Consommation 

Après les dizaines de milliards d'euros dépensés pour atténuer la crise énergétique, le gouvernement fait face à une inflation alimentaire qui lui offre peu de marges de manœuvre. 

Comprimer les marges des distributeurs et allouer un chèque alimentaire aux plus modestes, comme l'a annoncé lundi le gouvernement ? Réduire la TVA sur des produits de première nécessité ou bloquer les prix, comme le préconisent d'autres ? Depuis des mois, l'exécutif réfléchit au mécanisme qui permettrait de contenir le plus efficacement le prix de paniers de courses de plus en plus chers sous l'effet d'une inflation qui a atteint 14,5 % en février sur un an dans l'alimentation, désormais son premier moteur devant l'énergie. « Il n'y a pas de solution magique », prévient Ludovic Subran, chef économiste du groupe Allianz. 

Alors que des mesures de soutien publiques, comme le bouclier tarifaire, avaient rapidement permis une protection parmi les plus étendues en Europe face à l'envolée du gaz et de l'électricité, la tâche s'avère bien plus « compliquée » pour l'alimentation, explique-t-il. Car il n'y a pas de tarifs réglementés dans ce secteur « beaucoup plus éclaté » que l'énergie, avec une multitude d'intervenants et des milliers de références. Tandis que d'autres pays européens ont déjà pris des mesures et que les distributeurs avaient pris les devants en France en multipliant les annonces de modération de prix, une première réponse a été officiellement apportée lundi par le gouvernement qui a réunis ces professionnels à Bercy. 

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Pressés de réduire leurs marges, les distributeurs offriront jusqu'en juin « le prix le plus bas possible » sur une large sélection de produits laissée à leur discrétion, une opération commerciale à « plusieurs centaines de millions d'euros », selon le ministre de l'Economie, Bruno Le Maire. Mais d'après plusieurs observateurs, cette initiative risque fort de ne pas suffire au regard de l'augmentation cumulée des prix depuis plus d'un an. Et le ticket de caisse gonflera encore plus ces prochains mois sous l'effet des hausses, estimées à 10 %, après les négociations commerciales annuelles avec l'industrie agroalimentaire qui cherche à répercuter l'augmentation de ses coûts de production. 

L'association de consommateurs UFC-Que choisir plaide ainsi pour la suppression d'une disposition légale obligeant les supermarchés à vendre les produits alimentaires au moins 10 % plus cher que le prix auquel ils les ont achetés. De son côté, Michel-Edouard Leclerc, à la tête des supermarchés éponymes, dénonce une « orchestration politique ». Ces annonces ont ainsi rendu caduc le panier anti-inflation d'une cinquantaine de catégories de produits qu'envisageait de mettre en place le gouvernement, mais qui butait sur la difficulté à encadrer trop rigoureusement les prix pour des questions de concurrence. Le blocage des prix soulève la question de la jauge à fixer, pointe de surcroît Denis Ferrand, directeur général de l'institut Rexecode, sous peine d'entraîner une « distorsion du marché ».

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Exemple : « Si vous bloquez le prix des coquillettes, mais pas les spaghettis, tout le monde va se ruer sur les coquillettes », qui viendront à manquer, alors que « les distributeurs vont essayer de se refaire de la marge » sur les spaghettis. « On ne peut pas beaucoup faire baisser les marges de la distribution et il y a la limite du déficit public » qu'il faudra dans tous les cas réduire, résume Patrick Artus, conseiller économique de Natixis. « En réalité, le gouvernement n'a pas beaucoup de marge. Il faut une solution qui fonctionne en termes d'effet sur le pouvoir d'achat, qui ait un impact budgétaire faible et qui soit politiquement acceptable », détaille-t-il. Plutôt qu'une coûteuse baisse de la TVA - déjà réduite sur l'alimentation - qui profiterait à tous sans distinction de revenus, le gouvernement privilégie un chèque alimentaire destiné aux plus modestes. Une expérimentation est prévue « dans les tout prochains mois » pour ce dispositif envisagé de longue date. 

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