L'investissement de France Télévisions dans le numérique commence à faire grincer des dents du côté des éditeurs de presse. «Que France Télévisions investisse dans le numérique dans la perspective de la TV connectée, c'est un élément indiscutable de sa stratégie, déclare à Stratégies le patron du groupe Le Monde, Louis Dreyfus. Mais qu'à partir de la redevance, ce groupe décide de monter un site d'information en continu avec des équipes venant de la presse en ligne – L'Express, Le Monde, 20 Minutes,etc. – et qui accueille de la publicité, il y a une forme de paradoxe à ce que l'argent public puisse servir à déséquilibrer les développements numériques des groupes de médias.»
Le débat n'est pas nouveau en Europe. Mi-2011, huit éditeurs de presse allemands ont porté plainte contre les applications de la chaîne publique ARD au motif d'une concurrence faussée du fait d'un financement public. La BBC ou la RTBF ont aussi été confrontés aux mêmes reproches. Pour l'heure, le président du Monde affirme qu'il n'est «pas dans une démarche contentieuse» et compte rencontrer Rémy Pflimlin, PDG de France Télévisions, pour faire valoir son point de vue: «Le paysage audiovisuel est constitué de sociétés toutes bénéficiaires, rappelle-t-il. Je ne comprends pas pourquoi le législateur accepterait qu'on mette en danger l'économie de nos sites.»
Plusieurs plates-formes en 2012
La polémique risque de monter en puissance à mesure que le groupe public se développe sur Internet. Pour l'heure, son investissement numérique est de 55 millions d'euros, mais il atteindra 125 millions en 2015, au terme de son contrat d'objectifs et de moyens (COM) signé le 22 novembre. France Télévisions a déjà lancé le site France TV Info, et annonce des plates-formes sur le sport et le spectacle vivant en 2012. Le montant des recettes publicitaires sur Internet est évalué à 7 millions d'euros. Bruno Patino, directeur général délégué en charge du numérique de France Télévisions, rappelle que les sites de presse, dont Le Monde, profitent du «player» de France TV Info. Pas sûr que cela suffise à tranquilliser ceux qui craignent que le groupe public voie ses recettes publicitaires diurnes baisser à la télévision et qu'il se rattrape sur Internet, où il n'est pas contingenté.
(Encadré)
Pierre Sled sur le départ
Le directeur des programmes de France 3 est sur le départ, comme attendu après l'arrivée de Thierry Langlois cet été pour reprendre en mains l'antenne. Il paie la chute d'audience de la chaîne et l'échec de programmes comme L'Étoffe des champions. Cyril Viguier, animateur de Vendredi sur un plateau, pourrait aussi quitter France 3.
