Après bientôt deux ans d’épidémie, la 15e édition de la Presse au Futur sera l’année du renouveau pour la profession. La crise sanitaire a-t-elle apporté des mutations dans ce secteur ?
Au sein de la profession, on voit que la presse a su tenir tête à la crise sanitaire. Beaucoup de lancements et de nouveaux formats sont apparus pendant cette période. L’épidémie a donné un certain dynamisme et un certain rebond. Pour les éditeurs de presse, il y a eu une réelle transformation digitale. Beaucoup d’entre eux ont dû faire face à cela. La presse locale a elle aussi été impactée mais elle a su communiquer pendant cette crise en générant un lien social et de confiance. Par rapport à la partie digitale que j’évoquais, il y a tous les abonnements numériques qui se sont développés, notamment liés à cette période d’épidémie. Avant que les lecteurs puissent retourner aux kiosques, le côté digital a pris une ampleur phénoménale et irréversible.
Vous nous précisez que les éditeurs de presse peuvent et doivent se diversifier dans le livre. Quels intérêts ont-ils à le faire ?
En dehors de la distribution et du numérique, disons que les éditeurs de presse et les éditeurs de livres sont historiquement cousins. Si vous regardez Le Figaro ou bien Bayard Presse, il y a une sorte d’économie d’échelle. Ce sont des services identiques de fabrication en interne qui assurent la sortie des journaux et qui peuvent assurer aussi la sortie de livres. C’est un débouché naturel sous forme de hors-séries qui peut tendre vers des livres. On parle beaucoup du digital, mais le papier reste quelque chose de matériel que l’on peut toucher. Lorsqu’il y a une belle couverture ou un beau papier dans un magazine, les lecteurs y sont assez sensibles. Finalement, les livres sont un bien que l’on peut garder et qui peut, par moment, faire plaisir. Cela permet aussi aux titres de presse de se démarquer et de marquer le coup justement par rapport aux lecteurs.
Les titres édités ne sont pas un simple support de lecture mais bien une marque, une source de monétisation. Pouvez-vous nous expliquer pourquoi ?
La presse elle-même se décline sur différents supports dorénavant (audio, vidéo, etc.). Il y a une certaine diversification au sein des éditeurs de presse et de manière générale au sein des médias. Entre la presse et le livre, une synergie s’installe. La presse n’est plus un seul support aujourd’hui mais devient multicanal. A une époque, par exemple, il y avait Fou de pâtisserie qui avait ouvert une boutique physique. Aujourd’hui la presse n’est plus juste quelque chose qu’on lit mais quelque chose qu’on vit. Il y a aussi de plus en plus une tendance qui tend vers le «content-to-commerce». Les sites de presse deviennent des plateformes qui mettent en avant une sélection de produits. Là-dessus les éditeurs touchent des commissions sur les ventes qu’ils génèrent. C’est un nouveau phénomène relativement récent depuis la pandémie. Par ailleurs, d’autres vont aller vers du brand content en proposant des services et des conseils aux annonceurs. Finalement, ils ont développé leur activité au-delà du support de presse.
Le podcast est-il une solution pour la presse ?
Une solution peut-être pas, mais je pense que ça fait partie de l’avenir de la presse car il la complète. On reste toujours dans une version digitale, mais c’est innovant, c’est un nouveau format. Les podcasts sont de plus en plus à la mode. Il y a une certaine utilité à se saisir de ce format. Si nous sommes dans le métro ou bien en voiture, on peut toujours l’écouter. Les médias eux-mêmes peuvent produire des podcasts, c’est une manière de se diversifier et encore une fois d’être une marque en tant qu’éditeur de presse.
Est-ce que vous sentez les éditeurs de presse inquiets par rapport au futur de la presse ?
Il y a quelques années on aurait pu penser que oui. Avec l’arrivée du digital, on a senti qu’il y avait une certaine dynamique qui commençait peut-être à s’essouffler un peu. Aujourd’hui, cette crise sanitaire a sûrement inquiété les gens mais elle a permis de prendre le temps de se poser certaines questions. Il y a un renouveau qui se fait. Pour moi, nous sommes dans une dynamique de nouveau positive. Maintenant, il est vrai que la presse rencontre certaines difficultés. Il y a eu des bouleversements, notamment avec la disparition de Presstalis et la création de France Messagerie. Ce sont des problématiques au cœur de la profession. Pendant la pandémie, les gens ont finalement beaucoup regardé ou lu les médias. Ça a aussi redonné une certaine importance à la presse. Et même s’il y a cette montée du digital, le papier la complète toujours. Il y a des informations que l’on va regarder sur un support numérique. Et d’autres, comme les études, où le support presse est plus adapté.