchant à l’édition et l’information (presse) est à +2%, avec 584 millions d’euros (et même -5,6% sur le second semestre).

Concernant les formats du display, la vidéo (+11%) a toujours le vent en poupe grâce notamment à la TV connectée, alors que le classique (+6%) et les opérations spéciales (+3%) ont plutôt tendance à ralentir. A noter : la forte croissance de l'audio digital (+53%) grâce notamment aux podcasts de marque, à son intégration dans le programmatique et des capacités de ciblage renforcées. Ce média apparaît encore « sous-monétisé ». Dans l'audio, les régies généralistes (79%)  progressent plus encore que les plateformes de streaming (+69%) ou les régies des radios (+20%).

A 491 millions d'euros, le display natif est aussi en forte croissance (+31%) grâce sans doute à sa capacité à délivrer de la performance dans un contexte de programmation sûr puisqu'intégré au flot éditorial.

Par ailleurs, le SRI observe un net ralentissement du programmatique (+4%) au profit du gré à gré (21%). A tel point qu'il ne représente plus que 59% du marché contre 63% l'an dernier. « Les annonceurs veulent sécuriser les médias et les prix », note Thomas Jamet, président de l'Udecam.

Un search plus près de l'acte d'achat

Si le search, dans lequel domine Google, est aussi moins dynamique que l'an dernier, à +13% contre +28% en 2021, on constate que l'univers se consolide encore sur le mobile (74% du marché) et en laissant une part accrue au retail media (+30%), qui représente désormais un chiffre d'affaires de 887 millions d'euros.

Parmi les raisons avancées, citons la volonté d'avoir des leviers de performance au plus près de l'acte d'achat, une utilisation des données first party des retailers ou encore une montée en puissance de la vidéo.

1 point de moins sur le marché pour les géants

Au global, le social et le search représente 80% de la croissance du digital. Les deux tiers du marché vont aux trois géants que sont Google, Meta et Amazon. Soit 5,6 milliards d'euros à comparer aux 2,8 milliards d'une centaine d'acteurs. Mais pour la première fois, ce trio a un point de moins sur le marché digital, en raison en particulier du ralentissement de Meta. Quant à Netflix avec publicité, encore en phase de test, c'est pour l'instant un « flop », selon Emmanuel Amiot, en raison de l'absence de data et d'étude fiable.

Pour Sylvia Tassan Toffola, la priorité des investissements ira en 2023 aux environnements délivrant de la performance, un contexte fiable et de qualité ou encore une transparence accrue. Elle soulige une « capacité d'adaptation, de rebond » dont témoignent à la fois le retail, les acteurs médias capables de rivaliser avec le streaming ou les membres de l'Alliance digitale.

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