Plutôt que de modèle économique, mieux vaut parler, en l'espèce, de «business model». Lorsque le directeur général adjoint, Guillaume Dubois, fait visiter sa nouvelle radio-télé, BFM Business, à l'antenne depuis le 22 novembre, un détour par le studio s'impose.
D'un blanc immaculé, ledit studio trône à Issy-les Moulineaux, à deux pas du périphérique parisien, au cœur des équipes. Ses caméras sont pilotées par écran tactile et son mur d'images, à 300 000 euros pièce, représente 10% du surcoût de la station après son passage sur la TNT francilienne. «C'est un vrai studio et il nous vaut un bon retour, note Guillaume Dubois, sachant que nous avons une vingtaine d'invités par jour et des annonceurs captifs. Depuis un an et demi, nous faisons venir à 7h15 les patrons du CAC 40...»
À l'origine de la chaîne, l'arrêt de Bloomberg TV en France et le constat qu'il est aisé de produire de l'information économique en studio, la matière se prêtant peu au reportage. Une quinzaine de personnes sont donc recrutées pour transposer les émissions parlées – excepté le week-end – sur le petit écran. Une première. Quitte à jongler avec les contraintes comme lorsque la régie, constituée de deux à trois personnes (trois fois moins que pour BFM TV), envoie des écrans de publicité distincts pour la radio et la télévision, mais d'une durée identique, synchronisation des antennes oblige.
Pour les journalistes, habitués à un look «de radio», c'est aussi l'apprentissage du «physique de télé». La cravate s'y impose chez les hommes et le maquillage est laissé à la discrétion de chacun, BFM Business ayant fait l'économie de maquilleurs. Explication: «Nous avons un éclairage tel que l'on n'est pas obligé de se maquiller, affirme Guillaume Dubois. D'ailleurs, les patrons qui se sentent un peu comme au boulot ne le demandent pas.» À l'interne, certains considèrent pourtant qu'il faudrait un local pour se farder et que les invités jalousent parfois les grimages des journalistes…
Profiter de la présidentielle
Revendiquant 450 000 auditeurs ciblés, BFM Business veut doubler son chiffre d'affaires (10 millions d'euros) en trois ans en imposant ses deux prime times (TV et radio). Au second semestre, l'attention sera portée sur Internet et la mobilité, avec un nouveau site qui intégrera ensuite de l'information personnalisée.
Mais BFM, c'est aussi, et surtout, une chaîne d'info continue dont l'audience et les effectifs ne cessent de croître. BFM TV, qui touche près de 34 millions de téléspectateurs sur un mois accroît sa part d'audience (1,1%) et a multiplié par six son audience sur sa tranche matinale en trois ans. Entre 6 et 9heures, grâce à une autre émission de radio filmée (Bourdin&Co de RMC), la chaîne capte 192 300 téléspectateurs en moyenne... soit mieux qu'I-Télé, M6 ou Canal+ (Médiamétrie novembre-décembre 2010).
Quant aux salariés, ils sont passés en cinq ans de 70 à 240 personnes, avec des salaires qui se rapprochent du marché: «On a la réputation de mal payer les gens, mais, aujourd'hui, ce n'est plus vrai, lâche Guillaume Dubois, qui dirige aussi les rédactions de BFM TV et de BFM Business. Il n'y a aucun journaliste avec deux ans d'expérience à moins de 3 000 euros.»
Après s'être distingué lors des élections de 2007, en diffusant sans autorisation les débats des candidats aux primaires du Parti socialiste, la chaîne rêve de profiter de la présidentielle de 2012 pour s'imposer plus encore. En ce sens, l'émission d'Olivier Mazerolle a doublé en durée (deux heures) et le partenariat avec Dailymotion a été élargi au Point. Les candidats, eux, commenceront à s'affronter, avec un premier face-à-face Marine Le Pen/Jean-Luc Mélenchon, le 14 février. «On souhaite que 2012 soit l'année de la maturité et de la consécration», conclut Guillaume Dubois. L'équilibre de la chaîne est attendu fin 2011.