Le discounter Aldi entame en 2022 avec sa nouvelle agence, TBWA, une autre phase de sa communication. Le but : faire venir les consommateurs en point de vente.
Et 1, et 2, et 3… Et trois. En matière de communication, le discounter Aldi France, qui a réalisé 233 millions d’investissements publicitaires bruts en 2021 selon Kantar, a connu différentes phases. Avant 2020, il est resté silencieux dans les médias ; c’est la phase 1. En 2020 et 2021, accompagnée par l’agence Ogilvy, ainsi que par Neo et HighCo, l’enseigne a eu pour objectif, en prenant la parole, de faire connaître sa marque et son concept (c’est la phase 2). Désormais et depuis février, avec TBWA, qui vers mi-2021 a remporté un appel d’offres face à plus de sept agences dont Ogilvy, finaliste, le distributeur attaque une nouvelle phase, plus offensive.
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« Maintenant que l’on nous connaît, nous souhaitons que tout le monde passe la porte de l’un de nos magasins », expose Aurélie Taude, directrice marketing et communication d’Aldi France, qui évoque un « gain de plus de 10 points de notre notoriété spontanée sur les 18 derniers mois ». Un tournant qui arrive après le rachat en 2020 et la transformation progressive d’au moins 450 magasins Leader Price. Un parc agrandi qui rend plus réaliste l’ambition, l’idée étant que chaque Français soit à « quinze minutes maximum » d’un point de vente. Et qui intervient alors que la marque grignote des parts de marché, établies à 2,8 % aujourd’hui selon Kantar, contre 2,4 % il y a un an.
En termes de cible, Aldi affirme ne pas viser seulement des consommateurs au pouvoir d’achat restreint mais « tous ceux qui ont un estomac. Les familles avec de jeunes enfants, les étudiants, les retraités », poursuit la manager, tandis que le panier moyen s’élève à 27 euros.
Foie gras dans le noir
Dans cette optique, la plateforme de marque évolue. Jusqu’à présent, Aldi proclamait, dans ses différentes communications, « Place au nouveau consommateur » : ce sont les clients et potentiels acheteurs qui avaient la parole, eux qui étaient mis en scène, par exemple, dans la perspective de Noël 2021, pour des dégustations à l’aveugle, dans le noir, de foie gras, de bûche ou de saumon fumé. Les films montraient leurs réactions, entre étonnement et surprise - positive, à la découverte de la marque des mets goûtés. Le fait que ce soit eux et non l’enseigne qui vantent les produits vise à donner du poids au propos. Autre exemple, une campagne TV orchestrée en 2021 avait été conçue autour d’avis de consommateurs publiés sur Twitter.
En réalité, le changement d’agence n’accompagne pas un tournant radical. L’entreprise d’origine allemande souhaite au contraire s’inscrire dans une certaine continuité. « Les consommateurs ne savent pas que l’engagement sur le prix ne se fait pas au détriment de la qualité. Nous remettons en perspective l’effort de qualité », explique Nicolas Simonnet, directeur général exécutif de TBWA. Par exemple, l’enseigne entame sa nouvelle communication autour de la viande qu’elle vend, 100 % d’origine française, ce qu’elle s’attache à proclamer sur un maximum de points de contact, sur son site, sur les réseaux sociaux, en magasin, etc. Au fil de l’année, elle mettra en avant son offre bio, ses fruits et légumes de saison livrés chaque jour en magasin ou encore ses produits labellisés, tout en valorisant sa gamme non alimentaire, représentant environ 10 % de ce qui se trouve en rayon.
« Ils assument »
Pour appuyer la démonstration, une nouvelle signature, basée sur le principe de la recommandation et qui a vocation, elle aussi, à prendre de l’ampleur, voit le jour, « Vous pouvez y aller ». Elle s'affiche comme une invitation à venir en point de vente pour les prix mais aussi des produits responsables, français, au bon rapport qualité-prix. « L’objectif est d’installer Aldi non comme un recours mais comme une solution aux évolutions profondes de changement de rapport à la consommation », résume Aurélie Taude, dont le budget en matière de communication serait resté similaire.
« C’est une tendance de fond dans la distribution. Ne parler que du prix ne fonctionne plus car les gens cherchent la qualité, analyse Frank Rosenthal, fondateur de Frank Rosenthal Conseils, expert en marketing du commerce. Chez U, on associe les prix bas à des valeurs fortes, comme en témoignent les nouveaux films d’Australie.GAD ». On pense aussi à Intermarché, attaché à la promotion des producteurs commerçants.
De fait, c’est plutôt sur un autre plan qu’Aldi se différencie. « Ils assument d’être un discounter contrairement à Lidl - de surcroît premier annonceur français, tous secteurs confondus - qui veut être un ''supermarché'' », assure l’expert. Autrement dit, ils revendiquent le fait de vendre des marques propres, un nombre réduit de références, une par besoin ou usage. « Les Leader Price transformés en Aldi sont modernes mais efficaces. Les nouveaux magasins Lidl sont très beaux. Ils jouent dans la catégorie U et Intermarché, contrairement à Aldi », complète Frank Rosenthal, qui se dit globalement positif sur leur communication : « elle reflète ce qu’ils sont, il n’existe pas de décalage entre ce qu’elle dit et ce qu’on va retrouver en magasin ». Les points faibles d'Aldi, tout comme ses forces, sont inhérents au modèle (largeur de l’offre, manque de choix…). Assumés, là encore ?
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Chiffres clés
9000 Nombre de collaborateurs Aldi France
1300 Nombre de magasins dans l’Hexagone
Ruée vers l’esport
En parallèle de sa communication traditionnelle, Aldi France est aussi, depuis 2021, présent dans l’esport, via des partenariats avec les équipes Solary et Vitality et avec la LFL, la ligue française du jeu League of Legends. Il a décidé en 2022 de renforcer sa présence dans cet univers en créant sa propre équipe. Composée de joueurs amateurs, encadrée par deux ambassadeurs de l’enseigne, les streamers @Rasmelthor et @Lutti, celle-ci bénéficiera jusqu’à la fin de l’année d’un accompagnement « logistique et diététique » dans sa découverte du monde professionnel. Des tournois de qualification se tiendront en avril pour sélectionner les trois gagnants. Son nom ? Continuity. Là aussi, de la nouveauté, mais pas un tournant…