Le géant chinois du e-commerce Alibaba a relativisé lundi 12 avril les conséquences de son amende géante de 18,2 milliards de yuans (2,3 milliards d'euros) pour abus de position dominante, tandis que ses actions flambaient à la Bourse de Hong Kong, avec l'espoir qu'une page a été tournée. Alibaba, symbole en Chine de la réussite dans l'économie numérique, est depuis décembre sous enquête des autorités chinoises pour « suspicion de pratiques monopolistiques ».
Une amende record
Les régulateurs ont jugé samedi 10 avril que le groupe fondé par le charismatique milliardaire Jack Ma était en infraction et ont condamné l'entreprise à payer une lourde amende.
Alibaba s'est notamment vu reprocher d'exiger l'exclusivité des commerçants souhaitant vendre leurs produits sur ses plateformes, au détriment des sites de commerce en ligne concurrents. « Depuis 2015, le groupe Alibaba a abusé de sa position dominante sur le marché » pour obtenir un avantage injuste via l'exigence d'exclusivité, a déclaré le régulateur. Ce comportement a restreint la concurrence et l'innovation dans le secteur et a violé les droits et intérêts des entreprises et des consommateurs, a-t-il ajouté.
L'amende record représente près de trois fois le montant de près d'un milliard de dollars infligé à Qualcomm en 2015, selon Bloomberg.
« Nous acceptons sincèrement cette sanction et nous nous y conformerons fermement », a indiqué lors d'une conférence téléphonique le vice-président exécutif du groupe, Joe Tsai. « Nous avons bénéficié de conseils avisés [des régulateurs] sur certaines questions spécifiques relevant de la loi anti-monopole [...] Nous sommes heureux de pouvoir tourner la page », a précisé Joe Tsai. Le montant de l'amende représente 4% du chiffre d'affaires de 2019 d'Alibaba, qui était de 455,7 milliards de yuans (58,45 milliards d'euros), selon l'agence de presse Chine nouvelle.
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L'amende « n'aura pas de conséquences négatives » sur les affaires d'Alibaba, a assuré de son côté devant les investisseurs son PDG, Daniel Zhang. Le groupe a promis de baisser ses coûts de fonctionnement pour les commerçants présents sur ses plateformes. Des propos qui ont, semble-t-il, rassuré les investisseurs : l'action d'Alibaba a pris jusqu'à près de 9% lundi en matinée à la Bourse de Hong Kong, où le groupe est coté en plus de celle de New York.
Les mesures qu'Alibaba devra prendre pour se mettre en conformité avec les régulateurs « limiteront probablement la croissance de ses revenus et pèseront sur son bénéfice », estime dans une note l'agence de notation américaine Moody's.
Le milliardaire Jack Ma, qui a officiellement pris sa retraite d'Alibaba en 2019 mais en reste un gros actionnaire, est depuis quelques mois dans le collimateur des autorités.
Influence dans les médias
En novembre 2020, les régulateurs chinois ont stoppé in extremis une colossale introduction en Bourse à 34 milliards de dollars d'Ant Group, une filiale d'Alibaba dans les paiements en ligne.
Inquiet de son influence, Pékin aurait par ailleurs demandé au géant du commerce en ligne de céder des actifs dans le secteur des médias, a rapporté le mois dernier le Wall Street Journal (WSJ). Alibaba est notamment propriétaire depuis 2015 du South China Morning Post, à Hong Kong, qui édite les magazines Elle et Esquire.