Bertrand Pecquerie, directeur du World Editors Forum, décrypte les stratégies des éditeurs sur l'Ipad.
Faut-il voir dans l'Ipad le sauveur de la presse?
Bertrand Pecquerie. C'est l'arbre qui cache la forêt. C'est un modèle de tablette à 500 ou 600 euros, mais il faut savoir que, dans dix-huit mois, il y en aura cinquante à 100 euros, fabriquée à Taïwan ou à Hong Kong. Le marché est donc en train de s'ouvrir considérablement tout en étant limité. En 2015, on estime à 15 ou 20% des revenus d'un quotidien la part venue de l'e-reader. Ce n'est donc pas un modèle de substitution qui va entraîner la fermeture des kiosquiers.
Les éditeurs ont-ils les mêmes stratégies sur l'Ipad?
B.P. Il y a deux écoles. La première joue sur l'aspect visuel, en partant du principe que c'est un support proche d'une feuille A4. C'est le modèle de Paris Match, où l'on table sur la duplication avec le papier. La deuxième est celle de l'agence AP et de France 24, où l'on met l'accent sur la personnalisation et l'échange. Chacun est en mesure de choisir son propre menu tout en profitant des capacités de stockage de photos et de vidéos plus intuitive d'Apple.
Y aura-t-il des désillusions?
B.P. Je ne crois pas à l'idée de répliquer son journal en faisant disparaître 40% des coûts liés à l'impression et à la distribution. Il y a un usage communautaire de l'Ipad à prendre en compte, via les réseaux sociaux, et en proposant un maximum de vidéos. L'Ipad est attendu comme le messie, mais très peu de journaux savent faire de l'image, qui coûte cher. Je conseille donc de créer non pas une, mais quinze applications Ipad. Et je crois à la reconquête de 18-24 ans via les tablettes et les e-readers.